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Le monde a trois raisons de s'inquiéter
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Restons calmes

La World Policy Conference, qui se tient du 13 au 15 décembre à Monaco et qui rassemble plus de 300 experts internationaux, est l'occasion d'attirer l'attention des dirigeants sur les principaux enjeux géopolitiques des prochaines années. Le gaz de schiste, le développement africain et le déclin chinois devraient faire parler d'eux.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Pendant plus de trois jours, plus de 300 experts internationaux se réunissent à Monaco dans le cadre de la "World Policy Conference". Cette académie qui avait été créée par l’IFRI, se réunit chaque année mais quasiment à huis clos. Contrairement à Davos qui est devenu un rendez-vous international très "people".

Ces trois cents experts viennent du monde entier, il y avait là des économistes, des politologues, des scientifiques, des historiens, des géographes, des responsables politiques et quelques très grands patrons de multinationales, mais moins qu’à Davos. A Monaco, on ne vient pas parler business, mais plutôt échanger des savoirs afin de déterminer quelles seront les grandes tendances de l’évolution de la planète, et surtout les problèmes les plus importants qui vont se poser à partir de l’année prochaine. Pas de scoop ou de déclaration publique fracassante. Des tendances et un consensus.

Ce qui est intéressant c’est que ces experts qui viennent du monde entier essaient de se mettre d’accord sur ce qui leur paraît urgent et important. C’est une façon de mesurer l’opinion internationale.

Cette année, il s’est dégagé un consensus sur trois évolutions probables, porteuses de risques et de changements structurels et qu'il faudrait conjurer et maîtriser.

Premier changement, le rôle nouveau des États-Unis,qui vont renforcer leur puissance mondiale. La révolution impactée par la découverte des gaz de schistes (gaz et pétrole) va donner à l’Amérique l’indépendance énergétique avec en plus, la possibilité de devenir  exportateur. Ce rôle nouveau va entraîner trois conséquences. D’abord, il permet à la croissance économique de repartir et à l’industrie américaine de relocaliser ces centres de fabrication. Ça change beaucoup de choses dans l’équilibre du monde. Ensuite, cette position va affaiblir, de fait, les ambitions de la Russie dont la seule force était l’abondance de son gaz. La Russie n’a plus ce quasi-monopole de fournisseur d’énergie gazière, d’autant que son gaz est très cher.

Enfin, l’Amérique, qui aura moins besoin du pétrole d’Arabie Saoudite va prendre ses distances avec le Moyen-Orient. D’ailleurs, les choses ont déjà changé et beaucoup d’observateurs pensent que l’islam radical et politique a déjà perdu beaucoup d’influence. Faute de financement. Un pays comme le Qatar a complètement bouleversé sa stratégie de développement à la faveur de la succession du pouvoir. Pour simplifier, le Qatar stoppe ses investissements sur Al Jazeera et met le paquet en Occident sur le CAC 40. Si le Qatar reste dans la télévision ce sera plus pour diffuser du sport que de la politique islamique.

Ça n’est qu'un exemple mais il est prémonitoire. Conclusion des experts de Monaco, le temps est venu pour le monde d’en tirer les leçons.

Deuxième changement, le décollage du continent africain. Il existe un consensus pour considérer que le continent africain a sans doute découvert l’équation du développement économique. Il existe un début de classe moyenne partout en Afrique, environ 300 millions de consommateurs avec une croissance supérieure à 5%. De Dakar à Nairobi, en passant par l’Afrique du Sud, le Nigeria, les chefs d’entreprises se multiplient et se développent. Les élites formées en Occident, des ingénieurs, des médecins reviennent au pays pour s’y installer et faire du business. La plupart des pays sont en train de s’organiser administrativement et politiquement… Alors il y a des régions ou ça reste compliqué, compte tenu de l’archaïsme des structures et la multitudes des ethnies, mais les progrès sont considérables. Les investisseurs du monde entier regardent tous vers l’Afrique. Les besoin d’équipement sont considérables, (voies de communication, écoles, santé) les demandes d’organisation et de modernité sont innombrables. Tout le monde a compris que l’économie était un facteur de paix. Conclusion de nos experts, il ne faut pas manquer cette révolution en marche.

Troisième changement, le risque chinois. C’est un vrai risque pour les Chinois eux-mêmes et le reste du monde. Le modèle choisi par la Chine, il y a 20 ans, a produit des effets fantastiques. Le développement économique est incontestable. C’est le résultat d’une économie de marché, d’un capitalisme débridé et d’un système politique qui reste autoritaire. Les dirigeants chinois reconnaissent que l’équilibre de la société chinoise est tributaire du taux de croissance. A moins de 7% de croissance, Pékin est en risque de Tian'anmen… Mais pour faire plus de 7% de croissance, il faut continuer d’arroser l’Occident avec des produits pas chers. Or l’Occident ne peut pas se laisser complètement dépouiller de son industrie. D’où les répliques protectionnistes. La Chine va au-devant de deux dangers, une colère sociale que la gouvernance ne saurait pas gérer de façon pacifique, et l’impossibilité d’offrir aux Chinois un modèle de consommation occidental trop gourmand en énergie et trop pollueur. Actuellement les gouvernants chinois font comme si ces problèmes étaient encore lointains.

La plupart des experts internationaux réunis dans cette World Policy Conference, considèrent que la plupart des gouvernements de la planète et les organisations internationales (OMC, ONU, OCDE…) sont parfaitement au fait de ces questions et les assument. La plupart des gouvernements, sauf les gouvernements européens, qui de l’avis général réagissent mal aux contraintes mondiales. La crise, qui n’est rien d’autre qu’une crise de mutation structurelle, provoque en Europe des réactions protectionnistes, un repli sur soi et sur un modèle d’organisation sociale qui est au bord de la faillite.

Le modèle social ne peut plus fonctionner faute d’argent. Le modèle d’intégration politique est complètement grippé. L’exemple français a été cité comme la caricature d’une bourgeoisie qui s’enferme sur ses acquis sociaux et qui ne voit pas le monde bouger. Pour beaucoup d’experts de l’OCDE notamment, la façon dont la société française traite l’immigration ne réglera aucun des problèmes qu'elle provoque. L’approche que nous avons en Afrique ne prend pas forcement en compte le formidable enjeu que représente le potentiel économique. Notre usage abusif du principe de précaution nous interdit de faire les expérimentations dans plein de domaines que se partage la planète, l’énergie par exemple .

Enfin l’absence d’ambition et de courage pour défendre une organisation fédérale de l’Europe, met en question l'existence même de l’Europe.

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