Le regain de l’épidémie bouscule la prévision de reprise de l’économie et oblige Bercy à renforcer le plan de relance<!-- --> | Atlantico.fr
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Bruno Le Maire économie budget plan de relance
Bruno Le Maire économie budget plan de relance
©ERIC PIERMONT / AFP

Atlantico Business

Tout allait mieux ou presque. L’économie française pouvait terminer l’année en phase de redécollage. La reprise de l’épidémie et le risque d’une deuxième vague remettent en cause le plan de vol...

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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La détermination du gouvernement à renforcer les mesures de lutte contre le covid-19 s’explique certes par les risques de saturation des services de réanimation, mais surtout par la perspective d’un nouvel effondrement de l’économie.  

Tous ceux qui se déchainent contre les nouvelles mesures prises pour restreindre la circulation du virus se trompent sans doute en disant que ces nouveaux protocoles vont tuer l’économie. C’est l’inverse qui risque de se passer.  Ces mesures-là peuvent, en paralysant le virus, sauver les chances d’une reprise de l’économie au début de l’année prochaine.

La situation dans les hôpitaux risque en effet d’être tendue mais beaucoup moins qu‘en mars dernier. Surtout qu’on pourrait cette fois-ci faire appel aux hôpitaux et cliniques privées en cas de surchauffe, ce qu‘on n’avait pas fait assez vite en mars.

Le problème principal ne touche pas d’abord à la situation sanitaire, mais affecte surtout l’état de l’économie.

Le gouvernement a passé la semaine dernière à présenter le projet de loi de finances pour 2021, finaliser le plan de relance de 100 milliards et publier le prochain budget de la sécurité sociale. Les perspectives n’étaient certes pas idylliques, mais plausibles. Sur la base de la reprise d’activité après le confinement, Bercy avait ramené la perte de valeur à moins de 9% sur l’année contre plus de 11% initialement prévue et un rebond de 7 à 8% pour 2021. Avec un peu de chance sur la conjoncture européenne, on aurait pu parier sur un rattrapage des pertes à la fin 2021, ce qui changeait l’éclairage pour 2022.

Ce rééquilibrage permettait de limiter le déficit des dépenses publiques et sociales à 5 ou 6%  du PIB et un endettement global plafonné à 120%. Ce qui était supportable compte tenu des taux faibles et de la solidarité européenne.

La structure pour reconstruire un nouveau contrat de confiance avec l’opinion existait : le gouvernement pouvait alors respecter son engagement de ne pas augmenter les impôts. Il pouvait même continuer comme prévu de baisser les impôts de production, et financer le traitement social du chômage en cas de vague de licenciements liés aux restructurations industrielles. Ce climat permettait même de rassurer l‘opinion qui aurait pu desserrer un peu les cordons de bas de laine qui se sont formés depuis le début de l’année, une masse d’épargne quasie liquide absolument historique. Les conditions pour ramener cette épargne de la peur dans un cercle vertueux au profit de la croissance pouvaient se mettre en place.

Le problème, c’est que le retour de l’épidémie au début du mois de septembre a cassé ce schéma de reprise et oblige le gouvernement à réécrire le scénario. Les chefs d’entreprise s’en sont aperçus très vite au retour des vacances avec l’augmentation du stress chez les DRH qui comptabilisaient les arrêts maladies. En général, ce stress est un bon indicateur avancé du stress qui va toucher le personnel médical deux semaines plus tard.

Dès la mi-septembre, avant même qu'on ne parle de renforcement des mesures de protection au niveau du gouvernement, on percevait dans les entreprises une remontée de l’inquiétude. La fréquentation des commerces s’est ralentie à nouveau, le trafic aérien n’a pas redémarré comme on pouvait le prévoir, du coup, beaucoup de projets d’investissements et d’évènements commerciaux ont été à nouveau retardés ou annulés, avant même que le gouvernement n’annonce de nouvelles mesures coercitives. C’est donc bien la remontée de l’inquiétude qui a modifié le scénario de reprise.

Tous les premiers perdants de la première vague ont vu très vite que cette seconde vague allait les empêcher de reprendre leur souffle avant la fin de l’année : dans le transport aérien, le tourisme, l’hôtellerie et la ­restauration, l’événementiel et le activités culturelles ou sportives ainsi que l’ensemble du commerce non digital.

Bercy craint donc désormais que cette deuxième vague du covid 19 rabote les gains de croissance (+17%) réalisés au cours de l'été et sans trop le clamer, intègre dans le 9% de prévision de croissance retenue, l’impact économique de ce nouveau choc à la reprise de l’épidémie.

Sur le front de l’emploi par exemple, beaucoup pensent que le chômage partiel, qui a été une arme très efficace pour amortir le premier choc, sera transformé en chômage permanent dans beaucoup de secteurs touchés directement, notamment dans l’évènementiel et la restauration.

Dans les grands magasins, le transport aérien, l’hôtellerie, tous les grands opérateurs ont fait une croix sur l’hypothèse d’un rebond très fort au début de l’année prochaine. Pour deux raisons, l’environnement international est vraiment médiocre notamment en Europe, à cause du Brexit, du protectionnisme américain et de l’état sanitaire en Europe.

Pour toutes ces raisons, les perspectives budgétaires tracées par Bercy sont très théoriques. Dans ces conditions, il est absolument nécessaire que le gouvernement décide du bon dosage dans les mesures de restrictions nouvelles. Il ne s’agit pas d’asphyxier les activités économiques, il s’agit au contraire de les protéger pour qu‘elles puissent ressortir la tête hors de l’eau.

L’exercice est très compliqué. L’exécutif a fait tellement d’erreurs jusqu'à maintenant que, quoi qu’il fasse, il est très difficilement crédible. Il doit par une communication habile convaincre que les mesures de protection ou de confinement ne sont pas « punitives » mais protectrices de l‘activité et du lien social.

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