Alors qu’il faudrait travailler plus, une grosse majorité de Français se déclare favorable à une semaine de quatre jours … <!-- --> | Atlantico.fr
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Manifestation des Français lors de la réforme des retraites.
Manifestation des Français lors de la réforme des retraites.
©GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP

Réforme du travail ?

Ça n’est pas demain que les Français vont se mettre à travailler plus. Après le débat sur les 35 heures, la crise sociale liée à la réforme des retraites, la question d’organiser une semaine de 4 jours sera au cœur du débat préparatoire au « Pacte de la vie au travail ».

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

Il est aussi l'auteur du blog http://www.jeanmarc-sylvestre.com/.

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Le débat risque d’être chaud si les partenaires sociaux décident de discuter de la semaine de quatre jours dans le cadre du « pacte de la vie au travail ». L’objectif de ce pacte est évidemment de trouver les meilleures conditions de travail, afin de fidéliser les emplois et d'accroître l’attractivité des emplois. Mais l’objectif est aussi d'accroître le volume de travail parce que c’est de travail dont la croissance a besoin. Croissance pour créer des richesses ( le PIB) , croissance pour créer des emplois, croissance pour éponger nos déficits budgétaires, sociaux et extérieurs. Brève croissance pour dégager des moyens d’assumer les grandes mutations et rembourser nos dettes publiques. La question du travail dans notre modèle économique est donc incontournable. Tout changement passe par plus et mieux de travail.  

 Il n’y aura pas de loi, a précisé Emmanuel Macron, à condition que les partenaires sociaux trouvent un compromis. 

La question d’installer une semaine de quatre jours risque donc d’être très tendue quand on se souvient des effets pervers de la semaine des 35 heures et le l’imbroglio politique et social alimenté par la réforme des retraites. Tout le monde en parle mais il n’y a pas de consensus. 

Les Français ont un avis , les chefs d’entreprise ont des besoins et les économistes ne sont pas d’accord. 

Les Français viennent d’être consultés sur cette question de la semaine des 4 jours par Talent .Com , plateforme spécialiste du marché de l’emploi et du recrutement dans le monde, qui a interrogé 1013 actifs français représentatifs du monde salarié pour connaître leur opinion.  Le résultat est clair : une grosse majorité des Français au travail ( plus de 90% ) sont favorables à la semaine de 4 jours. Pour plein de raisons : 

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-parce qu’ils considèrent qu’ils travaillent trop, trop de stress, trop d’heures supplémentaires 

-Presque la moitié serait prête à accepter une baisse de salaire pour travailler 4 jours par semaine .

-Pour 71%, le principal avantage d’une semaine de 4 jours est un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée.

-7 travailleurs sur 10 pensent qu’une semaine de travail de 4 jours pourrait améliorer leur santé. 

-Et pour répondre à l’actualité, 2 Français sur 3 déclarent que travailler 4 jours par semaine les aiderait mieux à patienter jusqu'à la retraite. 

Pour les Français salariés, la semaine de 4 jours arrive donc dans le top 3 des avantages professionnels, dont les salariés souhaiteraient le plus bénéficier. Parmi les avantages que les entreprises devraient proposer, les primes, comme l'intéressement ou la participation, sont citées par un tiers des travailleurs (33%). Vient ensuite la semaine de travail de 4 jours (22%), des jours de congés supplémentaires (13%) et une très bonne mutuelle (12%). Le fait de pouvoir travailler totalement à distance est cité en dernier.  Chez les 25-34 ans, la quasi-totalité est séduite par l’idée de rejoindre une entreprise qui propose de travailler 4 jours seulement (94%). 

L'intérêt pour cette semaine réduite est égal, quels que soient les secteurs ou les types d'entreprises. Trois quarts des sondés pensent qu'une semaine de travail de 4 jours pourrait même améliorer leur santé (74%). Près de la moitié estime que ça leur donnerait plus de temps pour une activité physique (45%), 4 salariés sur 10 indiquent que cela contribuerait à diminuer leur stress. Plus intéressant encore, dans le contexte socio-économique actuel en France, deux tiers des interrogés déclarent que cela les aiderait davantage à tenir jusqu'à la retraite (66%). Seuls 10% jugent que des journées de travail plus longues les fatigueraient plus physiquement.

Les chefs d’entreprises ne sont pas catégoriquement opposés à la semaine de 4 jours. Ils se sont très vite organisés pendant le covid pour pratiquer le télétravail pendant le confinement et après. Le problème est qu’une semaine de 4 jours entraînerait un changement de modèle et à condition de ne pas mettre tous les salariés aux mêmes conditions.  Ce qu’on avait fait au moment des 35 heures et qui a provoqué des bouleversements préjudiciables. Le modèle français a mis plus de 25 ans à digérer les 35 heures. 

La semaine des 4 jours de travail se pose différemment selon les entreprises et les modalités de productivité. La question est de savoir si on organise les 4 jours dans l’enveloppe des 35 heures ou alors si on change le total des heures travaillées et dans ce cas, quels seront les effets sur la productivité globale?  Donc pour les chefs d’entreprise, une norme unique d’un contrat de travail à temps plein n’est pas envisageable parce que certaines entreprises s’y adapteront très bien mais d’autres seront abîmées gravement en termes de compétitivité. 

Les économistes ne sont pas tous sur la même ligne. Pour beaucoup, la semaine de 4 jours peut permettre une meilleure utilisation des équipements. Donc une amélioration de la productivité des actifs industriels. Mais encore faut-il que les salariés acceptent la flexibilité. Pour beaucoup d’analystes, c’est plus facilement applicable dans l’industrie que dans les services, mais ça risque aussi d'accroître les inégalités entre les cadres et les non cadres, entre ceux qui peuvent bénéficier de la semaine des 4 jours et ceux qui ne pourront pas en profiter. 

On retrouve là, le clivage creusé par le télé-travail. Au début, tout le monde est d’accord, au bout de quelques mois, on s’interroge sur la qualité du lien social. 

Là encore, une loi applicable ne pourra pas résoudre les problèmes. Cela étant, c’est comme le sondage l'indique, la possibilité d’organiser une semaine de 4 jours sans augmentation du temps de travail ( donc 35 heures ) est un facteur positif pour attirer les salariés et pas seulement les cadres. Un facteur positif et flexible d’attirer les seniors ou d’organiser un système pour les garder dans l’entreprise en fin de carrière. 

La majorité des partenaires sociaux sont d’accord pour faire des expériences. Certaines expérimentations ont eu lieu en Grande Bretagne et la conclusion a été plutôt positive. Les modalités étaient claires.  Le salarié touchait le même salaire mais devait assumer la même charge de travail mais sur 4 jours au lieu de 5. 

Des expériences ont été faites dans des services publics de l’administration française. Mais n’ont pas donné de suite. Soit parce que l’administration ne l’a pas mise en place de façon claire. Soit parce que certains ont considéré qu'il le faisait déjà et refusait donc l’organisation officielle en 4 jours qui les obligeait à travailler effectivement 4 jours, ce qui n’était pas forcément le cas auparavant. On revient à l’époque des 35 heures où certains ministres reconnaissaient que c'était impossible à installer, vu que beaucoup de leurs fonctionnaires travaillaient déjà beaucoup moins que 35 heures. 

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