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Les 7 énigmes de 2017
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2017, l’odyssée de la fin du monde d’avant

Atlantico a demandé à ses contributeurs leur vision de l’année où la France a vécu de nombreuses surprises et rebondissements et est entrée dans l’ère Macron. Pour Jean-Paul Betbeze, 2107 a connu plusieurs événements majeurs dont les effets sont imprévisibles, tant il s’agit de ruptures profondes dans les paysages politique, financier et monétaire mondiaux.

UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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2107 a connu plusieurs événements majeurs dont les effets sont imprévisibles, tant il s’agit de ruptures profondes dans les paysages politique, financier et monétaire mondiaux. De vraies énigmes. En voici 7, importantes, complexes et obscures à souhait.

Trump : le nouveau Président américain est l’événement qui a le plus changé la scène mondiale en 2017, et ce n’est pas fini. Le renversement vient du fait que ces Etats-Unis, qui « redeviendraient grands », procèdent désormais par l’intérieur, en voulant réduire leurs différents déficits. C’est le déficit commercial d’abord qu’ils veulent résorber, en revoyant les accords commerciaux jugés trop défavorables (avec le Mexique et le Canada notamment) ou en demandant des rééquilibrages (avec la Chine d’abord, mais aussi avec le Japon et l’Allemagne, plus les autres). C’est ensuite au « déficit financier » qu’ils veulent s’attaquer. Les Etats-Unis n’entendent plus contribuer autant aux dépenses de l’Otan, de l’Onu, de la sécurité des mers et des airs. Ils veulent être sûrs que des dépenses inconsidérées n’ont pas lieu, dépenses qu’ils règlent. Surtout ils veulent en avoir aussi, selon eux, une juste contrepartie. Ils demandent ainsi que l’Allemagne ou le Japon « payent » plus pour leur propre protection. Il est bien possible aussi que leurs contributions à l’Onu se réduisent, suite à leur isolement après leur reconnaissance de Jérusalem comme capitale d’Israël.  Enfin et surtout, les Etats-Unis sont la première économie du monde parce que technologiquement la plus avancée. Mais s’ils se coupent de la lutte contre le réchauffement climatique, de la réception des meilleurs cerveaux dans leurs centres de recherche, voire développent des comportements antiscientifiques (créationnisme par exemple), leur éminence peut se réduire, sachant qu’en même temps leur déficit budgétaire va se creuser. L’hégémonie américaine est donc en question, la stratégie de son instigateur actuel ne semblant ni homogène, ni claire. L’énigme américaine se nomme : Trump.

Chine : elle ne peut plus se cacher, au vu de sa taille et de ses succès, surtout elle ne le veut plus. Face à l’inquiétude qui naît de la politique américaine, elle avance ses pions et accélère sa stratégie de long terme, sous la logique des « Routes de la soie » (ou de la Broad Road Initiative). Il s’agit de relier par fer et par mer l’Asie à l’Europe, la Chine en profitant aussi pour sécuriser des ressources agricoles et minières en Afrique et en Amérique latine. Son Président, Xi Jin Ping, vient d’être réélu pour cinq ans et ne risque pas grand-chose, s’étant entouré de fidèles. Son programme sur les routes de la soie s’étend même jusqu’en 2049 ! L’énigme Chine est donc plutôt sa capacité à réussir son programme mondial et surtout à le financer, sachant que les questions montent sur l’importance de la dette chinoise, notamment celle des entreprises publiques, et donc sur leur qualité. Car s’il y a énigme, c’est qu’il n’y a pas transparence !

Bitcoin : on aura tout entendu au sujet de son apparition récente, dans le ciel monétaire et financier. Objet Volatile Non Identifié, étoile filante, météore qui va se désagréger sans grand danger, ou qui peut mettre en péril, par effet de ricochet, un système financier mondial encore en convalescence… Tout est ouvert, on devrait bientôt voir.  Mi monnaie, mi produit financier, le Bitcoin est obtenu par croisement de la puissance de calcul des ordinateurs, par la faible rentabilité des placements monétaires et obligataires, et par le croissant désir d'éviter les réseaux officiels, au bénéfice des réseaux privés. On le « produit » à partir de calculs très compliqués et sa quantité devrait être de 21 millions, quand le filon aura été épuisé. Dans la nuée de documents sur le sujet, on nous parle de l'année 2141, parions que ce sera plus tôt ! A l'heure actuelle, 16,7 millions de Bitcoins sont supposés en circulation : la masse en jeu atteindrait 277 milliards de dollars le 20 décembre (à 16 616 $ l’unité) ou… 219 le 22, à 13 100 l’unité ! La suite devrait donc être sa normalisation, par sa cotation : le 11 décembre au Cboe (Chicago board options exchange), le 18 au CME (Chicago Mercantile Exchange), en attendant le Nasdaq en 2018 et, peut-être, Deutsche Börse. Surtout d'autres crypto-monnaies vont se développer : par dissidence (fork, à partir du Bitcoin) et par naissance (Ethereum...). D'autres pays vont en créer (entre Arabie Saoudite et Emirats arabes unis, dit-on) et d'autres bourses les coter. Comme toujours, les grands argentiers disent qu’ils seront très attentifs, mais que le germe est petit. D’autres, qui travaillent sur ces marchés, annoncent que ce produit va se banaliser et se vendre ainsi plus facilement, après ses excès de jeunesse. Donc que son prix ne pourra que monter, puisque sa quantité est fixe, et d’autant plus qu’il a purgé sa bulle ! D’autres que c’est et restera une folie ! C’est une nouveauté qui répond à de nouveaux besoins, disent les uns. Non, c’est un nouveau supbrime, et pire encore sans substance aucune, disent les autres. Nous verrons bien. En tout cas, le Bitcoin et ses frères vont se développer, les marchés le coter et les autorités les surveiller. L’énigme grossit, pas forcément son prix !

Inflation : que lui arrive-t-il donc ? Eveil, réveil, hibernation ou mutation ? Etats-Unis : éveil. Les prix à la production augmentent de +3,1% sur un an et les prix à la consommation, hors produits volatiles, de +2,2%. Royaume-Uni : réveil. La hausse à 0,3% de l’indice des prix a surpris en novembre, faisant passer l’inflation à 3,1% sur un an, soit au-dessus de 3%. Ceci oblige le Gouverneur à expliquer, par lettre, la situation au Chancelier de l’Echiquier. Rien de grave encore en zone euro, mais fin de l’hibernation. 2% d’inflation s’approche même plus vite que prévu : 1,4% en 2018, 1,5% en 2019 et 1,7% en 2020. Mais 1,7% est « au-dessous et proche de 2% à moyen terme » ! Réveil ? Le Royaume-Uni est en plein emploi, avec une inflation qui se réveille, en plein Brexit. Les Etats-Unis sont en plein emploi, avec une inflation qui s’éveille à peine. La zone euro est en reprise avec un peu plus d’inflation, mais beaucoup de chômage. L’inflation ne vient donc plus des salaires, mais du pétrole ? Elle n’est plus dans les prix des biens et services, mais dans les valeurs boursières et les prix des immeubles ? Mutation ?

Brexit : pourquoi donc le Royaume-Uni a-t-il voté le Brexit ? Par erreur de politique interne ou par subtil calcul ? Pour se renforcer comme plateforme souple et « servir » l’Union européenne à partir de ses capacités propres, plus les produits chinois ? Big mistake ou Blessing in disguise ? C’est l’énigme qui sera dévoilée en 2022, après la période intérimaire.

Zone euro : elle va plus vite, avec des différences économiques et financières qui se creusent, et surtout des tensions politiques qui montent. Tensions électorales « classiques », (droite-gauche), tensions séparatistes nouvelles, plus tensions récentes à l’Est : Pologne, Hongrie. Et bientôt viendront les tensions monétaires, avec la préparation de la succession de Mario Draghi, octobre 2019, avec en mai 2018 le départ de Vitor Constancio, le numéro 2 de la BCE. Comment donc cet attelage de la zone tient-il ? Peut-être par les inquiétudes que font naître Trump, la Chine et le Brexit ! Une énigme qui s’explique par les autres !

Macron : dernière énigme en date, le jeune Président arrive et avance, dans le champ de ruines du paysage politique français. Il n’est pas parfait, ses idées peuvent être critiquées, mais au moins il en a ! Et les énigmes, partout ailleurs, pour ne pas dire les inquiétudes et les décombres, le font écouter dans un monde où la démocratie américaine devient méconnaissable et où les régimes autoritaires s’étendent. L’énigme Macron, c’est sa singularité, avec un risque d’isolement et de fragilité, dans un monde de plus en plus inquiétant. Souhaitons donc qu’elle ne soit pas dévoilée !

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