Emmanuel Macron parle à ses ministres comme un chef d'entreprise parle à ses managers... Mais la France n'est pas une entreprise<!-- --> | Atlantico.fr
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Emmanuel Macron et Bruno Le Maire, lors du Conseil des ministres du 21 juillet, à l'issue du nouveau remaniement.
Emmanuel Macron et Bruno Le Maire, lors du Conseil des ministres du 21 juillet, à l'issue du nouveau remaniement.
©CHRISTOPHE ENA / POOL / AFP

Atlantico Business

"Il n'y a pas de puissance possible si nous ne sommes pas indépendants". Oui… mais le monde des affaires ne voit rien dans la formation du nouveau gouvernement qui pourrait permettre de générer des preuves de prospérité capables de rassurer une population fracturée.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Si la France a besoin de relancer une stratégie de réforme, on voit mal comment le nouveau gouvernement s'en est donné les moyens. Si le mal français vient de ses fractures multiples, les chefs d'entreprise qui attendent des réformes capables d'engendrer une véritable phase de prospérité durable ne voient pas dans la gouvernance française les moyens de relancer un logiciel d'efficacité. Le président parle comme un chef d'entreprise, mais il n'est pas chef d'entreprise.

La nouvelle composition du gouvernement d'Elisabeth Borne permet de revenir au Macronisme d'origine, celui qui avait permis au président actuel de l'emporter en proposant un rajeunissement des équipes, une meilleure expertise des nommés. Ils regroupent des esprits pragmatiques et politiques, des hommes et des femmes plutôt jeunes mais fidèles à Emmanuel Macron depuis le début de son aventure. Gabriel Attal est le meilleur exemple de ce casting. L'arrivée d'Aurore Bergé également. Beaucoup d'ailleurs voient dans ce type de personnel des successeurs possibles au président actuel. Cependant, il n'y a rien dans ce gouvernement pour que la trajectoire française s'améliore.

D'abord, premier point, la composition même de cette équipe ne permet pas d'imaginer une coalition politique qui serait majoritaire. Le gouvernement est macron-macronisme... c'est-à-dire qu'il ne coagule personne d'autre que des "Renaissances" et encore. Or, le problème numéro un d'Emmanuel Macron est que sa première ministre n'a pas de majorité absolue. Alors que c'était le cas lors du premier quinquennat. Sans majorité absolue, elle ne peut pas gouverner, ou alors à la marge, avec du 49.3 et tous les effets collatéraux du 49.3, avec les risques de colère et de manifestations.

Ensuite, et c'est le deuxième point, cette France a besoin de réformes en profondeur. Son administration coûte extrêmement cher et ne travaille pas. L'éducation nationale est en panne, le système de santé est en panne. Ce pays ne marche pas.

Alors, il reste debout parce que la majorité des entreprises fonctionnent, et on se contente d'un fonctionnement qui est bien en deçà de ce qu'on devrait exiger compte tenu des impôts et taxes qui sont payés. Alors, la réforme profonde du fonctionnement de l'État ne serait pas forcément douloureuse, parce que le résultat attendu ferait qu'au final, la réforme travaillerait pour le bien public. Mais à court terme, la réforme dont a besoin le pays dérange trop d'habitudes, trop de rentes de situation, bouscule des emplois, des positions et dès qu'on bouscule un acquis social ou économique, des chiens de garde se mettent à aboyer et à mordre. En l’absence de majorite , le gouvernement est à chaque fois condamne à se coucher ou à signer des chèques. 

On peut faire beaucoup de reproches à Emmanuel Macron, mais on sait qu'il a des convictions (la mondialisation, l'Europe, la prospérité économique et sociale, le besoin d'innovation, etc.). Cependant, on sait aussi qu'il ne s'est pas donné les moyens de les réaliser...

Le problème aujourd'hui, après avoir renforcé sa garde rapprochée, ce gouvernement risque de se couper en deux. D'un côté, ceux qui veillent à l'ordre, c'est-à-dire à l'équilibre des comptes publics et à la sécurité civile et militaire. Cette partie du gouvernement appartient à l'intendance et est défendue par des ministres très puissants parce qu'ils ont réussi. Bruno Le Maire, qui sera bientôt le ministre de l'économie avec la plus longue durée dans la fonction, possède l'expertise et la crédibilité nationale et internationale. Gérald Darmanin à l'intérieur a réussi à faire passer l'idée que l'ordre public pouvait être géré et garanti. La conjoncture plaide pour un retour à l’équilibre budgétaire et au respect de l’autorité publique

Mais de l'autre côté, on ne voit pas de ministres capables de remettre l'éducation nationale sur ses pieds ou le système de santé. Emmanuel Macron leur parle désormais comme à des cadres d'entreprise, mais ils ne sont pas à la tête d'entreprises. Ils sont gestionnaires d'espace public sous contrainte de la démocratie qu'il faut évidemment respecter.

Si Emmanuel Macron voulait être cohérent, c'est-à-dire parler comme un chef d'entreprise, il faudrait remettre à la sphère privée la responsabilité de pans entiers de l'administration. La sphère privée a une obligation de résultats. La France n'attend de ses gouvernants que des résultats. Rien d’autre.

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