L’absentéisme des salariés français a augmenté de 20%, avec toujours des vraies raisons que les chefs d’entreprise ne veulent pas voir<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Des personnes travaillent dans un bureau de coworking dans le quartier d'affaires de La Défense, à l'ouest de Paris, le 7 octobre 2020.
Des personnes travaillent dans un bureau de coworking dans le quartier d'affaires de La Défense, à l'ouest de Paris, le 7 octobre 2020.
©CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP

Atlantico Business

La crise du Covid a provoqué une augmentation de l’absentéisme dans les entreprises mais il s’avère que ce phénomène avait démarré bien avant, en 2016. Ce qui tendrait à prouver que cette situation va durer.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

Voir la bio »

Selon l’étude annuelle réalisée par Gras Savoye Willis Towers Watson chaque année sur l’absentéisme auprès de plus de 350 000 salariés issus de 671 sociétés, l’absentéisme est en constante et forte hausse (de l’ordre de + 20 % en 2020), ce qui s’explique notamment par le contexte sanitaire et les effets du premier confinement, mais pas seulement. Il s’avère que l’absentéisme croit depuis 2016 de façon régulière.

Très concrètement et pour résumer la situation, il ressort :

  • Un taux d’absentéisme qui augmente de +24% entre 2016 et 2020 (avec effet lissé du confinement) 
  • Un taux d’absentéisme de l’ordre de 5% en 2020, en hausse de 20% par rapport à 2019 
  • 34% des salariés ont posé au moins 1 arrêt dans l’année en 2020 
  • 54 jours : durée moyenne annuelle d’absence d’un salarié en 2020 
  • Les non-cadres 2 fois plus impactés que les cadres par la crise sanitaire 
  • L’absentéisme s’est dégradé pour tous les salariés, quel que soit leur âge et notamment de +24% chez les 30 - 39 ans 
  • Le Grand Est, la région où le phénomène est le plus marqué
  • Santé, transport et logistique : les secteurs les plus touchés

En progression depuis 2016, le taux d’absentéisme des salariés français a enregistré  une nette augmentation en 2020, et surtout pendant le premier confinement :  mais sur l’année, 34 % des salariés ont  déposé au moins un arrêt de travail pendant l’année. La durée d’absence est restée quasiment stable depuis l’année dernière, s’élevant à environ 54 jours. Le dispositif d’indemnisation des arrêts dérogatoires pour motif d’enfants non scolarisés, de personnes vulnérables ou encore de proches de personnes vulnérables, mis en place durant la crise sanitaire a été un facteur prépondérant de l’augmentation des arrêts maladie (+ 25 % en 2020). 

Les arrêts de plus d’une semaine et de moins de 3 mois représentent 61 % du nombre total d’arrêts en 2020 contre 52 % en 2019, conséquence, en partie, des arrêts dérogatoires lors du premier confinement. La bascule de ces arrêts dérogatoires en activité partielle au 1er mai a ramené l’absentéisme à un niveau « normal », en hausse par rapport à celui de 2019.

Le rapport révèle par ailleurs que l’absentéisme touche inégalement les genres, les tranches d’âge et les secteurs d’activité : 

Le contraste entre les hommes et les femmes se confirme depuis l’étude de 2019. Le taux d’absentéisme s’élève à 4,5 % chez les hommes contre 6 % chez les femmes. Entre 2019 et 2020, l’absentéisme a augmenté de 23 % chez les hommes (+17 % chez les femmes). Quel que soit le genre, le taux d’absentéisme est en hausse de 40% depuis 2016.

Bien que toutes les tranches d’âge soient concernées par l’augmentation de l’absentéisme, elles le sont à différents niveaux. Les salariés de plus de plus de 50 ans sont les plus impactés avec un taux d’absentéisme s’élevant à 7,07 % en 2020 (alors qu’il était de 6,03%). Viennent ensuite les salariés âgés entre 40 et 49 ans (5,10 %) puis ceux âgés entre 30 et 39 ans (4,11 %). Pour ces derniers, l’absentéisme s’est dégradé de manière très significative +24 %. Les salariés de moins de 30 ans, dont le taux d’absentéisme est plus faible, ont été également affectés, avec un taux moyen d’absentéisme de 2,48 %, en hausse significative de +19 % en 2020.

Le taux d’absentéisme a augmenté partout en France en raison de la crise sanitaire et les mesures de confinement mises en place. Le Grand Est (6,6 % en croissance de 25 %) et les Hauts-de-France (6,3 % en croissance de 22 %) sont les régions qui connaissent le taux d’absentéisme le plus élevé. En Ile-de-France où le taux de cadres est plus élevé, ce taux d’absentéisme n’est que de 4 % mais en forte augmentation (+21%) par rapport à 2019.

• Les non-cadres ont été deux fois plus impactés que les cadres par la crise sanitaire. Du fait de la pénibilité de certaines professions et de l’impossibilité de télétravailler à domicile, l’on constate une augmentation de l’absentéisme de + 24 % chez les non-cadres entre 2019 et 2020. Ce taux est de 12 % chez les cadres pour la même période.

• Les secteurs qui connaissent les plus forts taux d’absentéisme sont la santé (9,59 % en 2020, soit une augmentation de +26%), ainsi que le transport et la logistique (7,97 %, soit une augmentation de +32%), une tendance déjà présente en 2019. 

Le secteur des Hôtels, Cafés, Restaurants est le seul secteur en baisse, ce qui s’explique par la fermeture obligatoire des établissements. Les secteurs des Services et de la Communication & des technologies de l’information ont été les moins impactés par l’augmentation de l’absentéisme de l’ordre de +12%).

• Enfin, l’étude révèle que les PME et les ETI sont les plus concernées par ce phénomène, mais avec une année 2020 qui a également impacté les grandes entreprises. En effet, ces dernières connaissent une évolution de la dégradation de leur taux d’absentéisme près de 2 fois supérieure à celles des PME et des ETI par rapport à la période 2016-2019 (3 %/an pour les grandes entreprises contre 6 %/an pour les ETI &PME). 

Pour Noémie Marciano - Directrice Offre de Conseil Health & Benoits , « Depuis près d’un an et demi, la crise sanitaire a bouleversé l’organisation du travail, avec la mise en place de dispositifs spéciaux, la généralisation du télétravail et l’instauration du chômage partiel. L’absentéisme en entreprise engendre des coûts directs et indirects, comme le maintien de salaire et le financement d’un régime de prévoyance, le recrutement d’un remplaçant mais aussi la baisse de la productivité et la désorganisation… Lutter contre l’absentéisme est vraiment un enjeu financier et social important pour les entreprises. Par exemple, pour une entreprise de 1 000 salariés avec un salaire moyen de 30 K€ par an et un taux d’absentéisme de 5%, on estime le coût complet pour l’employeur entre 1,5 et 3 M€ par an. C’est énorme ! explique .« Et il est fort probable que l’absentéisme augmente encore dans les années à venir. Il sera intéressant d’analyser les impacts de la crise sanitaire sur l’absentéisme à moyen/long terme. »

Au-delà de cette situation statistique, beaucoup de chefs d’entreprise s’interrogent sur les moyens à mettre en œuvre pour réduire le taux d’absentéisme. Parce que s’il existe des raisons vraies à l'absentéisme, comme la garde des enfants en période de confinement, la difficulté des transports et même parfois les grèves, il paraît évident que d’autres facteurs  expliquent l’absentéisme mais que les entreprises ne veulent pas forcement les reconnaître

D’abord, le climat au travail peut ne pas être propice à la fidélité au travail. L’entreprise doit se pencher sur sa désirabilité. Est-il agréable de travailler dans cette entreprise ou pas? L’absentéisme a ses raisons que l’entreprise se plaît à ignorer.

Ensuite, l’absentéisme révèle un problème de formation qui provoque une inadéquation entre le job et celui qui l’exerce. Ce qui doit aboutir à une révision de la situation.

Dans les deux cas, c’est évidemment au DRH de faire ces diagnostic, même s’il existe à long terme une augmentation quasi structurelle de l’absentéisme  au travail.

PS : La Méthodologie utilisée passe par des données fiables venant de la Sécurité sociale, des arrêts maladie et arrêts de travail de plus de 3 jours, sur un panel de 352 912 salariés présents dans le portefeuille GS WTW depuis 2016.  

Jean-Marc Sylvestre à partir d’une étude réalisée par Gras Savoye Willis Towers Watson.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !