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La France doit rebâtir sa stratégie économique.
La France doit rebâtir sa stratégie économique.
©Reuters

Riposte

Les taux pour le financement de la dette française ne cessent d'augmenter, révélant une faiblesse structurelle de l'endettement français détenu aux 2/3 par des investisseurs extérieurs contre 1/3 seulement pour des acteurs hexagonaux. Une proportion inverse à celle de l'Italie... Jusqu'où pourraient aller les marchés dans leur défiance vis à vis de l'économie française ?

UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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La France sous le feu des marchés. Le titre est militaire, la réalité l'est aussi. Car c'est bien d'une bataille qu'il s'agit, pour la croissance et pour l'emploi. Une bataille qui passe aujourd'hui, plus que jamais, par la crédibilité, précisément parce que nous sommes sous le feu des marchés.

L'Allemagne emprunte aujourd'hui sur 10 ans à 1,82 % et la France à 3,69 %. Le double. L'écart entre les deux pays, qui n'existait pas il y a encore quelques mois, n'a cessé de se creuser. La raison ? Pas seulement l'effet de propagation depuis la Grèce, suite à une sorte de mécanique. Pas plus un complot américain ou anglo-saxon qui souhaiterait l'explosion de la zone euro. Pas seulement la faiblesse de la croissance qui pèse partout, et qui finit par nous atteindre.

Les dettes publiques soulèvent un problème de confiance

La crise est largement politique, marquée par les difficultés des démocraties européennes à expliquer, réagir, corriger cette crise de la dette. Aujourd'hui ce sont les AAA qui sont en jeu, notamment pour la France et l'Autriche. Parce qu'ils ont moins de croissance, des problèmes de dette interne et externe (Grèce et Italie pour la France, pays de l'Est pour l'Autriche) certes. Mais surtout parce qu'ils peinent à réagir et à convaincre.

Il ne s'agit pas, ici, de parler de despotisme des marchés contre la démocratie des peuples, mais bien de se dire que ces dettes qui inquiètent, ce sont des dettes publiques, autrement dit des dettes de certains peuples par rapport à eux-mêmes et par rapport à d'autres. L'Italie a ainsi deux tiers de sa dette publique qui est domestique et un tiers externe, la France un tiers interne et deux tiers externe. La question de la confiance se pose donc partout.

Les budgets de rigueur sont nécessaires, mais insuffisants

Cette question de confiance passe par un premier volet qui fait débat, mais qui est très partiel. Il s'agit des économies à faire, ou de la rigueur, ou encore de l'austérité.

Chacun se défend, conteste, demande aux autres de faire des efforts. Il le faudra bien, sachant que ces efforts ne seront acceptés que s'ils sont transparents et légitimes. Encore faut-il qu'ils suffisent, autrement dit qu'ils mettent l'économie, et la société, en état de rembourser. C'est toute la question de la croissance qui se pose ainsi. La diète publique est évidemment nécessaire, elle doit être bien calibrée, avec plus de réduction de dépenses que d'impôts... No comment.

Mais il faut surtout que la croissance tienne, que les entrepreneurs veillent investir, que les innovations se financent, et que les restructurations nécessaires se produisent.
Toute politique de désendettement est en forme de "J". En premier lieu un effet négatif, puis les forces de croissance reprennent le dessus. Mais si les marchés financiers poussent à montrer qu'il faut changer, ils n'aident pas à franchir le cap du rebond.

Aide toi, et les marchés t'aideront !

C'est là que la politique intervient, que la crédibilité des décideurs et de leurs plans fait la différence ! C'est là que les marchés nous attendent, non seulement dans la diète publique, mais dans notre capacité à mettre en œuvre une gymnastique privée efficace. Et comme rien n'est évidemment immédiat, c'est dans notre capacité à dessiner ce futur de reprise dans le temps, en France et en Europe, que se fera la différence. Et c'est seulement alors que les marchés aideront.

Diète et Gym en France, et ailleurs, ensemble et dans le temps, sans aller trop vite dans l'ajustement au risque de créer une récession, sans aller trop lentement, au risque qu'inquiéter et d'impatienter les marchés.

Il faut parler aux peuples, aux marchés, aux voisins, pour avancer ensemble. Des ajustements ont eu lieu, toutes les lignes ont déjà bougé, mais les conditions de sortie commune ne sont pas claires, le nécessaire partage des efforts dans le temps n'est pas connu, la mobilisation des entreprises et des salariés n'est pas évidente. Autant dire qu'elle n'est pas acquise.

La France sous le feu des marchés, c'est en fait la France qui doit rebâtir sa stratégie.

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