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Pauvre Cour des comptes... Rien de ce que son rapport annuel avait épinglé l'an passé n'a été suivi d'effets
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Dans le vide

La Cour des comptes présente ce mardi son rapport annuel. Au vu des nombreuses préconisations passées à la trappe les années précédentes, on peut sérieusement douter du fait que l'édition 2014 ait l'effet désiré sur les pouvoirs publics.

Jean-Michel Rocchi

Jean-Michel Rocchi

Jean-Michel Rocchi est président de Société, auteur d’ouvrages financiers, Enseignant à Sciences Po Aix et Neoma.

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Atlantico : Quelles étaient les perspectives du précédent rapport annuel de la Cour des comptes ?

Jean-Michel Rocchi :En 2013, la Cour des comptes estimait que le gouvernement ne parviendrait pas à ramener le déficit à 3 % du PIB, et effectivement il n'y est pas arrivé.  Elle a appelé à de nouvelles économies structurelles : la « Modernisation de l'action publique » devant amener « à une révision du contenu des missions ». Les pistes proposées par la Cour étaient nombreuses : retraites, politique familiale, formation professionnelle, aides aux entreprises, logement, collectivités locales...

En 2013 la Cour des Comptes constatait  avec scepticisme : « Aucune réforme porteuse d'économies substantielles au-delà de 2013 ne peut être identifiée ». Effectivement, le gouvernement, qui a fait le choix de n'identifier aucune piste d'économies réelles et concrètes, n'a réalisé aucune économies. 

Les préconisations n'ont donc pas été suivies par le gouvernement ?

Le Tome II du rapport qui sort ce mardi porte sur les suites données par les institutions et organismes contrôlés. Les préconisations 2013 de la Cour n'étaient pourtant pas très ambitieuses et elles n'ont que très peu été suivies d'effet. 

Quelles sont les dépenses pour lesquelles la situation s'est dégradée ?

Le gouvernement annonce des baisses de dépenses, mais c'est toujours pour plus tard. La vérité, c'est que l’État a dépensé plus en 2013 (376,7 milliards) qu'en 2012 (374,2 milliards). On va encore nous expliquer que la vitesse d'augmentation des dépenses s'est ralentie, mais ce n'est pas le sujet ! Il faut que les dépenses baissent en valeur absolue, de manière significative et pour plusieurs années. Pour l'instant, il n'y a pas de concret, que des vœux pieux encore démentis en 2013.

L'étude controversée de Carmen Reinhart et Kenneth Roggoff ("Growth in time of Debt", American Economic Review - Papers and Proceedings, 2009) démontre qu'il existe une corrélation entre un fort endettement et une stagnation économique. Si la méthodologie et les raccourcis se discutent, le sens ne l'est pas car d'autres études allaient dans le même sens. Puisque le Président Hollande se trouve dans le pays du rêve américain un petit comparatif qui se passe de commentaire : 

PaysDépenses publiques sur PIBTaux de croissance 2013Taux chômage
Etats-Unis42%1,90%6,70%
France57%0,20%10,50%

La bureaucratie française use et abuse de l'exception française, l'exception française c'est que dans l'hexagone la croissance ne repart pas, contrairement à ce que l'on constate ailleurs !

Peut-on attendre une amélioration cette année sur certains postes de dépenses ? Si oui, lesquels ?

En fait l'actuel gouvernement ne fait pas vraiment d'économies, il annule des dépenses antérieures. C'est un tour de passe qui est indispensable car François Hollande a annoncé en janvier 2014 qu'il va faire le contraire de ce qu'il fait depuis 20 mois. Le gouvernement n'est pas crédible pour faire baisser de manière significative les dépenses publiques car il n'en a ni la volonté, ni la majorité politique au parlement.

Il y aura probablement ça et là quelques réformettes car nous sommes dans une année électorale et que l'excès des dépenses publiques et de la fiscalité va se frayer un chemin dans le débat électoral.

Pourtant il y aurait beaucoup à faire : la protection sociale (retraites, chômage...) représente 57,3 % des dépenses publiques, puis viennent les services généraux dont la dette publique (11,5 %), l'éducation (10,8 %), les affaires économiques (6,2 %), le logement et les équipements collectifs (3,4 %), la défense (3,2 %), l'ordre et la sécurité publique (3,1 %), la culture et les cultes (2,5 %) et enfin la protection de l'environnement (1,9 %). Le service de la dette publique est un gros facteur de risques de dérapage en cas de remontée des taux d'intérêts avec un encours de 1 900 milliards de dette publique.  

On peut s'interroger sur la politique d'économies de bout de chandelles qui porte sur les fonctions régaliennes, qui ne représentent pourtant que 6% du total des dépenses... Sacrifier la sécurité des Français n'a quasiment pas d'impact sur le total, il faut le savoir !

A l'inverse, aucun effort de réduction des dépenses portant sur la protection sociale et le coût de l'administration (69 %) n'a été réalisé. C'est consternant... La crise des dépenses publiques, ce n'est pas la remise en cause de l'Etat régalien (6 %) ni de l'Etat dans la version de l'économiste Charles Dupont-White (18 % en rajoutant les dépenses d'éducation), c'est la crise de l'Etat Providence. 

S'il n' y a pas de croissance il n'y a rien à partager. La France s'appauvrit, le PIB par habitant est inférieur de 2,8 % en 2013 à ce qu'il était en 2007. En effet, sur la même période la population française s'est accrue de 2,2 millions. La France, qui se vante de sa politique nataliste et de naturalisation, a t-elle raison en l'absence de croissance ?  

Et si Thomas Malthus avait raison ? En effet, ne perdons pas de vue le fait démographique ; la réduction des dépenses publiques est plus facile à population constante car le potentiel d'économie porte principalement sur les  dépenses de l’État providence.   

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