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La guerre des Charlie et des anti Charlie est déclarée ; Sarkozy : la malédiction de l'argent ? ; réforme du collège : le massacre des innocents
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Revue de presse des hebdos

Et aussi : qui est Charlie ? Ce n’est pas Emmanuel Todd ! Pour lui : le 11 janvier était une imposture ; Charlie, c’est Caroline Fourest : « quand les anti-Charlie se sont décomplexés, ça m’a empêchée de dormir » ; on aurait même vu deux « Charlie » aux portes du festival de Cannes… Charlie, c’est Malka-Val ou c’est Denis Robert ? ; et si le visage de Charlie était plutôt celui de Luz ? ; « vaccins, sel, sucre, vin, paracétamol, aspartame, wifi, soleil, anti-dépresseurs »… Vous saurez tout tout tout sur votre santé ; l’école massacre les innocents : « la réforme stupide du collège ».

Sandra Freeman

Sandra Freeman

Journaliste et productrice, Sandra Freeman a animé des émissions sur France Inter, LCI, TF1, Europe 1, LCP et Public Sénat. Coautrice de L'École vide son sac (Éditions du Moment, 2009), elle est la fondatrice du média internet MatriochK.

 

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Quatre mois après l’attentat de Charlie Hebdo, tout le monde le cherche…

Les attentats contre Charlie Hebdo, c‘était il y a 4 mois, mais c’est encore aujourd’hui ce qui - l’air de rien - nous préoccupe. Qu’on parle des « menaces des drones » dans Challenge, des « centres d’écoutes les plus secrets de France » dans l’Obs, du renseignement, du dessin, de la pensée, de la religion, de la laïcité… Charlie est un peu partout, tel un fantôme, mais difficile pour chacun d’en saisir son vrai visage aujourd’hui.

Qui est Charlie ? Ce n’est pas Emmanuel Todd ! Pour lui : le 11 janvier était une imposture.

120 jours après les manifestations post attentats, Emmanuel Todd, l’historien et démographe de référence, publie « Qui est Charlie ? », un livre réquisitoire contre « une France pétrie de bonne conscience » et dont l’Obs s’en fait relais en couverture cette semaine. On sent presque de la fierté de la part du journal de porter haut « le brûlot Todd » et de publier cet « entretien avec l’intellectuel qui défie la gauche ». Aude Ancelin, qui signe l’article, semble assez engagée sur le sujet. « Quatre mois après les tueries de janvier, tout se passe comme si rien ne s’était passé, comme si le réservoir de la résignation avait flambé d’un coup dans le noir de la nuit française, sans laisser aucune empreinte. Ni nouveau pacte républicain, ni fraternité régénérée, ni main tendue à une fraction de la jeunesse des quartiers socialement et mentalement désorbitée ». En clair, cette réaction de masse à la suite des attentats, n’aurait été qu’« une pure orgie émotionnelle infertile politiquement » !

Et évidemment, Emmanuel Todd affirme son propos : « j’ai eu la révélation instantanée que le discours unanimiste était bidon », et ça très vite. Pourquoi ?

Il reprend une intéressante « théorie des deux France » qui guide ses travaux depuis longtemps. En gros : « D’un côté, nous avons la vieille France laïque et républicaine – le bassin parisien, la façade  méditerranéenne etc. – la France qui a fait la révolution en somme. De l’autre, il y a la France périphérique de l’Ouest, une partie du Massif central, la région Rhône-Alpes, la Lorraine, la Franche-Comté. Ce sont les régions qui ont résisté à la révolution et dans lesquelles l’imprégnation catholique est restée très forte jusqu’au lendemain de la deuxième guerre mondiale. » Et aujourd’hui quelle résonnance avec les manif pour Charlie ? A Todd de dessiner à sa façon la France : « Le hic du 11 janvier, c’est que ce sont les régions les moins républicaines par le  passé qui ont le plus manifesté pour la laïcité. Avouez qu’il y a là quelque-chose d’étrange », ajoute-t-il. Sous entendu, sur ces terres-là on ne se serait pas battu « pour de vrai » pour la laïcité.Dans le fond, la bataille aurait été seulement contre l’islam, si je comprends bien l’idée. D’ailleurs, il confirme sa crainte : « la confrontation hystérique avec l’islam, c’est 100% de chances de désastre pour la France ».

Et par-delà l’analyse scientifique de tout cela, Todd ne cache pas son ressenti : « pour la première fois je n’ai vraiment pas été fier d’être français »… En cause, 4 millions de personnes réunies « pour dire que caricaturer la religion des autres est un droit absolu – et même un devoir ». Et cela alors même que « ces autres sont les gens les plus faibles de la société ».

Charlie, c’est Caroline Fourest : « quand les anti-Charlie se sont décomplexés, ça m’a empêchée de dormir ».

Aujourd’hui le Point trace un portrait d’elle à l’occasion de la sortie de son « éloge du blasphème », une attaque en règle contre le cortège du « oui mais » ! Et qui est-ce qu’elle accuse ? Le Pen, Dieudonné, Alain Badiou, Geluck et… Emmanuel Todd, bien sûr. La militante de la laïcité publie son essai pour « éclaircir les idées des anti-Charlie »... Mais aussi pour « retrouver le sommeil ». Elle déclare d’ailleurs que son « devoir c’est d’être une lanceuse d’alerte. Ça m’apaise d’agir plutôt que de me sentir impuissante. J’ai le pouvoir de changer le monde plus que les politiques qui ne sont que des outils », ce qui s’appelle être habitée par un sentiment de responsabilité et d’urgence. « C’est une warrior »?, affirme l’avocat Richard Malka dans le journal. Le combat n’est donc pas fini, et Charlie n’en finit pas de chercher sa place dans la grande Histoire qui se dessine.

On aurait même vu deux Charlie aux portes du festival de Cannes… Charlie c’est Malka-Val ou c’est Denis Robert ?

Et puisqu’on parle de l’avocat Richard Malka, petit détour par les « Immedia » de Renaud Revel dans l’Express. On apprend qu’avec l’ancien patron de Charlie Hebdo, Philippe Val et le réalisateur Daniel Leconte, ils « font le siège du comité d’organisation de festival de Cannes, et de son président Pierre Lescure pour que leur dernier film "c’est dur d’être aimé par des cons 2" mis en chantier au lendemain de l’attentat, mais auquel une majorité de journalistes de Charlie a refusé de collaborer, soit présenté sur la Croisette ».

Revel souligne « l’embarras du délégué général du Festival, Thierry Frémaux, qui a sur son bureau un autre projet de film sur le sujet, dont il pense le plus grand bien : celui de Denis Robert sur Cavanna : « Jusqu’à l’ultime seconde, j’écrirai ».

Euh…Excusez-moi un instant… Je me trompe où Denis Robert avait déjà combattu Richard Malka il y a quelques années sous d’autres projecteurs… C’était ceux de l’affaire « Clearstream » ! Le terrain n’a rien à voir, certes, mais surprenant de retrouver les même figures dans un tout autre exercice et sous de nouveaux spotlights, quand même.

On avait dit « pas d’amalgame » le 11 janvier, non ?

Et puis, j’avoue : je peux sembler faire des « amalgames », mais ce qui apparaît en parcourant la presse cette semaine, je suis tombée aussi sur « les exclusifs » de « l’Express » que « Anne Hommel, très engagée avec l’avocat Richard Malka au côté de l’équipe de Charlie Hebdo, agrandit son agence, de plus en plus sollicitée pour ses conseils en communication »… Ce n’est pas que ça me pose problème du tout, je n’ai rien contre eux. Et même je suis ravie pour elle.Mais, c’est juste que, petit à petit, en lisant les journaux cette semaine, Charlie apparaît comme une marque à la mode dont on se sert, un label de qualité - voyez un peu comme Label Rouge ou commerce équitable. La somme de tout cela, écœure un peu, in fine.Tout perd son sens.

Et si le visage de Charlie était plutôt celui de Luz ?

A la une des Inrockuptibles cette semaine, Luz donc. Torse poil. Mais pas totalement tout nu, comme Sébastien Thierry aux Molières. Luz est tout dessiné sur la photo de son corps. Des dessins de sexe, d’arme, de police… d’un peu de tout. Mais ce qui compte, c’est sa moustache. Dessus, il y a écrit « Je suis Charlie » (mais pas comme le slogan de la manif en blanc sur fond noir… juste écrit à la main). Et puis, sur sa lèvre du bas : « prouvez-le » !

Ben oui, prouvez-le que vous êtes Charlie, puisque vous le dites tous. C’est un peu ça la tendance 4 mois après. Ah ouai t’es Charlie toi ? T’es sûr ? Et pourquoi ? Prouve-le !

Le jour de l’attentat, rappelle-t-on dans le papier, il est arrivé en retard ; c’était ses 43 ans. Son anniversaire.« En tuant 12 personnes, les frères Kouachi ont assassiné leur propre innocence enfantine, et se sont tiré une balle dans l’imaginaire », dit Luz au cours de son interview, rappelant que les assassins aussi devaient dessiner quand ils étaient petits.

Mais ce qui est mis en avant dans le journal, c’est la vie d’après Charlie. Luz sort sa « BD vérité », « Catharsis », dans laquelle il expose sa vie au lendemain de l’horreur, « la guerre psychologique et intime contre la folie qui s’immisce dans la brèche ouverte par l’enfermement. Plus d’espace pour la musique dans son esprit hanté. Jute cette tâche, cette couleur rouge ». Son témoignage est poignant, loin des intellectuels de tout bord et des analystes qui voient de haut ce qui se passe, loin des politiques stratèges. Il parle comme parle « Charlie ». « Un jour le dessin m’a quitté, dit-il, le même jour qu’une poignée d’amis chers, à la seule différence qu’il est revenu, lui ». Et si le dessin est revenu, certains aujourd’hui ne l’intéressent plus, affirme Luz : « Je ne dessinerai plus le personnage de Mahommet. Je m’en suis lassé, tout comme de celui de Sarkozy ».

Sarkozy : son rapport à l’argent – une malédiction ?

L’Express  ne se lasse pas du visage de Sarkozy, lui. Même qu’il le met en couverture, en noir et blanc. Ce n’est pas pour en faire une icône du studio Harcourt, ni pour le flatter… Non, le sujet c’est l’argent… et même « la malédiction de l’argent », et le noir et blanc tendrait à faire passer Sarko pour un homme du passé, un homme aux sombres histoires puisque « les juges le cherchent sur le financement de ses deux campagnes présidentielles ». Mais lui, il se défend. « Ses adversaires et même ses amis le critiquent pour ses conférences rémunérées, alors que ses activités d’avocat lui rapportent gros ». Mais lui, il assume.

Le mag retrace rapidement les affaires, mais l’angle principal du papier, c’est de faire de la « Sarkologie » et de tenter de d’expliquer sa psychologie face à l’argent : « il assimile l’argent à la réussite » explique-t-on. Et il déteste échouer ».« Il n’a pas de vice caché. Il n’agit pas par l’amour de l’argent mais par goût de la performance », souligne un ex-conseiller, et « puisque l’argent est un signe qui selon lui, permet d’apprécier la valeur d’un individu, c’est sa valeur marchande qu’il mesure lors des fameuses conférences (NDLR : qu’on lui reproche d’accepter de par le monde) par rapport à celles d’un Clinton ou d’un Blair ». Et donc, il en est fier : « je suis seul à parler de la France partout dans le monde. Je devrais m’arrêter ? Certainement pas ! »

Alors oui, les réalités au sein de l’UMP ont changé et la qualité de vie a baissé au sein du parti.L’express montre qu’on a bien changé d’époque « du show à l’américaine au Bourget, en novembre 2004, dont le coût avoisinait les 5 millions d’euros… aux meetings de campagne pour la présidence de l’UMP, en 2014 ». (Les temps ont changé et les budgets aussi : pour le congrès du 30 mai à la Villette… la réunion pour 15 000 militants a coûté 400 000 euros). Il paraît même que le trésorier de l’UMP passe son temps à serrer les vis et que « toute dépense de plus de 500 euros doit faire l’objet de deux devis ».

Alors non, le train de vie de Sarko n’est pas tombé dans le lowcost, lui ! D’ailleurs, depuis qu’il a quitté l’Elysée, « les revenus du couple ont été multipliés par six ». Il y a ses conférences mais il y a aussi son cabinet d’avocat qu’il a fondé en 1987 avec son ami Arnaud Claude. Lui même se montre peu dans ce cabinet qu’il a fondé : « en 20 ans, je peux compter sur les doigts d’une main le nombre de fois où je l’ai croisé » dit une ancienne de la maison… Mais ce n’est pas le problème. Sarko sait entretenir la clientèle (le groupe Bouygues, le laboratoire Servier, l’institut Pasteur, les constructeurs automobiles Toyota, Suvaru, Ferrari, les mairies de Levallois et de Puteaux, les banquiers Rotschilf et General Electric Capital Bank). « Quand il est devenu président, il a fait effacer son nom de la plaque du cabinet d’avocat en 2007 ». Quelques cinq ans de pause. Et puis, l’après Elysée, il y est revenu, avec « un chiffre d’affaire en hausse en 2013… de 23% ». « Ce cabinet c’est son assurance vie », écrit l’express, « il en a profité au mieux des évolutions de la législation et de la fiscalité pour préserver ses intérêts ».

« Vaccins, sel, sucre, vin, paracétamol, aspartame, wi-fi, soleil, anti-dépresseurs »… vous saurez tout tout tout sur votre santé

C’est un peu ça la promesse du magazine Le Point, cette semaine qui met Didier Raoult, un des principaux microbiologistes en couv’. Il dirige le plus grand centre consacré aux maladies infectieuses en France, mais surtout, il publie un nouveau livre qui va à l’encontre de ses contemporains « qui s’appliquent à manger du brocolis et du soja pour se prémunir du cancer ».

L’hebdo en profite donc pour démêler le vrai du faux, point par point. Les antalgiques sont inoffensifs ? Faux. Boire du vin accroît l’espérance de vie ? Vrai. S’exposer au soleil est dangereux ? Faux. Et l’aspartame ? Non. Et les ondes électromagnétiques ? Non. Le sel, c’est dangereux ? Vrai. Le tabac est-il le plus grand danger sanitaire ? Oui. Le burn-out est une maladie ? Non. Les spermatozoïdes sont en voie de disparition ? Oui. Les jeux vidéo dangereux pour les jeunes ? Non. Faut-il se faire vacciner contre la grippe ? Non. Le BCG est obsolète ? Vrai etc. etc. D’ailleurs Didier Raoult est contre les vaccinations obligatoires de maladies éradiquées depuis 40 ans en France alors que l’Hépatite B continue de faire des ravages, faute de vaccination.

Selon lui ? Les vrais ennemis de notre santé ? « Les maladies nosocomiales » qui font « entre 10 000 et 20 000 morts par an en France et sont la 7ème cause de mortalité dans les pays occidentaux ». En cause, « les cathéters sanguins et urinaires que l’on pose de façon beaucoup trop systématique alors qu’en 95% des cas ils s’avèrent inutiles ». no comment…

L’école massacre les innocents : « la réforme stupide du collège ».

Et puis, puisque vendredi, c’est le 1er mai, Marianne sort exceptionnellement dans les kiosques demain et s’attaque à l’école « le massacre des innocents ». L’hebdo n’y va pas de main morte et évoque la « réforme stupide du collège » : « A vouloir créer un collège moyen pour élèves moyens apprenant des choses moyennes, cette réforme nous fera passer du collège unique au collège inique ». Il est toujours de bon ton de critiquer toute réforme de l’école et par là même de critiquer une école qui ne sait pas s’adapter au temps qui passe et à la société.

Mais là le papier ne fait pas dans la demie mesure : « les collégiens n’auront pas vraiment cours : ils devront eux-mêmes présenter des exposés sur des sujets balisés par deux ou trois professeurs ». Aussi, on n’aura plus nos bonnes vieilles classes européennes qui formaient des bilingues. Selon Marianne, dans cette réforme « stupide », « on choisit de ne plus aider les élèves en difficulté », « on décide qu’un professeur n’est rien d’autre qu’un adulte avec un livre » et on apprend surtout que « les vainqueurs de cette réforme sont les agences de tourisme »… Comme souvent : « En amont de cette réforme, le ministère a déjà présenté – avec beaucoup de discrétion – le calendrier scolaire des trois prochaines années. On y découvre avec stupeur des changements incongrus, qui ne plairont qu’aux professionnels du tourisme,ou aux 8 % des Français qui partent au ski lors des vacances d’hiver. C’est simple : tout est fait pour concentrer les vacances sur la période d’enneigement. »

Heureusement qu’on nous a laissé le premier Mai ! Bon Muguet à tous !! A la semaine prochaine.

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