Pourquoi la taxe sur les transactions financières fera plus de mal que de bien<!-- --> | Atlantico.fr
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Les chrétiens-démocrates d'Angela Merkel et les sociaux-démocrates ont convenu lundi du principe d'une taxe sur les transactions financières.
Les chrétiens-démocrates d'Angela Merkel et les sociaux-démocrates ont convenu lundi du principe d'une taxe sur les transactions financières.
©Reuters

Fausse bonne idée

En Allemagne, la nouvelle alliance entre le CSU et le SPD s'est accordée sur la mise en place d'une taxe sur les transactions financières. Cette dernière pourrait avoir des conséquences imprévisibles et se révéler plus mauvaise pour les peuples que pour les banques.

Bruno Bertez

Bruno Bertez

Bruno Bertez est un des anciens propriétaires de l'Agefi France (l'Agence économique et financière), repris en 1987 par le groupe Expansion sous la houlette de Jean-Louis Servan-Schreiber.

Il est un participant actif du Blog a Lupus, pour lequel il rédige de nombreux articles en économie et finance.

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En Allemagne, les négociations entre  la CSU et le SPD continuent. Il y a un point sur lequel ils sont tombés d’accord. Ce point est constitué par la taxe sur les transactions financières. Les détails de cette taxe, qui a fait l’objet d’un accord, ne sont pas connus, mais la presse suggère que le compromis pourrait être basé sur une taxe à taux faible, mais à assiette large. Nous vous rappelons qu’il y a quelques jours le gouverneur de la Banque de France, Noyer, lequel devait être au courant des négociations, a tiré la sonnette d’alarme. Il a expliqué qu’avec cette taxe, on ouvrait une boite de Pandore et que les conséquences pouvaient être imprévisibles. Pour lui, cette taxe est aventureuse, elle va pénaliser le secteur bancaire et ceci va se transférer sur les conditions de financement des États.

La critique de Noyer est tout à fait fondée, même pour des gens comme nous qui luttons contre la financiarisation. Il faut en effet choisir et être cohérent. Ou bien on reste dans le cadre de la financiarisation et on fait en sorte de maintenir la fluidité des mécanismes, cela est cohérent ; ou bien on sort du système de la financiarisation et, à ce moment-là, la question des taxes ne se pose plus. Vouloir pénaliser la finance par des taxes est une imbécilité. Cela va introduire un « frottement », une absence de fluidité dans les transactions financières et, in fine, qui paiera les taxes, ce ne seront bien sûr pas les banques, mais les utilisateurs et les clients finaux. Par ailleurs, les taxes produiront des délocalisations, des détournements de flux et des déséquilibres de compétition.

Hélas, lorsque la politique se mêle de toucher à des choses qu’elle ne comprend pas, les compromis aboutissent à des moutons à cinq pattes dangereux. Les moutons à cinq pattes qui se comportent comme des lions, Merkel connait bien. Malgré sa réputation de bonne gestionnaire de la crise, elle accumule les bévues. Ainsi, c’est elle qui est responsable de l’aggravation de la crise européenne lorsqu’elle a exigé, là aussi pour des raisons politiques, une participation aux pertes du secteur privé. Cette décision a été l’une des plus coûteuses que l’on n’ait jamais prise.

Valeurs des produits dérivés de la Deutsche Bank

Le secteur bancaire européen est dans une situation critique. La hausse des marchés et la baisse des taux n’ont aucun rapport avec une quelconque amélioration de la situation des créanciers et de celle des débiteurs. La baisse des taux et l’illusion d’amélioration n’ont pour origine que le « coûte que coûte » de Draghi. L’illusion d’amélioration ne vient que de là : Draghi a promis de tout payer et en toute quantité, quel qu’en soit le coût. Le jour où Draghi a promis cela, les banques ont cessé leur chantage, elles ont levé le pied et cessé de faire pression sur les marchés. Au passage, notons que les hedge funds ont gagné des fortunes sur le dos des citoyens européens.

Source : Goldman’s Jernej Omahen

Les problèmes bancaires sont entiers. Le mécanisme de résolution des crises bancaires est ridicule. Les montants sont beaucoup trop petits et encore le fonds de secours ne sera constitué qu’au fil des années. La taille du fonds de secours et la mise en pratique de ce fonds sont telles qu’il ne confère aucune sécurité au système.

Nous vous signalons, pour vous donner le moral, qu’un rapport qui vient de sortir évalue les prêts non performants, les NPL, des banques européennes à plus de 1,2 trillion. Ce rapport a été fait par PWC, il est commenté dans le FT.

"Le montant des prêts à risque des banques européennes a doublé entre 2008 et 2012, indique un rapport de PwC

Selon Richard Thompson de PwC, le rééquilibrage des bilans du secteur bancaire européen, qui doit passer par l’épuration de ces prêts défaillants, devrait encore prendre quelques années. Il estime que le portefeuille de créances douteuses que les banques devraient chercher à revendre ou à passer en pertes se monte à 2.400 milliards d’euros.

Les données sur lesquelles PwC s’est basé pour son rapport proviennent des banques elles-mêmes. C’est l’Allemagne qui est la plus en risque, avec un portefeuille de créances douteuses estimé à 179 milliards d’euros, mais qui est resté inchangé par rapport à l’année dernière. En revanche, l’Espagne est passée d’un montant de 136 milliards d’euros en 2011 à 167 milliards d’euros en 2012." (Source EXPRESS.BE)


Cet article a initialement été publié sur : Le blog à Lupus, un regard hagard sur l'économics et ses finances.

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