Les deux graphiques qui résument trois ans de longs discours sur les causes de la crise de la zone euro<!-- --> | Atlantico.fr
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Dans un premier temps, l’euro a été comme une drogue pour des pays comme la Grèce.
Dans un premier temps, l’euro a été comme une drogue pour des pays comme la Grèce.
©Reuters

Rattrapage

En comparant l'Allemagne avec la Grèce, deux graphiques publiés dans le Business insider expliquent très simplement les raisons de la crise dans les pays du sud, et la meilleure résistance de leurs voisins nordiques.

Philippe Simonnot

Philippe Simonnot

Philippe Simonnot est économiste. Son dernier ouvrage en librairie s’intitule Non l'Allemagne n'était pas coupable, Notes sur les responsabilités de la Première Guerre Mondiale (Editions Europolis, Berlin). Il est aussi l'auteur de Chômeurs ou esclaves, le dilemme français, (Ed. Pierre-Guillaume de Roux). En 2012, il publie La monnaie, Histoire d’une imposture (Editions Perrin), en collaboration avec Charles Le Lien.

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Les deux graphiques ci-dessous, tirés de Business Insider, illustrent bien la crise de l’euro. Certes ils ne concernent que l’Allemagne et la Grèce qui se trouvent comme aux deux extrémités de la zone euro, mais la leçon que l’on peut en tirer dépasse de beaucoup ces deux pays. La promesse des eurocrates :  plus de croissance pour tout le monde dans une Europe harmonieuse, promesse faite au moment du lancement de la monnaie unique, n’a pas été tenue ; elle n’était pas tenable.


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Que voyons-nous sur le premier graphique ? Un envol des importations grecques et des exportations allemandes depuis la création de l’euro jusqu’au déclenchement de la crise mondiale en 2008-2009. Tout se passe comme si l’euro était surévalué pour la Grèce – d’où l’essor des imports – et sous-évalué pour l’Allemagne (d’où la progression des exports). A partir de 2009, les importations grecques s’effondrent parce que la Grèce n’est plus capable d’exporter suffisamment pour se payer ses importations. En Allemagne, au contraire, après un fléchissement, les exportations allemandes repartent à la hausse parce que la compétitivité de l’industrie allemande est capable de surmonter les effets de la crise mondiale.


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Ce deuxième graphique confirme l'analyse exposée plus haut. On y voit que le coût unitaire du travail en Grèce ne cesse de grimper depuis la création de l’euro jusqu'à la crise de 2008. Au contraire, en Allemagne, le coût du travail  diminue entre 2004 et  2008 – clairement une conséquence de la réforme du marché du travail entreprise à partir de 2003 par Gerhard Schröder, alors chancelier fédéral.

Dans un premier temps, l’euro a été comme une drogue pour des pays comme la Grèce. La monnaie unique dotait les Grecs d’un pouvoir d’achat sur les marchés extérieurs  relativement élevé, inattendu et immérité – d’où le boom de leurs importations -  alors même qu’elle leur  permettait d’emprunter à des taux "allemands" - c'est-à-dire à des taux qui étaient très inférieurs à ce qu’ils auraient dû être si la Grèce n’était pas entrée dans  la zone euro. D’où le laxisme en matière de salaires et de prestations sociales qui s’est traduit par une hausse vertigineuse du coût du travail grec. Cet effet d’aubaine n’a pas joué en Allemagne grâce aux réformes Schröder.

Les eurocrates avaient parié sur une convergence des économies dans l’eurozone. C’est le contraire qui s’est produit, et pas seulement entre les extrêmes allemand et grecs. Pour que ces économies convergent, il aurait fallu une complète libéralisation du marché du travail dans tous les pays membres et une réduction des obstacles culturels et linguistiques qui freinent les mouvements de main-d'œuvre. Un marché du travail unique n’était pas réalisable en un temps si court.

Souvent en France, on reproche  à l’Allemagne non seulement d’être vertueuse mais en plus de vouloir exporter, voire imposer ses vertus aux autres pays européens. Cet hommage involontaire du vice à la vertu est en outre  un mauvais procès. Gerhard Schröder n’a fait qu’essayer de mettre le marché du travail allemand au diapason d’une économie libérée des entraves réglementaires. L’adhésion à la zone euro n’a jamais signifié le maintien de l’étatisme dans tous les domaines, et notamment dans celui crucial des relations de travail. Bien au contraire !

Du reste, la France s’est engagée sur ce chemin depuis l’accord signé le 11 janvier  2013 entre le Medef et certains syndicats - reconnaissant implicitement que la cause majeure du chômage en France se trouve dans les replis de notre immense et complexe et indigeste Code du Travail. Mais notre pays est encore très loin du compte – par exemple une institution aussi nuisible pour l’emploi  que le SMIG reste absolument intouchable -, et c’est une des raisons pour lesquelles les économies françaises et allemandes continuent de diverger dangereusement – au risque de faire sauter l’euro.

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