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Les marchés, 
nouveaux boucs émissaires
des hommes politiques français
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Crise

Le gouvernement français est "en guerre contre les marchés". C'est ce qu'a affirmé ce week-end le ministre de l’Agriculture Bruno Le Maire. Le porte-parole du Parti socialiste Benoît Hamon est lui aussi allé dans ce sens. Une façon pour les politiques de s'exonérer de leurs propres responsabilités dans la crise ?

Erwan Le Noan

Erwan Le Noan

Erwan Le Noan est consultant en stratégie et président d’une association qui prépare les lycéens de ZEP aux concours des grandes écoles et à l’entrée dans l’enseignement supérieur.

Avocat de formation, spécialisé en droit de la concurrence, il a été rapporteur de groupes de travail économiques et collabore à plusieurs think tanks. Il enseigne le droit et la macro-économie à Sciences Po (IEP Paris).

Il écrit sur www.toujourspluslibre.com

Twitter : @erwanlenoan

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Sur Europe 1, ce week-end, le ministre de l’Agriculture Bruno Le Maire a affirmé que le gouvernement français était "en guerre contre les marchés". Rapidement, il a été rejoint par Benoît Hamon, qui a revendiqué pour la gauche le droit d’être encore plus en guerre contre ces mêmes marchés (dénonçant au passage un gouvernement qui agirait en réalité comme "la cinquième colonne au service des marchés").

Cette surenchère est inquiétante. Surtout, elle est mensongère. Si la Grèce s’effondre aujourd’hui, si le gouvernement italien est tombé, ce n’est pas parce que les marchés sont des dictateurs tous-puissants. C’est parce que dans ces pays, comme en Espagne et comme en France notamment, les gouvernements de gauche comme de droite estiment depuis des années qu’endetter leurs Etats à la limite de la faillite est une solution politique plus avantageuse que celles qui consistent à réformer.

Si ces pays traînent une dette énorme, tel un poids qui contraint chacune de leurs actions et leur souveraineté aujourd’hui, c’est parce que leurs dirigeants ont jugé que la rigueur budgétaire n’était pas une bonne option, à la manière de Romano Prodi qui déclarait en 2002 que le Pacte de stabilité et de croissance était "stupide". A l’époque, la Banque Centrale Européenne appelait au respect du Pacte, notamment à travers la voix de son vice-président… Lucas Papademos, le nouveau Premier ministre grec.

La France choisit la facilité

Quant à la France, le Rapport Pébereau exposait clairement dès 2005 que, depuis des décennies, avait fait "le choix de la facilité". Il précisait que "l’augmentation de la dettene résulte pas d’un effort spécifique pour la croissance mais, pour l’essentiel, d’une gestion peu rigoureuse". En outre, ajoutait-t-il, "au-delà des dysfonctionnements de notre appareil administratif, ce sont nos pratiques politiques et collectives qui expliquent le choix de la facilité fait par la France en matière de finances publiques".

Au demeurant, les Etats étaient prévenus. Dès 2009, et parmi d’autres, Kenneth Rogoff annonçait : "il y a toujours un risque que la crise financière soit juste en phase d’hibernation, phase pendant laquelle elle se métamorphose lentement en crise de la dette publique", ajoutant que "l’explosion des niveaux de déficits publics non viables est une question clé".

Les marchés n’agissent donc que comme des révélateurs de la crise de la dette. S’ils sur-réagissent, c’est qu’il y a matière à réagir. Pour l’éviter, il faut réduire la dette publique. Se tromper d’origine de la crise actuelle, c’est s’empêcher de la résoudre.

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