Atlantico Business
La 5ème vague et l’arrivée du nouveau variant vont freiner le mécanisme de reprise mais ne peuvent pas la casser
Les effets de la 5ème vague en Europe et le risque du nouveau variant risquent de freiner la reprise très forte de l’économie, mais la majorité des chefs d’entreprise considèrent que si l’Etat ne commet pas d’erreur, cette reprise ne sera pas cassée.
Jean-Marc Sylvestre
Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.
Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.
Il est aussi l'auteur du blog http://www.jeanmarc-sylvestre.com/.
Les trois semaines qui viennent vont être importantes pour juger de l’activité économique pour l’année prochaine. Tout va dépendre de l’ampleur de cette 5ème vague d’épidémie qui touche désormais les pays occidentaux, tout va dépendre de la force de ce nouveau variant sud-africain qui essaie de pénétrer en Europe et tout va dépendre de la façon dont les gouvernements européens vont réagir.
L’équation est difficile à résoudre parce que l’ingrédient principal qui commande l’activité économique est la confiance.
On a bien vu, lors des épisodes précédents de cette pandémie, que les systèmes économiques ont fortement ralenti, mais que les actifs de production n’ont pas été détruits. Les systèmes se sont mis à tourner au ralenti parce que les gouvernements ont peu ou prou fermé la circulation du virus en freinant la circulation des populations des biens et des services. Mais les systèmes ont ralenti parce que les acteurs eux-mêmes se sont mis sur pause parce qu’ils n’avaient plus confiance.
On a constaté que, dès le recul annoncé du virus, les systèmes ont redémarré très fort.
La clef, c’est évidemment la dynamique épidémique.
Depuis une semaine, le climat s’est évidemment détérioré parce que la menace d’une nouvelle vague et d’un nouveau variant a, une fois de plus, hypothéqué la confiance. Conséquences directes: de nouvelles fermetures de frontières, l’annulation d’un certain nombre de projets, et notamment de voyages et séjours à l’étranger. Beaucoup d’entreprises, voyagistes, hôteliers, grands magasins, ont d’ores et déjà fait une croix sur la période de Noël qui est une de plus active de l’année.
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Ils n’ont pas attendu le 15 décembre pour évaluer les dégâts de la fin de l’année. Partout, en montagne comme sur les plages du sud, on reçoit des annulations et par contrecoup, les prestataires et les distributeurs suspendent les livraisons quand ils n’annulent pas complètement les commandes de Noël.
La menace actuelle va donc freiner une activité qui avait retrouvé un rythme d’enfer.
Maintenant, la majorité des chefs d’entreprise ont acquis la conviction que cette 5ème vague et ce variant ne vont pas provoquer une nouvelle fracture dans la croissance.
D’abord, parce que la généralisation de la vaccination amortit le choc auprès des personnes à risque et devrait permettre au système de santé de résister, contrairement à ce qui s’était passé au printemps 2020. D‘où l’importance de poursuivre la vaccination, et les chefs d’entreprises, dans leur ensemble, se félicitent que la vaccination soit quasiment rendue obligatoire ainsi que le respect des mesures de protection. La grande majorité des entreprises imposent le contrôle strict des pratiques sanitaires et du passeport vaccinal sous la pression de salariés eux-mêmes.
Ensuite, pas de fracture de croissance parce que les entreprises se sont adaptées très vite et complètement aux nouvelles façons de travailler. La pandémie a digitalisé en moins de deux ans la plupart des secteurs : les services, et surtout la distribution, mais aussi la production industrielle. Personne ne reviendra en arrière.
Enfin, les fondamentaux de la croissance sont réunis. La demande de nouvelles technologies (digitales notamment) et de nouvelles énergies entrainent des investissements colossaux qui ont d’ores et déjà été lancés. Dans l’industrie financière, dans l’automobile, dans la santé et plus directement encore dans l’éducation et la formation.
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Nous sommes rentrés tête baissée, et parfois sans le savoir, dans une économie de l’offre, c’est à dire essentiellement fondée sur des produits et des services qui n’existaient pas avant. Une économie de la vie alors que nous étions encore avant le virus dans une économie de la demande de consommation.
Cette économie de la vie va générer des marchés considérables qui sont parfaitement solvables, compte tenu de l’épargne accumulée et de la facilité d’emprunt pas cher.
La situation de l’emploi témoigne par son dynamisme et son évolution de cette dynamique durable. Deux chiffres sont tombés la semaine dernière des machines à calculer de l’Insee et n’ont pas été commentés par la classe politique.
Le premier porte sur les créations d’emplois : encore 113 000 créations d’emplois en octobre. Le nombre d’inscrits en catégorie A pôle emploi est retombé à 3,3 millions, c’est à dire à un niveau inférieur à celui qui était enregistré en février 2020. On a donc plus que rattrapé les pertes de la pandémie.
Le deuxième chiffre est que les emplois créés sont évidemment différents de ceux qui ont été détruits. Ils sont aussi beaucoup plus durables. Les emplois courts ( CDD ) et même très courts sont en chute libre. Le nombre de CDI augmente très vite.
A tel point que l'Insee a confirmé qu’à la fin octobre, 85 % des salariés travaillaient désormais sous statut de CDI. Ca signifie que l’emploi temps plein CDI est devenu une composante structurelle du système et que les CDD ne sont plus la variable d’ajustement conjoncturelle mais le préalable à l’emploi durable. Dans la majorité des cas, le premier CDD signé représente la période d’essai au CDI.
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Cette évidence n’empêche pas beaucoup de responsables politiques de continuer à fonder tout leur discours et leur positionnement sur les difficultés d’emploi. Jean-Luc Melenchon continue de réclamer une loi d’urgence pour interdire les CDD, alléguant que pour lui, 85% des contrats d’embauches signés sont des CDD. Oui sauf qu’après un mois, la plupart se transforme en CDI puisque le nombre des CDI dépasse les 85% de population salariale.
La plupart des leaders politiques, à gauche notamment et à l’extrême droite, n’ont pas compris l’ampleur du changement et la dynamique des perspectives.
Cette incompréhension explique la faiblesse du Parti socialiste, qui est encore sur l’ancien logiciel. Ça peut expliquer le recul d’Éric Zemmour, dans la mesure où il a très peu abordé la situation économique et sociale et quand il l’a fait, il est parti d’un diagnostic qui ne correspond plus à la réalité socio-économique du pays.
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