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Mondial 2018 : et au fait, qui gagnerait la coupe du monde des chefs d’Etat les plus efficaces pour leur pays ?
©MANDEL NGAN / AFP

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La finale de la coupe du monde 2018 se jouera dimanche 15 juillet et opposera la France à la Croatie. Si l'on s'amusait à transposer ce championnat à la politique, quel chef d'état l'emporterait ?

Edouard Husson

Edouard Husson

Universitaire, Edouard Husson a dirigé ESCP Europe Business School de 2012 à 2014 puis a été vice-président de l’Université Paris Sciences & Lettres (PSL). Il est actuellement professeur à l’Institut Franco-Allemand d’Etudes Européennes (à l’Université de Cergy-Pontoise). Spécialiste de l’histoire de l’Allemagne et de l’Europe, il travaille en particulier sur la modernisation politique des sociétés depuis la Révolution française. Il est l’auteur d’ouvrages et de nombreux articles sur l’histoire de l’Allemagne depuis la Révolution française, l’histoire des mondialisations, l’histoire de la monnaie, l’histoire du nazisme et des autres violences de masse au XXème siècle  ou l’histoire des relations internationales et des conflits contemporains. Il écrit en ce moment une biographie de Benjamin Disraëli. 

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Atlantico : De Donald Trump à Vladimir Poutine, en passant par Xi Jinping, Angela Merkel Theresa May, et  Emmanuel Macron, quelle serait la personnalité qui remporterait la coupe du monde des chefs d'Etat ?

Edouard Husson : Angela Merkel est usée; elle n’a pas su renouveler sa tactique et n’a plus de vision d’ensemble du jeu. Elle est aussi fatiguée que l’équipe d’Allemagne. Theresa May avait montré des qualités prometteuses lors des matches de poule mais elle vient d’être éliminée de la compétition par son homologue allemande, en alignant son jeu sur celui de son adversaire, au lieu de s’appuyer sur les forces de son propre jeu; elle fait biern moins bien que l’équipe d’Angleterre. Il en reste donc quatre en lice. Emmanuel Macron s’est beaucoup donné pendant les vingt premières minutes, au risque d’exposer sa défense, il a besoin de faire comme l’équipe de France contre la Belgique, cadenasser le jeu pendant un moment, à l’italienne, même si ce n’est pas le jeu qu’il aime. Je ne pense pas qu’il puisse espérer autre chose que la petite finale. Qui sera son adversaire pour la troisième place ? Donald Trump, le dribbleur spécialiste du contrepied, qui a du mal à jouer collectif? Vladimir Poutine, le stratège, dont la montée en puissance au cours des matchs, est redoutable? Ou Xi Jiping, qui fait régner une discipline de fer dans son équipe? Les paris sont engagés 

Au regard des différences de régime, de démocratique à autoritaire, ou des différences de structures de souveraineté qui peuvent notamment avoir un impact fort pour les pays membres de l'Union européenne, quels sont les critères qui peuvent empêcher de réaliser une telle comparaison ? 

Nicolas Sarkozy, dans une conférence,  il y a quelques mois, s’était laissé aller à regretter qu’il n’y ait pas égalité des chances entre des hommes politiques qui doivent se soumettre au suffrage universel et d’autres, qui profitent d’un régime autoritaire. Avec tout le respect que l’on doit à l’ancien président français, le problème ne vient pas de l’élection. Depuis Valéry Giscard d’Estaing, aucun président français n’a réussi à garder la majorité qui l’avait porté au pouvoir. VGE et Nicolas Sarkozy ont perdu la réélection. François Mitterrand et Jacques Chirac ont profité de ce que le septennat existait encore pour ruser avec les élections, gagnant une nouvelle présidentielle après avoir perdu des élections législatives. François Hollande, ne disposant plus de cette arme dans un régime de quinquennat, a préféré ne pas se représenter plutôt que d’être humilié électoralement. La malédiction ne vient pas du suffrage universel - qui a réussi à Angela Merkel, Barack Obama ou Vladimir Poutine -  mais de la politique monétaire européenne, à laquelle ont consenti nos présidents successifs, se privant de la souplesse que donnerait une monnaie gérée à l’anglo-saxonne, au service de la croissance. Exactement comme Nicolas Sarkozy, malgré son immense énergie, Emmanuel Macron risque l’essoufflement parce que, n’en déplaise à nos experts, une politique monétaire de changes flottants aiderait plus la France que la politique de changes fixes en place. Ce n’est pas une question de démocratie contre dictature. 

A l'inverse, quels sont ces critères qui peuvent rendre possible une telle comparaison, permettant une distinction entre structure du pouvoir et personnalité politique ? 

Machiavel a perverti la philosophie politique en séparant la politique de l’éthique. Les Grecs ou le Moyen-Age pensaient au contraire que l’important était de distinguer entre le bon et le mauvais gouvernement. Prenons le cas de la Chine. Va-t-on décréter a priori qu’il faut rejeter le régime chinois parce qu’il est autoritaire? N’est-il pas naturel de distinguer entre le mauvais gouvernement de Mao et le bon gouvernement de Deng Xiao Ping? Le régime chinois n’avait-il pas atteint un point d’équilibre lorsque les présidents chinois étaient de fait limités à deux mandats de cinq ans? Il peut être légitime de s’interroger sur le basculement vers un mauvais gouvernement avec un Xi Jiping qui n’entend pas se limiter à dix ans? De même, la démocratie ne garantit pas le bon gouvernement, c’est-à-dire le gouvernement au service du bien commun. Il y a une énorme différence entre Gerhard Schröder, qui remet son mandat en jeu, pour vérifier s’il a une majorité en faveur de sa politique de réforme en 2005; et Angela Merkel qui a pris ses décisions les plus importantes sans consulter personne (sortie du nucléaire, accueil des réfugiés).  Et puis la démocratie en soi n’existe pas: il y a différentes formes de démocraties, selon les histoires et les cuitures politiques. La plupart des Russes ne comprennent pas qu’on présente Vladimir Poutine, en Occident comme un dictateur. Si l’on oublie Machiavel, qui n’a que le succès du prince, par la ruse ou par la force, en tête et que l’on relit Artistote ou Saint Thomas d’Aquin, aucun régime politique n’est seulement monarchie ou seulement aristocratie ou seulement démocratie. La plupart des régimes mélangent le gouvernement d’un seul, l’existence d’une classe dirigeante et le recours au suffrage universel. 

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