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Malgré tous les miracles de Mandela et toutes les richesses du pays, l’Afrique du Sud reste en danger économique et social grave…
©Reuters

Futur trouble

Malgré les changements fondamentaux apportés par Nelson Mandela à l'Afrique du Sud, le pays reste à la traîne des BRICS, le club des cinq grands pays émergents, à raison de seulement 3 % de croissance depuis la fin de l'apartheid.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Nelson Mandela est aujourd’hui pleuré dans le monde entier… et il faut bien reconnaître que sa vie tient du miracle. Sa force, sa détermination, ses blessures et son combat, tout cela force l’admiration et le respect. De tout le monde. Peut-être parce que Mandela ne s’est pas battu pour les noirs mais pour l’humanité tout entière.

Il faudra d’ailleurs que l’histoire, un jour, associe à son nom celui du co-prix Nobel de la paix en 1993, Frederik de Klerk, le dernier président blanc de l’Afrique du sud, celui qui a démoli le mur de l’apartheid  contre sa famille, qui avait fait libérer Mandela et qui a construit, avec lui, la démocratie.

Mandela, qui servit de modèle politique et de réfèrent  à l’Afrique tout entière n’a pourtant pas réussi à sortir l’Afrique du Sud du sous-développement et de l’injustice sociale alimentée par les profondes inégalités.

Le pays, aujourd’hui, est certes rentré dans le club des 5 grands pays émergents, les BRICS, aux côtés du Brésil, de la Russie, de l’Inde et de la Chine. Vingt ans après la fin de l’apartheid, c’est une énorme victoire pour Mandela et ses successeurs, c’est un symbole pour tout le continent. Mais la réalité c’est que l’Afrique du Sud, qui passe pour la locomotive de tout le continent africain, est très loin derrière les autres membres des BRICS... très loin, à hauteur de l’Argentine ou de l’Autriche en poids économique global. Mais la réalité, aussi, c’est qu’un Sud-Africain sur deux vit en dessous du seuil de pauvreté. Un sur deux.  

L’Afrique du Sud n’a pas su, ou n’a pas pu découvrir un modèle de développement qui sorte la majorité du peuple de la misère. L’Afrique du Sud compte 52 millions d’habitants. Depuis la fin de l’apartheid, le pays a réussi à générer 3 % de croissance par an. Pour des occidentaux développés ça paraîtrait confortable ; pour un pays émergent c’est une catastrophe. L’Afrique du Sud aurait flirté avec la croissance à deux chiffres, entre 8 et 12 %  comme la Chine, l’Inde ou le brésil...

Depuis la crise, l’Afrique du Sud, qui était fortement dépendante de l’Europe, a perdu tout dynamisme avec moins de 1 % de croissance. Le résultat, c’est que le chômage dépasse les 25 % de la population active et que plus de 25 millions de Sud-Africains ne mangent pas à leur fin, n’ont pas accès aux soins, ni à l’école.

Le chômage, comme souvent, touche d’abord les jeunes, dans un pays ou 33 % de la population a moins de 26 ans. Ce qui pourrait être un atout formidable est devenu en période de crise un risque social difficile à conjurer.

Tout le monde se souvient des grèves extrêmement violentes qui ont d’ailleurs endeuillé le pays en août 2012. Le gouvernement se retrouve contraint d’utiliser la violence pour enrayer les troubles dans la régions des mines de platine, notamment a Mariana. Ce jour-là, la police a tiré comme au temps de l’apartheid et elle a fait plus de 30 morts.

Ce pays a d’immenses richesses, des mines d’or et de diamant, de platine et d’uranium. Ce pays a de l’énergie, puis de l’uranium... Ce pays a une agriculture qui lui permettrait d’être auto-suffisante... mais ce pays est aujourd'hui coupé en deux .

D’un coté, quelques 8 millions de riches appartenant à cette bourgeoisie noire qui s’est développée après l’apartheid, des industriels, des politiques, des hauts fonctionnaires, des intellectuels, professeurs, ingénieurs, beaucoup de financiers, et de l’autre plus de 40 millions de très pauvres.

Le pays est donc quotidiennement traversé par des grèves dans les mines, l’agriculture, ou les transports où les salariés demandent des hausses de salaires… Grèves, manifestations, provocations entretiennent un climat d’instabilité et d’insécurité que le gouvernement ne parvient pas à éradiquer  .

Ce fossé entre les riches et les pauvres n’a pas cessé de se creuser depuis 4 ans. Et ce fossé freine évidemment les possibilité de développement... Les blancs ont tendance à vivre enfermés dans des ghettos ou alors cherchent à partir comme leurs ainés, soit en Europe, soit en Tanzanie, s'ils sont agriculteurs. Les noirs qui sont aisés commencent eux aussi à regarder ailleurs.

Le clivage n’est plus d’ordre raciste, il est socio-économique. il y a ceux qui ont su profiter du système et ceux, plus nombreux, qui sont restés sur le quai de la gare.

Le pays qui a su réinventer la démocratie au profit de tous et qui reste un modèle d’organisation politique et de tolérance pour l’Afrique tout entière est désormais en risque d’instabilité sociale par défaut de croissance. C’est le gros problème de l’Afrique du Sud. La Chine, l’Inde et le Brésil ont compris que tout dépendait de leur capacité à créer de la richesse. Comment générer du développement et de la croissance, c’est l’immense défi que doit relever l’Afrique du sud. Pour l’heure, elle n’est pas dans le jeu.

L'Afrique du Sud de Mandela

Revenu moyen et et population répartie par groupes ethniques

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