Comment l’ultra-keynésianisme est en train de détruire l’économie française <!-- --> | Atlantico.fr
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La France risque d’être bientôt rattrapée par son engagement de limitation du déficit budgétaire à 3% du PIB.
La France risque d’être bientôt rattrapée par son engagement de limitation du déficit budgétaire à 3% du PIB.
©Flickr

Revue d'analyse financière

Dans l'œil des marchés : Jean-Jacques Netter, vice-président de l'Institut des Libertés, dresse, chaque mardi, un panorama de ce qu'écrivent les analystes financiers et politiques les plus en vue du marché.

Jean-Jacques Netter

Jean-Jacques Netter

Jean Jacques Netter est vice-président de l’Institut des Libertés, un think tank fondé avec Charles Gave en janvier 2012.

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Les nuages s’amoncellent mais les marchés montent. Phénomène bien connu selon lequel les bourses montent quand les indices sont mauvais, et inversement baissent quand l’économie s’améliore. Pourtant, les craintes sur le ralentissement de l’économie chinoise et la perspective d’une inévitable remontée des taux par la Federal Reserve américaine sont toujours là.

La croissance des marchés émergents est revue en baisse, à commencer par celle du Brésil et de la Russie. Dans la zone Asie, les perspectives de croissance sont désormais les plus basses depuis 2009. Les pays développés dépendant en grande partie des matières premières, comme le Canada et l’Australie, sont aussi touchés et même les pays qui devraient à priori bénéficier de la baisse des prix du pétrole, comme la Turquie, sont aussi atteints. L’Europe, en relatif, offre des perspectives de croissance modestes, mais pas suffisantes pour changer les perspectives en matière d’emploi.

D’ailleurs, dans son édition 2016 sur les "Perspectives de l’économie mondiale", le FMI a revu en baisse ses prévisions à 3,1%. La principale crainte viendrait d’un choc financier en provenance des pays émergents qui sont pour la plupart lourdement endettés en dollar US.

Après des décennies de relance par les déficits budgétaires et l’abaissement des taux d’intérêts, beaucoup d’économies sont fragiles. L’investissement ne repart vraiment nulle part, les bulles se succèdent. Les acteurs de l’économie n’ont plus confiance dans les politiques de long terme des Etats.

Ce n’est pas le néo ou l’ultra-libéralisme qui ont rendu l’économie mondiale très fragile, c’est plutôt "l’ultra-keynésianisme" adoré par la plupart de nos économistes et hommes politiques. Cela évite, bien évidemment, de prendre les décisions courageuses pour réaliser les réformes qui diminueront l’emprise de l’Etat sur l’économie. Quand cessera-t-on pour la France d’accuser le libéralisme de tous les maux, alors que les dépenses publiques représentent 57% du PIB ?  A ce niveau, on est beaucoup plus dans le semi-collectivisme que dans le libéralisme !

Sept ans après le début de la crise actuelle, les politiques monétaires mises en place sont donc tout à fait inefficaces pour faire repartir la croissance. La relance keynésienne n’a abouti qu’à une reprise poussive. Pour de nombreux économistes, le coupable très pratique est l’Allemagne qui défend "une politique d’austérité".

La France est désormais la championne européenne de la pression fiscale

La France a connu un fort rebond de la production industrielle en août (+1,6% d’une année sur l’autre) due pour l’essentiel à l’amélioration de la situation dans le secteur automobile. L’indice CAC 40 est repassé au dessus de 4700 qui était son niveau d’avant la baisse du mois d’août.

Une grande campagne médiatique a été déclenchée sur le fameux PIB (Produit Intérieur Brut) au moment où la France risque d’être bientôt rattrapée par son engagement de limitation du déficit budgétaire à 3% du PIB. On connaît depuis longtemps les limites et les imprécisions d’un outil statistique qui valorise comme création de richesse à la fois la construction automobile, les accidents de la route et les embouteillages ; qui mélange les ventes d’armes et les ventes de livres ; qui ignore le travail domestique non rémunéré et le travail au noir. Il mélange aussi allègrement l’économie marchande et la dépense publique, au point que toute augmentation des salaires des fonctionnaires au-delà de l’inflation apparaît comme une création de richesse. Pire encore, le PIB ne mesure pas le bonheur. On a vu l’incroyable créativité dont a fait preuve le gouvernement en matière de statistiques sur le chômage. Nul doute qu’il va s’employer à modifier le concept de PIB. "Je ne crois à aucune statistique avant de l’avoir falsifié moi-même", disait d’ailleurs Winston Churchill.

Tous les régimes du modèle social français sont à la dérive : assurance-maladie, retraite, famille et bien sûr l’assurance-chômage qui n’est pas une branche de la Sécurité sociale mais participe au système. Le nombre de chômeurs de moins de 25 ans a augmenté de 100 000 depuis avril 2012. Tout le dispositif mis en place par François Hollande a été inefficace. Le jeu de bonneteau continue cette semaine, avec la Sécurité sociale qui transfère son déficit sur les hôpitaux pour tenir ses objectifs !

Rien n’est fait sur les régimes spéciaux comme la SNCF ou EDF qui deviennent insoutenables vis-à-vis des salariés du secteur privé. Autre exemple, en matière de formation professionnelle, l’Etat ne cotise pas pour ses 2,4M d’agents alors que leur budget formation coûte tout de même 2,5Md€ au budget de l’Etat !

Le "Global Competitiveness Report", rapport sur la compétitivité de la France, montre que la France occupe la neuvième place en matière de pression fiscale après l’Argentine, la Bolivie, le Tadjikistan, la Colombie, l’Algérie, la Mauritanie, le Brésil et la Guinée !

La situation a peu de chances de s’améliorer quand on regarde les principales nouvelles de la semaine. Les impôts vont encore augmenter pour les familles gagnant plus de 50 000 euros ! C’est ce que l’on désigne comme une politique particulièrement "clivante".

La créativité fiscale est sans limites. Il existe maintenant en France 364 prélèvements de toute nature, soit un par jour. Ce n’est pas l’amendement Ayrault qui va améliorer la situation. Il souhaite fusionner l’impôt sur le revenu et la CSG pour la rendre progressive. L’ancien Premier ministre n’a probablement pas pris connaissance des derniers chiffres de l’exit fiscal communiqués par Bercy pour 2013. Ils sont désastreux.

Le résultat de cette politique est clair. Quand on regarde la réalité de près, on constate que les états majors des grands groupes français sont maintenant délocalisés et qu’en matière industrielle, des sociétés  comme Sanofi réfléchissent sur leur présence industrielle en France !

En Allemagne, l’économie enregistre les premières conséquences du ralentissement chinois et de l’affaire Volkswagen. Le moteur allemand ralentit, l’excédent commercial du mois d’août a été le moins bon depuis six ans et demi… La croissance est désormais attendue à 1,8% cette année contre les 2,1% espérés au printemps dernier.

La bonne économie, c’est la bonne industrie et du bon commerce.

Aux Etats-Unis, les introductions en bourse sont devenues plus difficiles. Pure Storage, une data company, a connu une IPO difficile. Le dollar a progressé de 14% depuis mai 2014, pondéré par le poids de son commerce extérieur.

En Chine, on n’est pas dans le scénario de la récession mais l’industrie lourde est en récession. On va vers les 6% de croissance en 2016. Dans les douze mois qui viennent, les taux vont baisser. Les plus grands bénéficiaires seront les compagnies d’assurance chinoises : Ping An, China Life, AIA Group.

Les banques en européennes continuent leur ménage. Deutsche Bank passe ses comptes à la paille de fer, elle a accusé pour le seul troisième trimestre une perte de 6,2Md€. Le Crédit Suisse s’apprête à lancer une grosse augmentation de capital. Il y a un moment où les banques centrales et les hommes politiques devront réfléchir sur les dégâts produits par leur politique de taux zéro. A suivre…

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