Réenchanter le travail des seniors, un atout insoupçonné pour la transition écologique<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Société
Un garagiste travaille sur un véhicule auprès d'un apprenti.
Un garagiste travaille sur un véhicule auprès d'un apprenti.
©MYCHÈLE DANIAU AFP

Bonnes feuilles

Serge Guérin publie « Et si les vieux aussi sauvaient la planète ? » aux éditions Michalon. Face au réchauffement climatique et à la transition démographique qui nous attend, des changements d’imaginaires et de consommation s’imposent. Sortons de l’opposition entre la « génération climat » et « OK boomers » : place à la réflexion et à l’action intergénérationnelles. Extrait 2/2.

Serge Guérin

Serge Guérin

Serge Guérin est professeur au Groupe INSEEC, où il dirige le MSc Directeur des établissements de santé. Il est l’auteur d'une vingtaine d'ouvrages dont La nouvelle société des seniors (Michalon 2011), La solidarité ça existe... et en plus ça rapporte ! (Michalon, 2013) et Silver Génération. 10 idées fausses à combattre sur les seniors (Michalon, 2015). Il vient de publier La guerre des générations aura-t-elle lieu? (Calmann-Levy, 2017).

Voir la bio »

Alors, comment rendre les défis posés par l’objectif d’une société décarbonée et durable suffisamment désirables pour donner envie de travailler plus et… autrement?

Paradoxe n°1 : dans ce nouveau contexte de fin de chômage de masse, les entreprises ont de plus en plus de mal à recruter mais se focalisent toujours sur les jeunes. Sans saisir, pour la plupart, que l’emploi des seniors serait une piste pour retrouver des forces vives, des richesses humaines, des compétences utiles…

Paradoxe n°2 : la transition écologique impose de mieux utiliser les ressources, de lutter contre l’obsolescence programmée, de favoriser les richesses locales. Or, aucune politique globale, simple et concrète n’a été réellement mise en place pour favoriser l’emploi des seniors. Permettre aux gens de travailler plus longtemps, c’est aussi du développement durable. Ils forment une richesse humaine qui ne s’use que si l’on ne s’en sert pas, une ressource de compétences et d’expérience, une somme de capacités disponibles localement.

Paradoxe n°3: jamais l’espérance de vie en France, en Europe et dans le monde, n’a été si longue. Jamais l’entrée dans la vie professionnelle active n’a été en moyenne si tardive. Et pourtant, pratiquement jamais l’espérance de vie professionnelle n’a été si limitée. Il apparaît toujours incroyable d’imaginer de pratiquer un métier au-delà d’un âge limite très réduit. Et pourtant, nombre de salariés ou d’autres statuts apprécient – ou auraient apprécié – de travailler plus longtemps.

Paradoxe n°4 : face à la pénurie de compétences disponibles, les seniors, avec leurs savoirs et savoir-faire et leur envie de travailler, sont une chance pour les entreprises. Le vivier est là, mais seulement 56,1 % des 55-64 ans sont en emploi89. Pour comparer, la moyenne des 27 pays de l’Europe est de 60,5 % et, en Suède, le taux d’emploi des seniors est de 79,5 %… Remarquons, aussi, que des salariés plus expérimentés gâchent moins ou produisent moins de mauvaises pièces, utilisent moins de matières premières… Bref, contribuent sans doute plus à la préservation des ressources. Là encore, les vieux sont bien des acteurs de la sauvegarde de la planète.

Mais si l’image du travail est déficitaire, que dire de celle des seniors dans l’entreprise? Changer les représentations des seniors et favoriser leur emploi est un préalable à toute réforme des retraites : sinon, le risque sera de renforcer et rallonger encore le chômage des plus de 50 ans. Renforcer l’emploi des seniors forme le levier premier pour améliorer le taux d’activité.

Reste que, pour une grande partie des dirigeants et des responsables de ressources humaines, l’image des seniors est encore largement associée à une charge économique, un problème de cohésion interne, un risque de productivité… Sans compter qu’ils peuvent estimer que la présence en nombre de seniors dans leur organisation aurait un effet repoussoir sur les candidats plus jeunes… Une étude Ipsos, de novembre 2022, montre que pour les recruteurs, on est senior en moyenne à 49,6 ans. Tout est dit.

Signalons d’abord que la faiblesse de l’emploi des seniors est le facteur principal de ce taux d’emploi insuffisant évoqué plus haut. Les plus de 50 ans sont les principales victimes du chômage, y compris alors que les entreprises, depuis le relatif retournement du rapport au travail lié à la crise de la Covid, les premiers effets de la chute de la natalité et la baisse de la productivité, ont du mal à recruter et fidéliser les jeunes salariés.

Le sujet de la hausse du taux d’emploi, en particulier des seniors, fut l’un des angles morts majeurs de la longue séquence autour de la contestation de la réforme des retraites en 2022-2023. Pas plus les syndicats de salariés et d’employeurs, que les politiciens récusants la réforme, que ceux-là défendant ne se sont interrogés sérieusement sur la question de la place des seniors dans le monde du travail. Il aurait été plus compréhensible de démarrer par une politique volontariste en faveur de la valorisation de l’expérience et de l’emploi des seniors avant d’évoquer un allongement de la durée d’activité. Précisons que le taux d’emploi des seniors de 60-64 ans en France est de 33 %, pour 61 % en Allemagne, 63 % aux Pays-Bas. Et 69 % en Suède…

Extrait du livre de Serge Guérin, « Et si les vieux aussi sauvaient la planète ? », publié aux éditions Michalon

Liens vers la boutique : cliquez ICI et ICI

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !