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La Sncf coûte 215 euros à chaque Français, qu’il prenne ou pas le train. Les clients ont quand même leur mot à dire, non ?
©Reuters

Jean-Marc Sylvestre

La SNCF coute 215 euros à chaque Français, qu’il prenne le train ou pas. A ce prix-là, les Français ont évidemment leur mot à dire. Le blocage de la SNCF et de la RATP, par une poignée de cheminots grévistes (13% de salariés pas plus) pose évidemment la question sur les conditions de fonctionnement du service public, sur les abus de pouvoir de syndicats et sur les moyens d’en sortir.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Les voyageurs étrangers qui arrivent à Paris n’en reviennent pas. Comment imaginer dans un pays aussi développé, aussi riche de culture et d’histoire, que le système politique et
juridique autorise le blocage du fonctionnement de ses grandes métropoles - dont Paris, et empêche la totalité des habitants du pays de vivre et de voyager librement ? Leur réaction est immédiate, ils reprennent l’avion et rentrent chez eux. Quant à ceux qui peuvent encore annuler, ils n’hésitent pas à le faire. Mais le plus grave, c’est la paralysie nationale. Impossible de passer sur les conséquences économiques d’un tel désordre. Impossible de passer sur la perte de pouvoir d’achat, d’activité, de dépenses de Noël et d’emplois pour les étudiants et d’autres.
Les adversaires du Black Friday doivent jubiler, puisqu’ils ne supportent pas qu‘on puisse consommer. Quant à ceux qui se sont précipités dans les magasins contre l’avis des écolos, franchement, ils ne doivent pas regretter d’avoir désobéis aux Ayatollahs de la conso. En attendant, le pays est bloqué et ça pose évidemment la question de la légalité de toutes ces actions.
Les faits et les chiffres sont redoutables : la SNCF est une grande entreprise de la taille de celles du CAC 40, elle réalise plus de 33 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Avec pour métier principal, celui d’assurer le transport ferroviaire des voyageurs et des marchandises. Une particularité : elle appartient en totalité à l‘État et se retrouve en situation de monopole (du moins pour l’instant). Cette particularité fait qu’actuellement 13% des 150 000 cheminots qui sont en grève, principalement adhérents de la CGT ou de Sud-Rail, sont capables de paralyser tout le système et d’empêcher le fonctionnement des trains (11 000 par jour). Les 13 % de grévistes sont principalement les conducteurs de trains (66% des 14 000 conducteurs de trains).
On résume : moins de 9000 salariés conducteurs ont bloqué la circulation et le travail de tous ceux qui doivent utiliser le train : Ils empêchent les 150 000 autres cheminots de travailler, ils interdisent chaque jour de grève, à 5 millions de passagers de se déplacer en France dont 3, 5 millions en région parisienne.
Au total, la SNCF a 88 millions de clients par an. C’est considérable.
Alors, il n’est évidemment pas question de remettre en cause le droit de grève. C’est un droit fondamental. Mais il faut reconnaître que l’exercice du droit de grève à la SNCF ne peut pas s’exercer comme dans une entreprise normale, dès lors que les clients n‘ont pas de solutions alternatives.
Dans une entreprise normale, les salariés qui font grève le font en toute connaissance des risques qu‘ils prennent et qu‘ils font prendre. Les clients peuvent partir chez le concurrent, les investisseurs peuvent investir ailleurs.
La chance de la SNCF, c’est que les clients ne peuvent pas s’adresser à un autre prestataire ou alors ce sera très compliqué. Chance de l’entreprise mais malheur de l’usager. La chance de la SNCF, c’est aussi que ses actionnaires ne sont pas libres d’arbitrer pour un autre investissement.
Le contribuable finance l’exploitation pour 15 milliards par an soit 215 euros par contribuable
. Le budget de la France et les budgets régionaux sont obligatoirement mis à contribution.
Alors, pour le client usager, c’est un avantage parce que le prix du billet est subventionné à plus de 60% du cout global. C’est un avantage, bien sûr, sauf que le client paie la subvention quand il devient contribuable. Dans la pratique, ce n’est pas forcément le même. La SNCF, entreprise de transport public, est aussi une énorme machine à redistribuer les revenus. Les plus riches (qui ne prennent pas forcement le train) paient pour les moins riches afin qu'ils puissent voyager. Pourquoi pas ?
Mais là où le système est complètement pervers, c’est que les passagers et les contribuables n‘ont pas d’autre choix que d’avoir à subir la loi imposée par la SNCF. Ils n’ont pas le choix et si un groupe de salariés décrète la grève via les conducteurs, le passager est pris en otage pendant que le contribuable est racketté et l’écosystème détérioré...
Dans une entreprise privée, il existe des contrepouvoirs qui obligent à un moment donné les partenaires à fabriquer un compromis pour éviter que l‘entreprise tombe en lambeaux. Dans une entreprise publique, ce type de contrepouvoir fonctionne aux rapports de force puisque l’entreprise n’assume pas les conséquences du blocage, c’est la collectivité, les contribuables qui paient. Ni la CGT, ni Sud, ni la direction ne peuvent assumer leur part de la facture. Les données sur la RATP sont du même ordre de grandeur avec les mêmes ressorts quant au fonctionnement, avec les mêmes effets et les mêmes dégâts sur les clients-usagers. Dans les deux cas, c’est l’usager qui est piégé. Dans les deux cas, c’est l’actionnaire- contribuable qui paie avec un seul droit, celui de se taire.

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