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Prévisions 2020

L'Asie est en constant changement depuis quelques décennies et évolue rapidement dans tous les domaines. En 2019, le territoire a d'ailleurs connu beaucoup de tensions et l'année en cours ne sera plus calme. Explications.

Emmanuel Lincot

Emmanuel Lincot

Professeur à l'Institut Catholique de Paris, sinologue, Emmanuel Lincot est Chercheur-associé à l'Iris. Son dernier ouvrage « Le Très Grand Jeu : l’Asie centrale face à Pékin » est publié aux éditions du Cerf.

 

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Une année de tension. En Asie tout d’abord, l’actualité est marquée par les élections de Taiwan à la mi-janvier. Quelle qu’en soit l’issue, Pékin réagit. Verbalement, et sans doute sur le ton de la menace. Taiwan se trouve confortée dans ses choix souverainistes. Washington instrumentalise cette crise et fait valoir ses droits - le Taïwan Relations Act (1979) - à soutenir militairement l’île rebelle. Cette crise s’ajoute à celles de Hong Kong et du Xinjiang. Le Parti Communiste Chinois durcit ses positions. Les répressions augmentent. En matière de politique étrangère, Pékin condamne mollement le tir de missile intercontinental auquel Pyongyang vient de procéder avec succès. Fondamentalement, toute initiative visant à déstabiliser Washington et ses alliés participe d’une logique globale. Ainsi, les incidents dans le sud de la mer de Chine se multiplient entre le Vietnam, l’Indonésie et la Chine. Les Philippines et le Cambodge soutiennent les vues chinoises dans les litiges insulaires qui opposent Pékin à ses voisins. Singapour propose une mission de bons offices. En vain. 

Washington est par ailleurs convaincu que le régime chinois est aux abois. La croissance chinoise est au plus bas, la progression inexorable du Gobi, la sécheresse à laquelle 400 millions de Chinois sont confrontés, la pollution et ses dégâts irréversibles ont provoqué des vagues de mécontentements populaires qui ébranlent l’ensemble du pays. La guerre commerciale à laquelle se livre Donald Trump contre la Chine produit également ses méfaits. Elle est d’autant plus cruciale que le candidat républicain est partisan d’une voie dure pour faciliter sa réélection. Pékin alors en difficulté se rapproche tous azimuts de Moscou. La Russie et la Chine s’apprêtent à investir massivement au Proche et Moyen-Orient déjà en phase de reconstruction. Un axe Ankara / Moscou / Pékin se forme. Deux ramifications prolongent cet ensemble stratégique en prenant appui sur les relais que représentent respectivement Téhéran et Islamabad. L’Iran joue ainsi le rôle de gendarme régional. Quant au Pakistan, il assure à la Chine un couloir d’approvisionnement en hydrocarbures, vital à son économie et ce, en contournant Malacca. Si l’Arabie Saoudite conserve le soutien des États-Unis, elle n’en est pas moins contrainte de se rapprocher d’Israël. Cette alliance jugée contre nature provoque des remous dans le monde musulman. 

Des éléments radicaux issus de Daesh et d’Al Qaïda se replie en Afghanistan, au Balouchistan, et au Cachemire. Trois autres pays de l’Asie centrale sont menacés par le cancer djihadiste : le Tadjikistan, le Kirghizistan et l’Ouzbékistan oriental (vallée du Ferghana). Crisogènes, ces régions mettent à mal le projet des Nouvelles routes de la soie, initié par Xi Jinping. Les attentats contre les ressortissants chinois dans la région sont de plus en plus nombreux. L’Asie centrale devient instable. Bruxelles et les grandes capitales européennes n’en ont cure. À tort. Car même si les investissements et la présence chinoise sont chaque jour davantage contestés, l’absence européenne et le désengagement américain offrent à Pékin et Moscou une profondeur de champ stratégique inédite. Cette stratégie se traduit par l’établissement de comptoirs et le contrôle des principales voies d’accès. La Méditerranée, dans ce contexte, est en passe de devenir un lac russo-chinois. Le prolongement terrestre à cette présence se trouve dans les Balkans. Les signatures en amont des MoUs favorables au projet des Nouvelles routes de la soie entre le Portugal, l’Italie et la Chine n’augurent rien de bon pour ce qui concerne l’Union Européenne et sa cohésion déjà très affaiblie par le Brexit. À cette fragilité d'ensemble s’ajoute un problème sécuritaire aggravé par la situation anarchique libyenne et le commerce de la drogue qui, depuis l’Afrique, alimente le marché, en pleine expansion, des banlieues françaises et européennes. 

Les narcotraffics sapent l’autorité des États, détruisent les sociétés et accentuent la lutte entre mafias et clans tant en Europe qu’en Afrique. Le djihadisme s’en nourrit essentiellement et fait le jeu des idéologues de toute obédience ternissant - au Sahel notamment - l’image de la France. Il va sans dire qu’aucune opération Barkhane n’y mettra fin. Non plus que le choix d’une repentance comme le fit Emmanuel Macron en décidant de restituer aux Africains un patrimoine que protègent au mieux les musées français et européens. Des solutions stratégiques de long terme existent pourvu que l’on se donne le temps et les moyens d’une réflexion globale. 2020 est enfin marquée par un événement saillant d’une portée symbolique considérable : la reconnaissance de la République populaire de Chine par le Vatican. Nouvelle terre de mission, la conquête de la Chine pour Rome est à ce prix. Un enjeu idéologique qui en annoncerait en réalité bien d’autres...

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