Dette, chômage, vague antiaméricaine : le bilan de Barack Obama peut-il empêcher sa réélection ?<!-- --> | Atlantico.fr
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A un mois et demi de l'élection américaine, Obama semble bien parti pour l'emporter de nouveau.
A un mois et demi de l'élection américaine, Obama semble bien parti pour l'emporter de nouveau.
©Reuters

Fausse image ?

A six semaines des élections américaines, Barack Obama fait figure de favori dans le duel qui l'oppose à Mitt Romney. En quatre ans, les Etats-Unis ont pourtant connu une forte hausse du chômage et une explosion de leur dette.

Guy Millière

Guy Millière

Guy Millière est un géopolitologue et écrivain français. Il est "senior advisor" pour le think tank  Gatestone Institute à  New York, et auteur du livre Le désastre Obama  (édition Tatamis).

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Atlantico : Il y a quatre ans, "l'Obamania" gagnait le monde. Dans votre livre Le désastre Obama, vous dressez un portrait très négatif de ce dernier. A un mois et demi d'une nouvelle élection américaine, Obama semble bien parti pour l'emporter de nouveau. Qui est vraiment l'actuel locataire de la Maison blanche et pourquoi qualifiez-vous sa politique de dangereuse ?

Guy Millière : Barack Obama vient de l'extrême gauche américaine. Il a eu une carrière de community organizer, c'est à dire d'agitateur social, pendant l'essentiel de sa vie. Il est entré en politique avec des intentions bien précises : transformer intégralement la société américaine, de façon à en faire une société qui pourrait ressembler à une social-démocratie de type européen.

Je qualifie sa politique de désastreuse pour plusieurs raisons.

Sur le plan intérieur américain :

    • Obama est l'initiateur d'une politique d'endettement effrénée: la dette américaine a augmenté de 6000 milliards de dollars durant son mandat,
      • il a fait voté une loi qui réglementent de manière asphyxiante beaucoup d'entreprises américaines,
        • il est à l'origine d'une série de dépenses qui vont peser largement sur l'économie américaine dans le futur,
        • il a promu une loi sur la santé qui équivaut à nationaliser 16 % de l'économie américaine,
          • enfin, il a mis en place un système de cartellisation de la finance par l'intermédiaire de la loi Dodd-Frank. 


        Toutes les décisions politiques du président Obama se sont accompagnées d'une accentuation d'un crony capitalism, c'est-à-dire qu'une grande part des subventions du gouvernement sont allés à des entreprises proche du président. 

      Le Président Obama a donc conduit les États-Unis vers un endettement effréné et une stagnation économique qui ne s'arrête plus (la croissance économique a bien repris mais elle reste en-dessous de 2 %). Le chômage est extrêmement élevé, le nombre de pauvres et d'assistés a augmenté de 30 % depuis son investiture.

Sur le plan international :

  • Les États-Unis ont effectué un retrait en Irak et en Afghanistan,
  • on constate, un affaiblissement vis-à-vis des pays comme la Russie ou la Chine, 
  • Barack Obama a mené une politique d'apaisement face à l'Iran,
    • il a soutenu les "révolutions arabes" dont il était évident qu'elles allaient amener des islamistes au pouvoir.

Vous faites référence à l'augmentation du chômage et l'explosion de la dette. Obama en est-il seul responsable ou a-t-il également souffert de l'héritage de George W. Bush ?

Il n'y pas d'héritage de George W. Bush. A la fin du mandat du dernier président républicain, la bulle immobilière a explosé, ce qui a occasionné une crise assez violente. Ce n'est pas la première crise que les États-Unis traversent et ce ne sera pas la dernière. Cette crise ne doit absolument rien à la politique menée par George W. Bush, car elle repose sur les prêts subprimes, qui eux même s'appuient sur une loi réactivé à la fin de la présidence Clinton : le Community reinvestment act. Les banques américaines ont été obligées d'accorder des prêts immobiliers à des personnes qui étaient à la limite de la solvabilité. 

La crise a commencé suite à une augmentation des prix de l'immobilier, provoquée par une demande importante issue de l'instauration des prêts subprimes. L'accroissement des prêts a vite montré ses limites  : des personnes ne pouvaient  plus payer leurs maisons, ce qui a entraîné une baisse des prix et à long terme un écroulement du secteur de l'immobilier. La crise financière a donc été la conséquence du Community reinvestment act.

Barack Obama s'est ensuite lancé dans une politique de dépenses exacerbées afin de transformer profondément l'économie américaine, avec sa fameuse loi de stimulation. Obama a ainsi endetté l'économie et asphyxié tout un secteur de l'économie américaine.

Vous expliquez que les États-Unis n'ont pas connu de réelle avancée sous la mandature Obama. Que faites-vous de la réforme conduite sur la santé, une première aux États-Unis ?

Cette réforme ne plait pas à la population Américaine car, tout en considérant que le système de santé est défectueux, elle reste très attachée au principe de la liberté de choix de son assureur. Or, le système que met en place l'administration Obama tend à aller vers une forme de monopole gouvernemental de l'assurance (contrôle des prix et des prestations).

La Canada dispose d'un système de monopole gouvernemental de l'assurance semblable a celui prôné par le président Obama. Or, les Canadiens partent aujourd'hui se faire soigner aux États-Unis et ça, les Américains en sont bien conscients.

Arrestation de Ben Laden, soutien aux révoltes arabes, chute de Kadhafi... En termes de politique internationale, après huit années de George W. Bush, ne peut-on pas saluer le bilan de Barack Obama ? 

L'élimination de Ben Laden est une chose, mais cela n'a rien changé dans l'existence d'al-Qaïda. Au contraire, le mouvement a réussi a s'implanter plus facilement dans les zones d'Afrique subsaharienne, en Somalie, dans la Corne de l'Afrique, au Yémen et en Libye.

Al-Qaïda était derrière les émeutes des derniers jours dans les pays arabes, elle combat aussi le régime de Bachar el-Assad en Syrie dans le but de créer un califat sunnite en compagnie des Frères musulmans. Le développement de la nébuleuse terroriste s'est donc accentué sous le mandat d'Obama. 

Les révolutions dans le monde arabe n'en étaient pas. Elles étaient "des émeutes de la faim", c'est à dire des émeutes nées de causes économiques. Il n'y avait pas de dirigeants politiques derrière, et des organisations islamistes structurées (Ennahda et les Frères musulmans par exemple) en ont tiré profit.

L'administration Obama a consenti la mise en place de ces pouvoirs radicaux. Dès le début de la première campagne de Barack Obama, des proches du président annonçaient que " les Américains peuvent coexister avec des pays dirigés par des régimes islamistes ". Barack Obama a contribué au renversement d'un régime neutre qui ne posait pas de problèmes majeurs aux États-Unis, la Libye. Aujourd'hui, le pouvoir en place n'a aucune autorité sur le territoire. La Libye est actuellement aux mains de bandes armées rivales en conflit avec les autres.

Ce qui s'est passé dernièrement à Benghazi est une illustration du fiasco de la politique étrangère menée par le président Obama.

Les dernières émeutes anti-américaines démontrent-elles aussi la fragilité de son bilan international ?

Elles montrent un échec. L'objectif de Barack Obama était de rendre le monde plus sûr, à l'abri des islamistes, afin que le monde arabe s'entende mieux avec les États-Unis. Cette façon de voir les choses repose sur une incompréhension totale de ce qu'est l'islam radical.

Les États-Unis paraissent de plus en plus faibles et les manifestations actuelles témoignent un mépris profond envers la puissance américaine. Les islamiste veulent que cette influence disparaisse le plus rapidement possible.

Fared Zakaria est un proche de l'administration Obama et l'auteur du livre Le monde post américain. N'a-t-il pas déjà préparé l'opinion publique américaine à "un certain déclin de la puissance américaine ?

Le déclin en question est un choix de Barack Obama. Il y a trois ans, un article de Charles Krauthammer,the decline is a choice, critiquait la position de l'administration Obama. Le président pousse les États-Unis vers un déclin sans le dire ouvertement. Au contraire, il présente ses choix aux Américains en affirmant qu'ils contribuent à la sécurité des États-Unis. Il annonce par exemple qu'il a mis fin à la guerre en Irak, mais ne dit pas qu'il a vaincu ni perdu la guerre. C'est exactement la même chose pour l'Afghanistan, mais il ment.

Je crains que dans les mois à venir, il y ait des fiascos majeurs comparables à ce qui s'est passé en Libye. Il suffit d'écouter le discours du président iranien Mahmoud Ahmadinejad mardi à l'ONU : il n'y a aucune crainte envers les États-Unis.

A vous écouter, Barack Obama ne peut pas être élu, si on ne se base que sur son bilan...

Barack Obama dispose d'un avantage énorme : toute la grande presse fait campagne pour lui. C'était déjà le cas il y a 4 ans, c'est aujourd'hui encore plus important. Tout ce qui peut être reproché à Obama est délibérément laissé de côté. En parallèle, le moindre petit défaut qu'ont peut trouver de Mitt Romney est monté en épingle. 

Si les élections avaient lieu aujourd'hui, Obama serait élu. Il reste encore 6 semaines de campagne pour Mitt Romney. Il doit montrer qu'il peut être président à la hauteur de la tâche qui l'attend. Aujourd'hui, 65% des Américains pensent que le pays va dans la mauvaise direction, 70 % pensent que les États-Unis sont dans une situation de déclin, Mitt Romney à donc encore une chance, s'il sait la saisir.


Propos recueillis par Charles Rassaert

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