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Les citoyens français étaient fiers de leurs entreprises, car elles rayonnaient sur le monde.
Les citoyens français étaient fiers de leurs entreprises, car elles rayonnaient sur le monde.
©SAMEER AL-DOUMY / AFP

Les entrepreneurs parlent aux Français

La politique ce ne sont pas ces petites mesures d’épicier que l’on nous sert à chaque élection, c’est la mesure de l’ambition que l’on souhaite offrir à la société.

Denis Jacquet

Denis Jacquet

Denis Jacquet est fondateur du Day One Movement. Il a publié Covid: le début de la peur, la fin d'une démocratie aux éditions Eyrolles.  

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Un peu de prétention, d’égocentrisme, d’auto-centrage, c’est pêché, mais cela fait du bien de temps en temps. Je suis de passage en France, et j’ai eu la surprise d’être contacté par divers courants politiques en recherche de thématiques porteuses, notamment en matière économique et sociétale. J’ai été un peu étonné de cette demande auprès d’un homme qui, désespéré de ce continent (l’Europe) et de ce pays (la France), a tout fait pour retrouver son amour de jeunesse, le pays où l'entrepreneur reste l'étoile du nord, les USA.

En même temps, chacun s’accordera à reconnaître que pour mieux voir, il faut prendre du recul, et que la proximité d’un sujet empêche en général de bien l’étudier, le diagnostiquer, le projeter. A force de voir la France de trop près, on en oublie les réels enjeux, les avantages ou défauts comparatifs, on en oublie les 2 vertus cardinales de la réussite, tant on est perdu dans le petit calcul du quotidien, à savoir l’Ambition et la Vision. La politique ce ne sont pas ces petites mesures d’épicier que l’on nous sert à chaque élection, c’est la mesure de l’ambition que l’on souhaite offrir à la société.

Afin de respecter la confidentialité de ces invitations, je ne citerai pas de noms, ce qui est d’autant plus facile que mon discours restera le même pour les uns et les autres. Une vision large couvre et surpasse toujours l’étroitesse du spectre politique. La hauteur de vue l’emporte sur les petits combats de rue partisans. Restons donc au bon niveau et voilà un résumé des lignes directrices des préconisations que je leur ferai ces 15 prochains jours.

Pour commencer, j’aimerais rappeler que des mesures ne peuvent être qu’au service d’une vision. Sinon, cela reste une simple liste de shopping de base, sans cohérence autre que celle de tenter donner de l’appétit à des foules qui souvent ne comprennent que peu ou pas, le sens de chacune d’entre elles. Et dès lors les jugent à défaut de les comprendre, et laissent agir leur perception en lieu et place de leur compréhension, de leur propre vision, de leur choix profond. Comme les politiques pensent que les entreprises n’intéressent personne, ils n’ont jamais eu ni politique PME, ni politique économique réelle, ni à droite, ni à gauche. Le paradoxe étant que les meilleures mesures pour les PME ont été souvent prises par des gouvernements socialistes ! Un comble.

Il faut donc oublier ces mesures, elles ne parlent qu’aux entrepreneurs, 2.5% de la population, une paille à l’échelle d’un vote national. Il faut donc apprendre à parler entreprise en parlant aux citoyens. Que vont-ils y gagner ? Quand ? Comment ? Pas pour leurs enfants, le débat sur la retraite a montré que les Français se foutaient de la retraite de leurs enfants, pour qui travailler quelques mois de plus est un effort trop grand. Ils veulent des mesures pour eux, maintenant. 

Ensuite, il faut déterminer et expliquer dans quelle société les français ont-ils envie de vivre ? Un pays communiste, ce qui est fondamentalement le modèle actuel d’une France où tout est collectivisé, socialisé, dans lequel le droit de propriété est suspect, voire bafoué (le locataire qui ne paie pas, peut le faire en toute impunité, le locataire a plus de droit que le propriétaire etc..), dans lequel l’entrepreneur n’est depuis bien longtemps maître dans ses propres murs, tant la législation du travail est castratrice et explique par le menu ce que l’entrepreneur a le droit de faire ou plutôt de ne pas faire, dans l’entreprise pour laquelle il risque sa vie, son intégrité, sa situation financière, sa famille souvent, sans aucun droit en cas d’échec, alors que ses salariés, qui n’ont pris aucun de ces risques, ont tout.

Il faut donc faire un choix. Entre une société transactionnelle, libre, réglementée mais pour le strict nécessaire, une société qui doit réparer les excès et assurer la protection des plus faibles, et une société socialiste et normée à l’extrême comme le fait l’Europe. L’excès de norme n’est rien d’autre que la traduction du manque de confiance des politiques en leurs citoyens et particulièrement, le mépris et la méfiance, envers les entrepreneurs, les entreprises. Confondant souvent le capitalisme des grandes entreprises et l’ambition pure des petites.

Proposer des mesures suppose donc de proposer une vision, totalement revue, mais plus important encore, explicable avec des mots simples à des citoyens qui doivent y trouver leurs intérêts. Partage de la valeur, fierté et association à la réussite, promesse d’avenir, élévation sociale… Le discours sur la réduction des charges qui crée des emplois est juste le « tue l’amour » du discours politique.

Quels sont les axes à explorer et proposer ? Exactement les axes qui feraient de chacun d’entre nous le meilleur fan d’une équipe nationale de foot ou de rugby. La fierté, le sentiment d’appartenance, l’espoir de tous les possibles, la force du collectif, mais le sentiment de réussite personnelle, même par substitution.

La fierté, celle que nous avons perdue, nécessite d’accéder à la première marche du podium des compétitions qui font l’avenir des nations, leur pouvoir, leur puissance. Nous sommes absents de la totalité d’entre elles. Où sommes-nous situés, au niveau mondial, sur ces luttes qui détermineront les vainqueurs et les vaincus du siècle à venir ? La réponse est simple : Nulle part ! Absent sur les grandes tendances des marchés. La data. L’IA. Le Quantique. L’espace. L’électrique. La santé. L’éducation. L’Afrique. Aucun Méta, Google, Ali Baba, Tencent, Nvidia, Microsoft, Salesforce. Nos seuls fleurons Européens sont SAP et Dassault Systèmes. Magnifiques sociétés, mais leur nombre est insuffisant. Et surtout, dans tous les domaines, nous sommes en voie d’être surpassés par la Chine, ce que nous allons à nouveau découvrir en voyant débarquer les locomotives Chinoises de l’automobile électrique. Qui vont asphyxier le marché. Idem pour le bâtiment, les avions de ligne, l’alimentaire, l’IA…

Les Français étaient fiers de leurs entreprises, car elles rayonnaient sur le monde. La vision du Concorde version Musée Grévin qui trône tristement à Roissy, comme l’emblème d’un rêve brisé, illustre cette France qui préfère enterrer que rebondir. Que le principe de précaution a tué, année après année, toute velléité d’innovation et de prise de risque dans ce pays.

Il faut donc nous doter d’un slogan digne de ceux qui rêvent d’être numéro 1. Comme en Chine. Comme en Inde. Comme aux USA. Israël. Corée. Chacun pense y vivre un rêve de réussite, un rêve collectif à impact individuel, une destinée à laquelle s’identifier, mais surtout un rêve accessible, à la portée de tous, une promesse d’avenir, un ascenseur qui ne fonctionne que dans le sens de la montée. 

Je leur dirai donc qu’il faut proposer un pacte aux Français, un essai, un risque, celui d’un modèle qui marche ailleurs, un modèle qui leur offre un avenir et non l’ancrage dans le passé, le regret de ce qui disparaît et n’est jamais remplacé. Un plongeon dans l’inconnu. Offrir un objectif et un chemin pour y parvenir. Expliquer le gain pour tous, mais surtout pour chacun. Montrons-leur que nos investissements ne seront pas cantonnés à Paris et sa région, qui regroupent à eux seuls les 2/3 de tous nos investissements quand les régions représentent les 3/4 de notre surface et les 2/3 de notre PIB.

Il ne faut pas être en Marche, mais à la course, et vers l’avant. Je n’ai rien d’autre à proposer. Le reste découle de cette ambition, les mesures sont évidentes, de bon sens. Un nouveau contrat de société. Rien de plus.

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