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Reconnaissance légale de la sensibilité des animaux : pourquoi c’est un changement majeur
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Protection animale

Rien n'est sûr mais c'est espéré : les animaux viennent d'être reconnus comme "êtres vivants doués de sensibilité" par la Commission des lois de l'Assemblée nationale et pourraient être inscrits comme tels dans le Code civil si l'hémicycle venait à voter en leur faveur. Une telle décision pourrait entraîner de nombreux changements pour le secteur de l'agroalimentaire ou de l'élevage mais aussi pour des pratiques plus ludiques comme la chasse ou les courses hippiques.

Eric Alligné

Eric Alligné

Eric Alligné est un avocat spécialisé dans la propriété intellectuelle ainsi qu'en Droit de la protection animale.

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Atlantico : La Commission des lois de l'Assemblée nationale vient de reconnaître le statut "d'être vivants doués de sensibilité" des animaux alors que jusqu'à maintenant le Code civil les considère comme "des biens meubles". Si ce changement de statut venait à être voté par l'hémicycle, qu'est-ce que cela induirait d'un point de vue juridique pour les animaux ? En quoi est-ce une évolution importante ?

Eric Alligné : Même si le Code rural intègre déjà depuis septembre 2000 ce statut dans son article L214-1, cette prochaine uniformisation législative est une étape symbolique importante pour notre société et le droit de l’animal, même si les animaux restent soumis, dans ce nouveau texte, au régime juridique des biens corporels. Le Code civil, pierre angulaire de notre système légal, pourrait enfin officialiser la « valeur affective » de l’animal reconnu déjà par 89% des Français et reléguer définitivement l’objectivisation de l’animal en droit français.

Les structures de protection des animaux auront-elles plus de poids juridiquement ?

Les Fondations et Associations avaient déjà avec entre autres, les articles 521-1 et R 655- 1 du Code pénal, des outils pour assurer dans la société leur mission de contrôle face à la cruauté exercée sur les animaux. Mais il paraît évident que la fin du statut légal d’objet pour l’animal devrait leur permettre comme aux particuliers, de porter l’action judiciaire sur le terrain d’un être vivant sensible rattaché à un gardien légal. L’objectivation d’un être vivant, comme chacun sait, est toujours synonyme d’exactions sur ce même être.

Les secteurs économiques qui reposent sur l'exploitation animale (élevage, agroalimentaire...) pourraient-ils être modifiés ? Comment ?

La fin de l’animal objet du Code Civil, si le texte ne prévoyait aucune dérogation, ce qui semble peu probable, pourrait se heurter de plein fouet aux techniques d’abattage spécifiques –telles l’étourdissement légal ou la mise à mort rituelle- et à celles d’élevage intensif pratiquées par certains acteurs économiques, et les faire évoluer en harmonie avec notre sensibilité actuelle. Ce nouveau statut juridique est ici encore un nouvel outil en faveur du bien être des animaux.

Concernant les particuliers propriétaires d'animaux domestiques, ce changement de statut aura-t-il des conséquences sur leur vie quotidienne ?

Pratiquement, ce statut va apporter une dimension affective accrue concernant les demandes de réparation des préjudices moraux lors des contentieux. Dans la vie de tous les jours, cela ne devrait pas modifier les rapports animal-propriétaire, bien qu’ici encore ce nouveau statut pourrait permettre de maintenant réfléchir à un statut spécifique pour  l’animal « de compagnie ».

Les pratiques ludiques consistant à l'abattement d'un animal (chasse, tauromachie, combats de coq...) pourraient-elles être modifiées, voire disparaître ?

Ici nous touchons un domaine où nous savons que l’immense majorité des Français est pour son abolition pure et simple. Comme disait Gandhi : « On reconnaît la grandeur d'une nation par la façon dont elle traite ses animaux ». Ce nouveau statut légal d’un être sensible par opposition à un animal objet va désormais mettre le Code civil en opposition avec ces pratiques où amusement rime avec cruauté.

Sur quels amendements majeurs le changement de statut pourrait-il déboucher ?

Cette dernière question vient compléter la précédente, il semble certain que les lobbies exploitant à titre expérimental ou à titre ludique la souffrance d’un « être vivant doué de sensibilité » vont s’opposer et s’opposent déjà à ce changement législatif nécessaire. L’Assemblée nationale, malgré son désir de satisfaire la demande des français, pourrait par des amendements exclure du domaine de ce texte toutes activités posant problème. La France pourtant, pourrait sortir grandie si elle se montrait pionnière dans ce domaine !

Propos recueillis par Clémence de Ligny

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