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Attention, poison ?
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L'attaque des assiettes tueuses

"Les dangers de l'alimentation", "Attention à ce qu'il y a dans votre assiette" : à croire les Unes de L'Express et du Nouvel Observateur de cette semaine, les dangers liés à la nourriture sont innombrables. Une réalité ? Expert de l'ANSES, l'Agence nationale de sécurité sanitaire, Jean-François Narbonne revient pour Atlantico sur les risques réels ou fantasmés de l'alimentation.

Jean-François Narbonne

Jean-François Narbonne

Jean-François Narbonne est l'un des experts de l'ANSES, l'Agence nationale de sécurité sanitaire, professeur de Toxicologie, expert pour l’affaire du Chlordécone.

Il est par ailleurs professeur à l'Université de Bordeaux 1 et docteur en nutrition.

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Le contenu de nos assiettes présente-t-il un danger de santé publique ?

Il est extrêmement difficile de distinguer ce qui est du a l’exposition alimentaire de ce qui est du aux autres expositions. On parle beaucoup de la présence de molécules chimiques dans l’alimentation, et beaucoup moins des expositions domestiques, cosmétiques, et environnementales au sens large, comme la pollution atmosphérique ou par exemple les produits d’usage domestique, comme les détergents.

Si l’on fait tant de bruit autour des potentiels risques de l’alimentation, c’est dû surtout au fait que ce que nous consommons est extrêmement surveillé. On peut aujourd’hui facilement mesurer l’exposition aux polluants dans notre assiette, alors qu’il est très difficile de mesurer les expositions aux produits à risque contenus dans les cosmétiques par exemple ou encore de mesurer et d’évaluer les dangers de la pollution de l’air intérieur.

Par ailleurs, comme si la France avait agit différemment des autres pays du monde toutes ces dernières années, on dit souvent que nous sommes le troisième utilisateur de pesticides au monde, mais nous sommes aussi le troisième pays agricole au monde !

Y a-t-il des raisons objectives de s’inquiéter aujourd'hui ?

Il faut faire la part des choses. Oui, les pesticides provoquent des cancers chez les agriculteurs et la faible prise en compte de l’exposition aux facteurs de risque est un problème de santé du travail. On a caché pendant des années des effets qui étaient tout à fait attendus, tant dans l’affaire de l’amiante, que dans l’usage des pesticides. Ces risques qui étaient faciles a anticiper ont été occultés par les autorités, mais aussi par la société en général, volontairement, pendant plus de 30 ans, pour ne pas s’opposer au développement économique. Y compris avec la complicité des syndicats agricoles et des hommes politiques, toujours dans l’intérêt de l’emploi, et du profit.

Pour les consommateurs, les expositions  aux pesticides ne sont pas du même ordre. Il y a une quarantaine d’années, des études ont montré des liens entre certains cancers et la consommation de fruits et légumes traités aux organochlorés – interdits depuis les années 1970. Mais depuis,  il n’y a plus d’études qui ont mis en relation des liens entre la consommation de fruits et légumes et des maladies.

Au contraire, les recommandations du PNNS (Plan national nutrition santé) à savoir consommer cinq fruits et légumes par jour, reposent sur des études épidémiologiques nombreuses et reconnues, montrant que cette consommation protège d’un certain nombre de maladies une cohorte de consommateurs qui consommaient depuis des années des fruits issus de l’agriculture conventionnelle. 

Cela veut donc dire qu’il n’y a pas de risques pour le consommateur à consommer des fruits et légumes de l’agriculture traditionnelle. Maintenant on peut vouloir diminuer son exposition à l’ensemble des produits chimiques qui nous entourent. Et pas seulement dans notre assiette ! Pensez aux détergents – que l’on peut remplacer souvent par du vinaigre, du savon de Marseille, et tant d’autres produits naturels.

Pour ce qui se mange avec la peau, autant le consommer bio. On peut diminuer ainsi par un facteur de 6 ou 7 les expositions aux pesticides, quand bien même l’usage des pesticides aujourd’hui est encadré et contrôlé. Pour autant, encore une fois, c’est diminuer l’exposition, ce qui ne veut pas dire que consommer des produits issus de l’agriculture traditionnelle est à risque. Il faut rappeler que le nombre de molécules autorisées pour traiter les produits agricoles est passé de 1300 à 250, donc la majorité des molécules dangereuses a été bannies.

Maintenant, personne n’est capable de dire s’il y aura un effet bombe a retardement, pour ceux qui ont consommé des fruits et légumes traités avec des substances interdites, il y a longtemps. On sait qu’il y a eu une augmentation des cancers, des malformations et une baisse de la fertilité ces dernières années. Mais on n’est pas capable aujourd’hui de dire si c’est dû à l’alimentation, aux pesticides, aux détergents, à la pollution atmosphérique, voire aux peintures ? Impossible d’incriminer un facteur en particulier.

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