56% des Français ont-ils raison de penser que la France est moins bien armée que les autres pour faire face à la mondialisation ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Le sondage du CSA semble faire état d'une méfiance majoritaire des Français à l'égard d'une mondialisation qui leur apparaît destructrice.
Le sondage du CSA semble faire état d'une méfiance majoritaire des Français à l'égard d'une mondialisation qui leur apparaît destructrice.
©Reuters

56 nuances de blues

D’après un sondage publié par CSA, 56% des Français estiment que leur pays est moins bien armé que les autres pour faire face à la mondialisation. Hanté par les délocalisations et la destruction d'emplois, le village gaulois semble développer une méfiance toute particulière à l'égard de la compétition globale.

Laurent Baumel

Laurent Baumel

Laurent Baumel est membre du Parti socialiste. Il est notamment l'un des fondateurs du mouvement "La Gauche Populaire"

 

Voir la bio »

Atlantico : Le sondage du CSA semble faire état d'une méfiance majoritaire des Français à l'égard d'une mondialisation qui leur apparaît destructrice. Qu’est-ce qui est à l’origine de ce désenchantement ?

Laurent Baumel : Ce constat peut s’expliquer par l’attente toute particulière qu’ont les Français d'être protégés par l'Etat, ce dernier devant dans leur esprit reprendre les commandes pour lui assurer un destin collectif. Ce désir  de protection est ancré dans notre histoire, il vient de l’Ancien Régime, du colbertisme, et a été magnifié par la Révolution et de toute  notre construction républicaine. On le retrouve aussi dans le gaullisme et le socialisme qui, malgré leurs différences , sont deux idéologies interventionnistes. L’Etat est donc par nature notre arme collective pour maîtriser notre avenir et plus particulièrement pour face au péril extérieur aujourd’hui incarné par la compétition économique mondiale avec ses conséquences: délocalisation, pressions salariales, dumping social, ...La mondialisation est dans l'imaginaire la nouvelle figure de la guerre, et les Français ne se sentent pas suffisamment protégés. 

J’ajouterai que, chez nous, la méfiance vis à vis de la mondialisation rejoint la méfiance vis à vis d'une économie capitaliste livrée à elle-même . Comme Tocqueville l'avait observé, la demande de protection se combine à celle d'égalité sociale.  La mondialisation, de ce point de vue, contribue à accroitre les inégalités. Malgré leurs efforts pour d'adapter aux nouvelles normes productives, les salariés ne reçoivent pas la reconnaissance à travers la hausse de leurs rémunérations tandis que celles des hauts dirigeants s'envolent . La mondialisation  met en cause l'Etat social bâti dans le cadre national alors que les Français souhaitent toujours un Etat régulateur. 

L’enquête affirme que malgré cette défiance des Français, les investisseurs étrangers sont toujours relativement tentés de continuer à s’impliquer en France. Qu’est-ce-qui se cache selon vous derrière ce paradoxe ?

l’Hexagone est attractif.  Nous faisons partie de l’Union Européenne qui est l’espace économique le plus ouvert au monde et qui a l’un des potentiels de consommation les plus importants de la planète. Et, au-delà des discours libéraux qui le présentent comme un boulet à trainer, notre modèle social, avec nos services publics gratuits, nos infrastructures, notre main d'œuvre bien formée, est un atout. 

Un sondage similaire réalisé en 2011 par TNS Sofres affirmait que 37% des sympathisants UMP considérait que la mondialisation était une « menace ». Comment expliquer que même à droite ce sentiment se soit durablement installé ?

Je pense que cela s'explique tout simplement par le fait que la France n'a pas de culture libérale à proprement parler, et cela est tout aussi vrai pour une partie de la droite. C'est cependant moins le cas pour les représentants politiques et cette distorsion représentative pose un réel problème dans l'opinion, cette dernière finissant par se demander si les « serviteurs de l'Etat » défendent réellement les intérêts nationaux face à ceux du marché. Le fait que Chirac ait pu battre Balladur et se faire élire en 1995 sur le thème de la « fracture sociale » est ainsi hautement révélateur du fait que la droite politique peut difficilement s'imposer dans l'opinion sans aborder des thématiques sociales qui incluent la protection étatique.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !