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1er débat de la présidentielle : ces 7 sujets trop vite zappés mais dont on aimerait vraiment entendre parler
©Reuters

L'autre actualité

Si les différentes affaires relatives à la présidentielle ont accaparé la plupart des médias ces derniers jours, d'autres informations, loin d'être anecdotiques, mériteraient pourtant toute notre attention, et notamment celle des candidats à l'élection.

Mathieu  Mucherie

Mathieu Mucherie

Mathieu Mucherie est économiste de marché à Paris, et s'exprime ici à titre personnel.

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Jean-Yves Archer

Jean-Yves Archer

Jean-Yves ARCHER est économiste, membre de la SEP (Société d’Économie Politique), profession libérale depuis 34 ans et ancien de l’ENA

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Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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Alain Rodier

Alain Rodier

Alain Rodier, ancien officier supérieur au sein des services de renseignement français, est directeur adjoint du Centre français de recherche sur le renseignement (CF2R). Il est particulièrement chargé de suivre le terrorisme d’origine islamique et la criminalité organisée.

Son dernier livre : Face à face Téhéran - Riyad. Vers la guerre ?, Histoire et collections, 2018.

 

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Xavier Raufer

Xavier Raufer

Xavier Raufer est un criminologue français, directeur des études au Département de recherches sur les menaces criminelles contemporaines à l'Université Paris II, et auteur de nombreux ouvrages sur le sujet. Dernier en date:  La criminalité organisée dans le chaos mondial : mafias, triades, cartels, clans. Il est directeur d'études, pôle sécurité-défense-criminologie du Conservatoire National des Arts et Métiers. 

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Les très bons chiffres des Anglais

Mathieu Mucherie : Ce qui est important, en ce début 2017, c’est ce qui devait arriver, et qui n’arrive pas. Tous nos officiels l’avaient prophétisé : le départ du Royaume-Uni de l’UE ou "Brexit" devait amener immédiatement un joli carnage financier doublé peu de temps après d’une belle catastrophe économique. Du reste, les élites londoniennes n’étaient pas en reste, puisque l’administration du Trésor de Sa Gracieuse Majesté tablait, juste avant le vote de juin 2016 (hum hum) sur un recul du PIB de 9 points (est-ce que les gens se rendent compte de ce que cela signifierait ?!) suite à ce choc terrifiant. Neuf mois plus tard, voici quelques résultats : j’ai bien conscience qu’ils sont partiels et que l’article 50 n’a même pas été activé, mais il faut bien commencer à en parler : voici les ventes de détail, l’offre de monnaie au sens large, la production industrielle, les exportations, et l’indice boursier de la place de Londres : j’aurais pu aussi vous parler du PIB, et des créations d’emplois, tout va dans le bon sens jusqu’ici :     

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Croyez-vous que les financiers, qui ne sont pas beaucoup plus idiots que vous et moi, seraient si optimistes si nous étions à la veille d’une détérioration structurelle et significative de l’économie ? Il est vrai que le FTSE est un indice assez peu domestique, et qu’en ce moment tout monte, mais tout de même. Regardez aussi les taux longs : ils seront bientôt plus bas qu’en France si ça continue : ce n’est pas très compatible avec la théorie d’un regain de l’inflation ou d’une baisse de la qualité de la signature souveraine du pays. Si une crise arrive, les acteurs économiques outre-Manche, qui en ont pourtant été dument informés, ne semblent pas trop s’en faire, ils consomment, ils embauchent, ils investissent, ils prêtent.

En fait, la seule chose qui a baissé, c’est le Sterling. La Banque d’Angleterre, comme prévu ici dans ces colonnes, fait le job. Elle achète des actifs, elle assure, elle rassure. Résultat : à nouveau un "choc réel" réduit à néant ou presque, comme le 11 septembre, comme Fukushima, alors que les chocs nominaux font des ravages un peu partout et surtout en zone euro. Même la dévaluation du Sterling peut être relativisée : ci-dessous, par rapport au dollar, qui monte contre toutes les monnaies depuis mi-2011, on voit que la chute de la livre ne fait que rejoindre celle de l’euro (suite au QE décidé fin 2014) et du Yen (suite au QE décidé fin 2012) ; notez au passage que ces deux dévaluations correspondent à une montée tout à fait bénigne de l’inflation, et c’est exactement ce qui va se passer au Royaume-Uni.  

L’affaire du Brexit va trainer en longueur, et on peut compter sur le pragmatisme britannique pour appliquer l’Europe à plusieurs vitesses de façon concrète, là où ce n’est ailleurs qu’un concept pour les dissertations. Si la Banque d’Angleterre reste vigilante, et à condition bien sûr que le séparatisme écossais ne soit pas trop stimulé ou que des mesures protectionnistes ne soient pas prises d’un côté ou de l’autre, tout cela va faire pschiiiit, du moins économiquement et financièrement.

On ne veut pas voir cela en France, on préfère imaginer une Angleterre à feu et à sang, avec des traders de la City en route pour la Défense. Même le candidat Fillon et ses lieutenants n’ont pas osé faire référence plus de 48 heures à Thatcher quand ils ont présenté leur programme. On n’a pas très envie de reconnaitre que l’Europe qui marche est une zone de libre-échange plus qu’un grand marché, et que si ceux qui partent de l’UE vont perdre par certains aspects, ils vont au moins gagner l’assurance claire et définitive de ne JAMAIS rentrer dans l’Union monétaire (alors que cette épée de Damoclès restait jusqu’ici sur leurs têtes au moins en théorie). Voir la tête de la Reine être remplacée sur les billets par un pont ou un aqueduc anonyme, avec pour seule présence humaine la signature du chef de la BCE, ça non, pour tout l’or du monde. Au pire, les Anglais perdront quelques ressources, mais ils défendront mieux leurs libertés ; et les premiers résultats encourageants depuis 9 mois suggèrent que les unes et les autres ne s’opposent pas, qu’elles vont souvent la mano en la mano ! Nous serions bien inspirés d’écouter ce message en France, pays où le dernier redressement productif a eu lieu en 1959, grâce à De Gaulle certes, mais grâce aussi à Jacques Rueff et à la dévaluation du Franc.         

Le poids du crédit inter-entreprises et son impact sur la trésorerie des PME

Jean-Yves Archer : Dans une campagne électorale aussi décousue qu'hystérisée, les questions de fond ont clairement du mal à émerger et à faire partie du légitime débat public.

D'évidence, les questions relatives à l'univers des entreprises se centrent autour de la notion de coût du travail (le débat sur les charges sociales, sur les 35 heures, etc ) et gomment une large part de la réalité quotidienne des PME. Ainsi, on réduit la compétitivité à son seul aspect prix et on passe trop souvent sous silence la nécessaire montée en qualité de notre production nationale.

Même si on a pu enregistrer un recul des défaillances d'entreprises fixé à 58 500 l'an dernier, il faut nuancer ce chiffre du fait de l'essor important des procédures de conciliation pré-dépôt de bilan.

A l'intérieur de ce gâchis collectif qu'est toujours une liquidation judiciaire, il est important de noter qu'un peu plus d'un quart des redressements judiciaires ont pour origine des retards de paiement.

Autrement dit, près de 16 000 entreprises sont atteintes de plein fouet par la longueur excessive des délais de paiements qui, trop souvent, continuent de ne pas se situer dans les règles légales notamment définies par la loi LME de 2008 et par le décret du 2 octobre 2012.

Cette situation objective est préoccupante. Ainsi, le crédit interentreprises représente plus de 650 milliards d'euros, soit plus de sept fois le montant des crédits bancaires court terme et – à titre d'échelle de grandeur  près de 39% de notre dette publique.

C'est un vrai sujet qui contrarie directement la rentabilité des PME, souvent tributaires de leurs donneurs d'ordre. Elles sont contraintes de se retourner vers le mécanisme, souvent coûteux, de l'affacturage, voire même d'emprunter – avec caution du dirigeant – pour passer un creux de trésorerie. Ou encore d'augmenter les comptes-courants d'associés.

Peu de candidats à l'élection présidentielle n'ont eu à connaître les fins de mois acrobatiques d'une TPE ou d'une PME engluée dans ses rapports avec une entreprise publique, un hôpital ou un grand groupe. Dès lors, inutile de s'attendre à ce que leurs propositions en la matière soient susceptibles de changer la donne.

Certains candidats ont bien annoncé qu'ils renforceraient les sanctions pour retards de paiement. C'est un vieux 33 tours que l'on subit depuis le gouvernement d'Edith Cresson en 1991 !

En réalité, si plus de candidats avaient une expérience du secteur privé marchand, leurs professions de foi seraient, en matière de crédit interentreprises, plus crédibles et surtout plus consistantes.

La Banque de France, le Médiateur du crédit, les commissaires aux comptes, certains banquiers commerciaux s'alarment du déséquilibre bilanciel que notre pays connait trop souvent via des entreprises en attente de règlements.

Dans ce contexte, beaucoup ont été surpris et perplexes quant à l'article 167 de la loi Macron qui vise à stimuler le crédit interentreprises, ce qui ne parait pas de nature à aller dans le bon sens.

Depuis, cet ex-ministre devenu candidat a bien entendu modifié sa position et indiqué qu'il fallait lutter contre les délais de paiements abusifs.

Une chose est sûre : nous sommes loin d'avoir mis en place les 18 propositions du rapport Charpin intitulé Le crédit inter-entreprises et la couverture du poste clients, qui date du 6 février 2013… 

Ces quatre ans de retard législatif auront impacté plus de 63 000 entreprises (placées en redressement judiciaire) sous l'œil médusé de nos partenaires européens qui, eux, disposent de bonnes pratiques en matière de crédit interentreprises.

Le relèvement des taux prévu en fin d’année

Eric Verhaeghe : Peu à peu, l’inflation remonte vers sa ligne de flottaison fixée à 2% par les traités. Bon, personne ne sait trop si cette remontée est effective, mais elle est décrite par les statistiques officielles. Voilà qui tombe bien! L’écrasement des taux pratiqués par la BCE met les épargnants allemands (et les autres accessoirement) en rogne et dans un état de stress maximal. La pression des institutions financières pour une remontée des taux est forte.

Les marchés sont aujourd’hui à peu près convaincus que la Banque centrale européenne entamera ces manoeuvres à la fin de l’année 2017. Ce laps laisse le temps aux investisseurs et aux Etats de préparer leur réaction.

Pour la France, qui vit fondamentalement à crédit, et sur qui la baisse des taux a produit le même effet qu’une dose de cocaïne sur un clubber, la dissipation de cette drogue dure risque d’avoir un vrai impact dépressif. La remontée des taux signifie aussi un renchérissement du crédit… La vie sans réforme de structure risque de devenir beaucoup plus compliquée, et la charge de la dette entamera un cycle haussier.

Pour le prochain président, les facilités des années Hollande devraient être bel et bien finies. Il va falloir vraiment agir.

Vers une dangereuse guerre des changes?

Eric Verhaeghe : Parallèlement, l’ordre mondial entame une phase tout à fait désagréable. La réunion des ministres des Finances du G20 jeudi dernier l’a montré. Les représentants des Etats participants se sont écharpés sur le recours à la dévaluation compétitive. Ils ont finalement accepté ce texte:

"Nous répétons qu’une volatilité excessive et des mouvements désordonnés des taux de change peuvent avoir des implications préjudiciables pour la stabilité économique et financière".

"Nous serons en contact étroit sur le marché des changes. Nous confirmons nos engagements précédents sur les taux de change et notamment que nous nous abstiendrons de toute dévaluation compétitive et que nous n’emploierons pas les taux de change à des fins concurrentielles."

Il ne faut pas se louper dans le décodage de ce charabia en apparence vide. Le G20 est désormais placé sous la pression trumpienne du protectionnisme et de la dévaluation du dollar. Trump a très bien compris qu’un dollar élevé pénalise ses exportations. Le G20 semble avoir obtenu un report d’une stratégie de dévaluation du dollar.

En revanche, le G20 a fait chou blanc sur le protectionnisme. Elle est désormais loin l’époque où les nations célébraient le libre-échange comme espérance pour toute l’humanité. L’ordre mondial glisse sans hâte, mais avec détermination, vers du chacun chez soi confinant parfois à un affrontement larvé.

L’Allemagne s’assume comme puissance européenne dominante

Eric Verhaghe : La même semaine, une rencontre injustement qualifiée de surréaliste en France a permis à Donald Trump de mettre quelques petites choses au clair avec Angela Merkel. En particulier, il a expliqué que l’Allemagne ne payait pas assez pour sa défense, ni pour la protection militaire apportée par les Etats-Unis. La chancelière a approuvé ce point de vue.

Là encore, il faut décoder les idées implicites dans ces prises de position. Jusqu’ici, il était admis que l’Allemagne devait être une puissance démilitarisée. Rappelons que ce que Trump appelle la protection accordée à l’Allemagne est aussi une occupation en bonne et due forme. Cette doctrine passe. L’Allemagne est désormais appelée à s’émanciper.

Pour la France, l’évolution en profondeur de la situation mérite réflexion. Le déclin français est désormais une donnée handicapante dans un couple qui ne vit plus la triangulation avec la Grande-Bretagne au sein de l’Union européenne.

En Syrie décomposée, Israël craint surtout le renforcement de l’Iran

Alain Rodier : Vendredi 17 mars, 02 h 40 du matin, quatre chasseurs bombardiers israéliens entrent en Syrie via l’espace aérien libanais pour attaquer plusieurs objectifs dans la région de Palmyre, particulièrement au niveau de la base aérienne T-4 située à l’ouest de la cité antique. Pour la première fois, la défense anti-aérienne syrienne tente de riposter. Contrairement à son habitude, l’état-major israélien publie ensuite le communiqué suivant : "Cette nuit, des avions de l’armée de l’Air israélienne ont frappé plusieurs cibles en Syrie et ont été visés par des missiles anti-aériens". En effet, Damas a tiré au moins trois missiles anti-aériens Sa-5. L’un qui a été intercepté par le système de défense israélien Arrow-3 s’est écrasé en Jordanie. Les deux autres ont fini leur course en Israël sans faire de victimes. Il ne s’agit pas de l’incident le plus sérieux survenu entre Israël et la Syrie depuis 2011 car déjà le 23 septembre 2014, un avion Su-24 syrien avait été abattu par la défense aérienne de Tsahal au niveau du plateau du Golan. De plus, très régulièrement, l’armée de l’air de l’Etat hébreu attaque des convois d’armes destinés à rejoindre le Liban pour y être stockées au profit du Hezbollah. Mais c’est la première fois que la défense anti-aérienne syrienne tente de riposter énergiquement. Cette posture plus agressive de Damas est un signe adressé à Israël signifiant que le régime n’est plus aussi diminué qu’auparavant et qu’il ne tolèrera plus les incursions de son armée de l’air. Toutefois, il y a peu de chances que cela impressionne beaucoup les responsables israéliens. D'ailleurs, le ministre de la Défense, Avigdor Lieberman, a déclaré dimanche 19 mars que si Damas se risquait à employer de nouveau des missiles anti-aériens, Israël se réservait le droit de détruire ses défenses sol-air... 

Il est vraisemblable que les forces aérospatiales russes présentes en Syrie avaient été informées à l’avance de ce raid. En effet, Israël et la Russie ont conclu un accord en octobre 2015 pour s’informer mutuellement de leurs opérations aériennes respectives afin d’éviter tout incident. En outre, les Russes ont installé depuis leur arrivée en septembre 2015 des systèmes de défense anti-aériens efficaces allant des S-400 (SA-21) en passant par les S-300 (SA-10), SA-5, SA-17, SA-3, SA-8 et SS-22, le tout couplé à des radars performants 91N6E et 92N6E. Les forces russes sont ainsi en mesure de contrôler presque tout l’ensemble de l’espace aérien syrien et une partie des pays voisins. Bien évidement Moscou - défenseur du régime de Bachar el-Assad mais entretenant d’excellentes relations avec Benjamin Netanyahou - ne veut pas interférer dans les actions de l’Etat hébreu. En retour, le Premier ministre israélien se montre aussi très compréhensif. Il a notamment déclaré le 9 mars lors de son cinquième voyage à Moscou en un an "de grands progrès ont été réalisés l’année dernière dans la lutte contre le terrorisme sunnite islamique dirigé par Daesh et par Al-Qaida. La Russie y a contribué". On ne peut pas être plus élogieux !

Un commandement syrien éclaté

Contrairement à ce que l’on peut croire, il n’y a pas, du côté gouvernemental syrien et de ses alliés, une véritable unité de commandement politique et militaire. Dans ce dernier domaine, les Russes ne contrôlent que le "quatrième corps d’assaut" de la province de Lattaquié (créé en octobre 2015, il a été à la base de la victoire d’Alep en décembre 2016) et le "cinquième corps d’assaut" apparu en novembre 2016 à Damas (et responsable de la reconquête de Palmyre). Ailleurs, leur influence sur les décisions du commandement de l’armée régulière syrienne reste limitée.

Pour ce dernier, il n’est pas en mesure de contrôler la totalité des forces qui lui sont théoriquement attachées. La raison en est simple : le régime n’a pas les moyens de payer l’ensemble des soldes. En conséquence, certaines unités sont commandées par des chefs de guerre qui sont jaloux de leur indépendance et qui font à peu près ce qu’ils veulent dans leur zone de compétence. Ce sont eux qui payent leurs hommes - la base de leurs ressources étant souvent d’origine plus ou moins mafieuse -. Les 80 000 à 100 000 miliciens des "Forces de Défense Nationales" (FDN) bâties sur le modèle des Bassidjis iraniens gardent aussi une grande autonomie car ils sont financés par Téhéran. Quant aux pasdarans, aux milices irakiennes, afghanes et au Hezbollah libanais, ils ne répondent directement qu’à leur propre commandement assuré par le major général Qassem Suleimani. Leur nombre total est évalué à quelques 25 000 combattants(1).

L’Iran, ennemi numéro un d’Israël

Et c’est bien ce dernier point qui inquiète au premier chef l’Etat hébreu. Téhéran reste sa menace prioritaire et le réarmement de sa "créature", le Hezbollah libanais, est considéré comme extrêmement dangereux pour l’avenir. Il faut reconnaître que les déclarations bellicistes répétées des plus hautes personnalités iraniennes et du Hezbollah ne sont pas là pour apaiser les choses.

Sur le plan strictement tactique, l’armée syrienne n’est plus en mesure, depuis des années, de représenter une menace directe pour Israël. Par contre, après avoir largement participé à la reconquête d’Alep, l’Iran affiche désormais clairement sa volonté d’établir sa mainmise sur le sud-ouest de la Syrie, particulièrement dans la région de Quneitra à hauteur du plateau du Golan. Pour cela, Téhéran met en avant la milice chiite Harakat al-Nujaba fondée en 2013 qui a annoncé au début mars la création de la "Brigade de libération du Golan". Cette milice revendique 10 000 militants répartis entre la Syrie et l’Irak. Un de ses slogans est : "Israël sera détruit". Déjà les pasdarans et le Hezbollah libanais avaient lancé des opérations dans la région de Deraa et de Quneitra au début 2015(2) mais n’avaient pas obtenus de résultats significatifs contre Daech et les rebelles de l’Armée syrienne libre.

Enfin, en ce qui concerne le Hezbollah libanais (qui est toujours très présent dans la région du Quneitra), l’expérience acquise par ses combattants ayant servi sur le front syrien et surtout, le nombre important d’armements sophistiqués récupérés lors de ce conflit, constituent des atouts qu’il pourra employer dans l’avenir contre Israël - quand il sera sorti du bourbier syrien -.

Si la rébellion syrienne est éparpillée en une multitude de groupes dont les plus importants dépendent de Daech et - officieusement - d’Al-Qaida "canal historique", les forces loyalistes et leurs alliés ne sont pas mieux loties. Moscou a toutefois un argument de poids : la fourniture d’armements, de munitions et d’appuis aériens. Entre les deux, il y a les Kurdes, problème déjà largement évoqué dans des articles précédents.

(1) 7.000 Iraniens (majoritairement des pasdarans mais aussi quelques militaires de l’armée régulière "Artech"), 6 000 à 8 000 Hezbollahis, 4 000 à 5 000 miliciens chiites irakiens et 2 000 à 4 000 Afghans. Après un séjour en Syrie, ces Afghans peuvent obtenir un droit de séjour permanent en Iran pour eux et leur famille.

(2). Le brigadier général Mohammad Ali Allahdadi de la forces Al-Qods des pasdarans, Jihad Mughniyeh, le fils de Imad Mughniyeh, le responsable des opérations extérieures du Hezbollah tué à Damas en 2008, Mohamad Issa, un haut responsable du Hezbollah et quatre autres hezbollahis ont été tués le 18 janvier 2015 par une frappe israélienne lors de ce qui a été appelé l’ "incident de Mazraat Amal". Le 19 mars 2017, un drone armé aurait tué dans la même région Yasser Assayed, un responsable du Hezbollah.

Zapping de campagne (présidentielle) - grande absente : la sécurité réelle 

Xavier Raufer : Deux sujets cruciaux pour la paix publique sont absents de ce qui devrait être le grand débat de l'élection présidentielle : la qualité et la pertinence de nos services de renseignement, notamment intérieur ; et le danger grave et immédiat posé par certaines catégories de migrants clandestins, engagés dans des formes de criminalité aujourd'hui problématiques et demain peut-être, explosives.

Envisageons tour à tour ces deux sujets qui devraient être au cœur des préoccupations des candidats - et qui sont trop souvent éludés.

• Services spéciaux - Entraînante, ironique, "Comme de bien entendu" fut l'une des ritournelles de guinguettes les plus populaires de la France de l'avant-guerre. Chantée par Arletty et Michel Simon, elle était en 1939 sur toutes les lèvres et depuis, a été reprise cent fois. Or "Comme de bien entendu" devait à présent devenir l'hymne officiel de la DGSI : voici pourquoi.

-  Comme de bien entendu, Ziyed Ben Belgacem est issu de l'immigration maghrébine. Hors de rares Sahéliens et autres, c'est le cas de tous les terroristes ayant fait couler le sang en France, depuis Mohamed Merah, voici cinq ans ;

- Comme de bien entendu, c'est un bandit maintes fois condamné pour divers crimes (44 mentions au fichier des antécédents judiciaires) ;

- Comme de bien entendu, il se lance en desperado et "au nom d'Allah" dans une sanglante équipée qui s'achève par sa mort dans l'aéroport d'Orly ce samedi 18 mars au matin ;

- Comme de bien entenduet comme toujours, cet individu est un parfait hybride, gangster ET terroriste à la fois ;

- Et comme de bien entendu, la DGSI a loupé le coche. Cette affirmation ne relève pas d'un avis personnel, mais s'établit objectivement par l'information suivante. En janvier 2017, la DGSI a produit une note secrète de 30 pages sur le terrorisme frappant la France depuis cinq ans (2012 et Mohamed Merah). Or dans cette longue analyse, disent des officiels de haut rang abasourdis, rien, pas une ligne ni un mot sur les hybrides crime-terreur, pourtant, la figure majeure sous laquelle l'hostilité frappe la planète entière à l'ère de l'Information. Commentaire d'un de ces éminents officiels : la direction de la DGSI est comme ces émigrés revenus en France sous Charles X, après la Révolution, alors taxés de n'avoir "rien oublié et rien appris".

Un samedi du début mars, le directeur général de la DGSI a réuni ses cadres, pour une sorte de cérémonie d'adieu. Selon les présents, l'homme était plutôt amer et déçu de sa propre maison - regrettant même les bons vieux Renseignements généraux. Mais comme de bien entendu, il n'était question pour lui que de bricolages administratifs, de meccano bureaucratique. Que le renseignement intérieur nécessite une vision, des concepts et perspectives, cela, une ultime fois, lui a encore échappé.

• Migrants dangereux - on connaît ces clans de nomades criminalisés hyperactifs, issus des Balkans, pillant la France, d'abord rurale. Mais voici deux nouvelles catégories, portant une criminalité aujourd'hui problématique et demain peut-être, explosive :

- Jeunes Marocains toxicomanes au nord de Paris - Depuis la fin de 2016, ils hantent le quartier de Barbès, hostiles, rejetant toute aide. "Des dizaines" au minimum, selon les habitants du quartier "Défoncés à la colle, violents, ils se battent à coups de cutter, agressent les passants fragiles pour leur voler sacs ou portables ; ils cambriolent, etc.". Or que font les autorités ? L'autruche - en attendant sans doute un drame ;

- Après le nord de Paris, l'est de la France. Voici le récit d'un officiel tenu au secret : "Les migrants fuyant l'Allemagne affluent en Lorraine. Il arrive à Metz une centaine de familles par semaine. On en attend 300 000 en tout, Albanais, Kurdes, etc. Leurs camps sont tenus par des mafias, même l'accès aux toilettes est payant. Pire encore : des meutes de jeunes Afghans de 15-20 ans, violents et fanatiques - ils refusent les sandwichs fournis par les ONG, à cause de la mayonnaise ! Les policiers locaux parlent de catastrophe annoncée".

Or face à cela, hormis la Défense, les cabinets ministériels sont aux abonnés absents - dans leurs têtes, ils sont partis ou préparent leur reconversion. Classant tout "confidentiel" ou "secret", ils se bornent à balayer la poussière sous le tapis.

Bien sûr, ces faits gravissimes devraient inquiéter au premier chef les candidats. Les journalistes devraient là-dessus les interroger sans relâche - exiger des réponses claires. Mais rien. Le silence - avant la tempête ?

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