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Comment la France empêche ses PME de grandir
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Les entrepreneurs parlent aux Français

Des VTC à Blablacar, la France ne cesse de mettre des bâtons dans les roues de ses petites entreprises tout en avantageant les grands groupes, qui non seulement n’ont pas besoin d'aide mais la gâchent.

Denis Jacquet

Denis Jacquet

Denis Jacquet est fondateur du Day One Movement. Il a publié Covid: le début de la peur, la fin d'une démocratie aux éditions Eyrolles.  

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La France aime ce qui est petit. Ce qui est petit est présumé mignon, inoffensif, digne de respect. Le petit qui réussit, par contre, devient suspect. Il entre dans une cour qui est réservée aux chauffeurs de la République, qui ont le diplôme adéquat. Il risque de perturber l’ordre établi, borné par la résistance au changement. Le petit qui réussit, semble également suspect au grand public, à qui on explique depuis longtemps que le gros écrase, que le grand n’est pas forcément le meilleur, et que le grand jouit toujours seul de sa réussite, au détriment de ceux qui l’ont aidé à réussir. Les Français aiment les David qui se battent contre Goliath, et les aime moins une fois qu’ils l’ont vaincu.

Nous avons ainsi nos grands groupes, que l’on déteste avec une certaine constance. Et nos PME, qui sont minuscules et que l’on respecte parce qu’elles ne prétendent pas bousculer l’ordre naturel. C’est une recette de l’échec et de l’immobilisme, mais nous avons habitué les Français à ce fatalisme. Sauf dans le sport. Le dernier exutoire des foules. Tout cela ne fait pas nos affaires à nous les gueux, les entrepreneurs.

Nous sommes pourtant bons, et avons quelques exceptions qui confirment la règle.

Nous avons inventé le déstockage vestimentaire. Nous parvenons à avoir quelques beaux acteurs. Certes. Vente et Show Room Privé. L’un vise 5 milliards, l’autre s’achemine vers le premier.

Nous avons Critéo, Sigfox, Withings, Blablacar. OK. Cela fait environ une dizaine d’entreprises françaises qui franchissent ou franchiront peut être le plafond de verre. Difficile d’en faire un lance roquette qui fasse exploser les corporatismes qui bloquent les 3 autres millions de PME qui plafonnent, pour les 2/3 d’entre elles, à 1 salarié. Et même nos champions en gestation, font pour le moment un chiffre d’affaire assez inversement proportionnel à l’espace presse qu’ils occupent. Mais parions sur leur succès. Espérons-le. Soutenons-le.

Nous résistons aux VTC, qui auraient pu nous donner des acteurs au moins européens. Nous allons être un des rares pays qui va refuser à Uber Pop de continuer son activité, alors que cela donne un travail et un sens profond du service et du client, une capacité d’intégration, à une population souvent de souche étrangère, du Maghreb et Afrique. Et surtout, qui remettait en cause un monopole sclérosé, possédé par G7 et Taxi Bleus, qui sont d’ailleurs les mêmes. Nous finirons là aussi avec de beaux nains.Chauffeur-privé qui aura levé quelques millions, quand Uber parle déjà en milliards.

Nous refusons aux nouveaux acteurs d’envahir le terrain des professions réglementées, notamment dans la conciergerie juridique, ou les offres d’élévation des enchères des "crapuleux" administrateurs et liquidateurs judiciaires sont les pires d’Europe. Et de loin !

Nous avons osé donner 75M d’euros à Orange et au conglomérat CDC et Bull, qui avait me semble-t-il assez peu besoin de 75M d’euros, pour lancer une offre de Cloud Souverain, voire européen. Ces magnifiques géants ont réussi en 2 ans, l’exploit, de faire moins, avec des centaine de milliers de salariés et 75M, que la moindre start-up de Corrèze aurait fait dans le même temps (et ce n’est pas gentil pour la Corrèze !). Au lieu d’un cloud "souverain" confié à des start-up brillantes, éventuellement associées aux Orange ou autre Bull, qui auraient pu, offrir une alternative, en France, à Amazone, ou Google, nous nous dotons de structures administratives et engluées dans les process et commissions de réflexion, qui auront certainement absorbé les 75M en réunions dans divers endroits balnéaires ou montagneux, pour de coûteux et inutiles séminaires de réflexion. Quasi pas de chiffre d’affaire, et toujours pas de Cloud, qui permettrait aux acteurs français de savoir que si leurs petites affaires sont sous surveillance, au moins, c’est une surveillance française. Et non américaine.

Et pour couronner le tout, quand nous avons des acteurs brillants du numérique, des acteurs de l’hébergement dont nous devrions être fiers, des acteurs du digital que nous devrions encourager, nous décidons au nom de la défense contre le péril islamique, que le politique n’a fait qu’attiser tel un feu conçu pour décimer le monde, sur nos propres territoires (banlieues hors de contrôle depuis 30 ans, défense pathétique et systématique de tant d’acteurs politiques français du Hamas comme d’un espace de démocratie contre Israël, armement de ceux qui mettent le monde à feu et à sang sous prétexte de dégager le président Syrien, soutien de la bêtise américaine en Irak et aveuglement Sarkozyste en Lybie etc…), de les assommer en décidant d’une loi sur le renseignement, non seulement vicieuse, mais qui va bien au-delà du but qu’on lui assignait. L’Etat ne sait pas créer de la valeur souveraine, mais trouve plus facilement le chemin qui mène au contrôle souverain de tout ce qui lui échappe. Mettre le digital sous clé. Quelle belle conception. La Chine va l’acheter plus facilement que le reste du monde n’achète nos rafales !

Fermer les sites des islamistes de tous poils. Bien sûr. Qui serait contre ? Il faut les traquer sur le terrain, les exterminer au plus vite, et arracher les mauvaises herbes plantées sur notre territoire, qui viendront les alimenter. Mais comment oser en profiter pour mettre nos acteurs sous les verrous. Honte à ce Ministre. La fermeté facile. Au lieu du travail sur le terrain, des mesures d’exception nécessaires pour prendre le mal à ses racines, et envoyer ses forces reprendre le contrôle des terrains en errance, nous allons museler et surveiller via les acteurs économiques, nos concitoyens, dans chacun de leurs gestes quotidiens. Google et Nest en avaient rêvé, Cazeneuve l’a fait !

OVH se voit menacer de perdre ses clients et pense déjà à délocaliser ses serveurs en dehors de France, et ainsi alimenter la machine à chômage, qui nous distribuera ainsi quelques claques supplémentaires, pour les prochaines statistiques de l’emploi en France. Ces politiques sont vraiment les champions de la mauvaise mesure, au mauvais moment, même quand leurs motifs sont les bons.

En conclusion, quelque soit l’endroit où se porte notre regard, on privilégie le "nain" économique, bloquant son arrivée, réduisant sa taille, avantageant le grand qui non seulement n’a pas besoin de l’aide qui lui est donné, mais la gâche. La prime au petit, c’est la prime à la casse. La casse d’une machine à croissance.

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