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Bertin Nahum, français et 4ème entrepreneur le plus révolutionnaire du monde : "L'innovation ne naît pas de l'assistance de l'Etat"
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Franchouillard Valley

Patron de Medtech, une PME montpelliéraine d'assistance robotique à la chirurgie, Bertin Nahum a eu récemment la surprise d'être classé 4ème entrepreneur high-tech le plus révolutionnaire du monde par le magazine canadien Discovery Series.

Bertin Nahum

Bertin Nahum

Bertin Nahum est PDG de Medtech, il est l’inventeur du robot Rosa, dont l’utilisation a permis des opérations sur le cerveau impensables auparavant. Ce robot est aujourd’hui utilisé dans une quinzaine de centres médicaux à travers le monde notamment à Cleveland, Montréal, Paris, Strasbourg, Rome et Pékin.

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Atlantico : Patron de Medtech, une PME montpelliéraine d'assistance robotique à la chirurgie, vous avez créé la surprise en étant classé 4ème entrepreneur le plus révolutionnaire au monde derrière les Américains Steve Jobs, Mark Zuckerberg et James Cameron. Avant de lancer votre entreprise, vous avez travaillé dans plusieurs hôpitaux français. Quel a été le déclencheur ?

Bertin Nahum : J’ai eu la chance d’occuper plusieurs postes de terrain (notamment en bloc opératoire) où j’ai pu former des chirurgiens à l’usage et à l’entretien de machines médicales. J’ai pu ainsi expérimenter personnellement les difficultés auxquelles étaient parfois confrontées les équipes chirurgicales, ce qui m’a fourni un certain nombre d’idées qui pourraient résoudre leurs problèmes au quotidien. Sans cette expérience pratique, je n’aurais pas pu, je pense, mettre au point un robot comme Rosa. Ce lien entre ingénieurs et praticiens n’est, hélas, pas toujours optimal en France, malgré une sincère volonté d’améliorer les choses.

Votre robot Rosa a rencontré plusieurs difficultés sur le marché français, quelle a été la cause de ce retard à l’allumage ?

La première expérience de Rosa avec le monde médical ne fût pas vraiment heureuse. Notre robot a premièrement été testé dans un CHU du sud de la France, en coopération avec des équipes chirurgicales, notre société se faisant un point d’honneur à mettre au point ses inventions en collaboration avec leurs utilisateurs potentiels. Une fois que le développement de notre robot s’est retrouvé suffisamment avancé, une série d’opérations concluantes a pu avoir lieu dans le CHU en question. Il a ensuite fallu promouvoir nos résultats, ce qui passait entre autres par le soutien des voyages des chirurgiens dans des congrès, notamment outre-Atlantique. A un certain point, il a bien fallu aborder la question de l’achat de cette machine, qui était jusque-là prêtée. Nous avons donc déposé une demande de financement au Conseil général concerné, et cette demande fût validée. Nous avons appris quelques jours plus tard que le CHU avait finalement décidé d’utiliser ces fonds pour acheter le produit d’une société anglaise... Cet épisode est selon moi un épisode parmi d'autres qui révèle la réticence du marché français à soutenir ses propres produits.

En quoi les marchés étrangers ont-ils été plus accueillants que le marché français ?

Je dirais que l’avantage que l’on retrouve aux Etats-Unis, en Asie ou au Moyen-Orient est le fait que nos interlocuteurs finissent par s’affranchir de notre origine, qui l’on est d’où l’on vient, pour se concentrer uniquement sur la qualité de nos produits ainsi que sur notre capacité à le distribuer. C’est souvent plus rare de retrouver cette attitude en France, où l’on a de véritables difficultés à être pris au sérieux en tant que jeune entreprise innovante, les clients potentiels préférant investir dans des produits commercialisés par les grandes entreprises américaines, jugées plus sûres. Il y a en France une véritable désillusion des innovateurs quand il s’agit de conquérir le marché domestique, qui est pourtant censé être le terrain d’essai des sociétés technologiques. Pour résoudre (en partie) ce problème, beaucoup de professionnels du secteur appellent à la création d’un « Business Act » à la française, qui pour l’instant est resté lettre morte.

Quelles seraient vos suggestions pour débrider l'innovation en France, alors que l'on sait que depuis une dizaine d'années, les contributeurs « traditionnels » de la production scientifique mondiale (Etats-Unis, Japon, et Union Européenne) voient leur part de publications diminuer au détriment des pays émergents, notamment asiatiques.

De mon point de vue, je pense que l’on a une approche de l’accompagnement et du soutien des entreprises innovantes qui est une forme d’assistance, basée sur l’octroi de subventions. Ce système n’est évidemment pas mauvais en soi, un soutien financier étant toujours appréciable, mais selon moi l’approche n’est fondamentalement pas la bonne. J’estime que les pouvoirs publics nous assisteraient mieux s’ils favorisaient l’entrée des entreprises innovantes sur les marchés, en les rendant plus visibles, donc plus crédibles vis-à-vis des éventuels acheteurs. Au lieu de soutenir les entreprises par le bas, comme c’est le cas aujourd’hui, elle ferait donc mieux de les soutenir par le haut.

Un exemple très concret de ce problème est le fonctionnement d’Oséo : lorsqu’une société comme la mienne cherche à développer un programme de recherche, la seule aide qui est proposée est d’ordre financière. Ce système pousse ainsi beaucoup de sociétés à consacrer énormément de temps et d’énergie à la « chasse aux subventions », au lieu de se focaliser sur leurs projets et leurs relations commerciales. Oséo serait à mon avis bien plus utile si elle repérait nos potentiels clients en bout de chaîne, et qu’elle leur allouait directement les subventions qui nous sont normalement destinées. Cette méthode serait selon moi un excellent tremplin pour des structures innovantes qui sont aujourd’hui, on le sait, à la peine.

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