Vers une baisse des impôts dès 2015 ? Ce qui serait possible (et pour qui) en fonction de ce qu'on peut anticiper de la croissance et des baisses de dépenses<!-- --> | Atlantico.fr
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La marge de manœuvre du gouvernement pour baisser les impôts dès 2015 s'amenuise.
La marge de manœuvre du gouvernement pour baisser les impôts dès 2015 s'amenuise.
©Reuters

Modélisation

Entre la prévision de croissance limitée du FMI à 1,5 % et l'engagement présidentiel de réduire les dépenses publiques de 50 milliards d'euros, la marge de manœuvre du gouvernement pour baisser les impôts dès 2015 s'amenuise.

Philippe Crevel

Philippe Crevel

Philippe Crevel est économiste, directeur du Cercle de l’Épargne et directeur associé de Lorello Ecodata, société d'études et de conseils en stratégies économiques.

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Atlantico : A quelle ampleur de baisses d'impôts peut-on s'attendre en 2015 en fonction des promesses d'effort budgétaire et des perspectives de croissance attendues ? Le gouvernement aura-t-il les moyens de ses ambitions ?

Philippe Crevel : L'équation budgétaire doit prendre en compte la nécessité de ramener le déficit public de 3,6 % en 2014 à 3 % environ en 2015, avec le fait qu'une croissance de 1,5 % génèrera peu de ressources supplémentaires. Compte tenu de ces éléments, la promesse de François Hollande de baisser les impôts va être très difficile à tenir.

Le risque est donc que le gouvernement se contente d'annonces "d'impôt washing" c'est-à-dire de soi-disant baisses d'impôts en compensation d'autres hausses. Mais en revanche, il n'est pas sûr que le niveau des prélèvements obligatoires baisse globalement. Pour trouver des marges de manœuvres aussi rapidement sans modifier l'architecture budgétaire, le gouvernement devra ainsi s'appuyer sur les dotations aux collectivités locales. S'il accélère le désengagement débuté, cela aboutira à un transfert fiscal des prélèvements nationaux vers les collectivités locales qui devront augmenter leur propre imposition. Les contribuables locaux seraient donc amenés à compenser la diminution des contributions nationales. Mais ce n'est là qu'un jeu de bonneteau fiscal car ces contribuables sont les mêmes ! Le désengagement de l'Etat et le calendrier électoral penchent pourtant dans le sens de cette piste car, une fois les élections municipales passées, une hausse traditionnelle des impôts est à craindre, et les contribuables locaux risquent d'être fortement mis à contribution.

Seul un volant supplémentaire de baisse des dépenses publiques, permettrait un véritable changement d'équation budgétaire car le programme de réduction des déficits publics donné à l'UE impose de facto que toute réduction d'impôt soit compensée par une baisse équivalente des dépenses publiques. Mais là encore, où le gouvernement peut-il trancher dans le vif dans un délai aussi court ?

Sur quels impôts pourraient porter ces réductions ?

Ces deux dernières années, le gouvernement actuel a renforcé la pression fiscale avec l'augmentation de l'impôt sur le revenu, la diminution du quotient familial, une taxation accrue des revenus de l'épargne et des plus-values, une majoration des contributions exceptionnelles à l'impôt sur les sociétés (IS) et une hausse depuis le 1er janvier de la TVA. L’État devra donc soit revenir sur une ou plusieurs de ses augmentations récentes, soit réformer en profondeur la fiscalité. Jean-Marc Ayrault a engagé un tel processus mais celui-ci devra se greffer à la promesse de François Hollande de réduire les impôts en 2015. Or on peut se demander si ces mesures sont véritablement coordonnées ou concurrentes,  mais nul ne le sait.

Si une réforme globale de l'impôt sur le revenu (IR) est entamée, alors le gouvernement pourra réduire ses taux ou améliorer certains abattements pour les charges de famille ou encore, dans le cadre d'une fusion avec la CSG, revoir l'ensemble du dispositif et prévoir un prélèvement global moins important. Mais s'il est dans le rafistolage, de telles baisses deviendront complexe à mettre en place. L’État ne pouvant pas revenir sur la hausse de la TVA ni minorer les taux d'IR - ce qui n'est pas dans la philosophie socialiste - il se contentera alors probablement d'améliorer des dispositifs plus sociaux comme la refonte du RSA où la réduction de la pression fiscale sur les tranches basses de l'impôt sur le revenu.

Quels profils de contribuables peuvent espérer profiter de ces baisses d'impôts ?

Si l'on prend en compte ces hypothèses, des mesures ciblées sur les électorats modestes et les classes moyennes paraissent plus probables qu'une modification générale des taux. D'autant que les arrière-pensées politiques vont devenir présidentielles à partir de 2015. François Hollande voudra ainsi soigner les revenus modestes et moyens, les premiers étant attirés par le FN et les seconds tentés par l'abstention. Il faudra donc notamment trouver des mesures qui puissent corriger l'impact du quotient familial qui a pu pénaliser les revenus modestes. Enfin, j'imagine peu de nouvelles mesures en faveur des entreprises, même si une harmonisation européenne de l'assiette et un abaissement du taux de l'IS seraient souhaitables.

Propos recueillis par Pierre Havez

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