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7 semaines de confinement pour presque rien ?
©BERTRAND GUAY / AFP

Tout ça pour ça

La gestion de la crise sanitaire à Wuhan aurait-elle prouvé qu'un confinement indifférencié ne permettait pas de venir à bout de l'épidémie de Covid-19 ? Stéphane Gayet et Pierre Bentata analysent et décryptent les choix du gouvernement français sur le plan sanitaire et sur le plan économique.

Stéphane Gayet

Stéphane Gayet

Stéphane Gayet est médecin des hôpitaux au CHU (Hôpitaux universitaires) de Strasbourg, chargé d'enseignement à l'Université de Strasbourg et conférencier.

 

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Pierre Bentata

Pierre Bentata

Pierre Bentata est Maître de conférences à la Faculté de Droit et Science Politique d'Aix Marseille Université. 

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Atlantico : En quoi la gestion de la crise sanitaire de Wuhan a-t-elle prouvé qu'un confinement indifférencié ne permettait pas d'éradiquer le coronavirus ?

Stéphane Gayet : Le confinement est une méthode de prévention secondaire qui s'applique à certaines épidémies de maladies infectieuses aiguës et contagieuses, dont la gravité et le potentiel de diffusion ont un niveau particulièrement élevé et menaçant. Méthode de prévention secondaire, car il s'agit de contenir une épidémie déjà en cours, dont la prévention primaire n'a pas fonctionné ou n'a pas été effectuée. Le confinement ne peut concerner que des maladies aiguës, car son niveau de contraintes sociales et de conséquences économiques n'est pas vivable plus de quelques mois ; or, une maladie infectieuse chronique et contagieuse, comme la tuberculose, évolue sur des mois et même des années : un confinement de quelques semaines serait insuffisant et inutile, et un confinement de six mois ou plus, catastrophique.

Le confinement sur la sellette : la contestation de son intérêt prend de l'ampleur

Le confinement est une méthode épidémiologique d'intervention en santé publique qui a fait la preuve de son efficacité. Il est utilisé pour contenir les épidémies frappant les élevages d'animaux.

En santé publique, le confinement a pour objectif celui de freiner la diffusion d'une épidémie aiguë dans une population, afin d'en réduire la morbidité (nombre de cas de maladie) et la mortalité (nombre de morts), ainsi qu'éviter de saturer et même de déborder l'offre de soins, particulièrement de lits d'hospitalisation.

C'est une méthode initialement empirique, qui s'appuie aujourd'hui sur une modélisation mathématique.

Ce document vidéo réalisé par l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) expose de façon claire et visuelle les principales approches pour lutter contre l'épidémie CoVid-19 :

Début mai 2020, le nombre cumulé de cas de maladie CoVid-19 en France s'élève à un peu plus de 130 000 et le nombre de décès à un peu plus de 25 000. Or, l'estimation effectuée par des épidémiologistes de l'école des hautes études en santé publique (EHESP) de Rennes aboutit au nombre d'environ 60 000 décès évités en France, grâce au confinement. Mais ce n'est qu'une simulation mathématique et il faut prendre ce résultat avec réserves, car ce type de simulation mathématique commence à se multiplier dans différents pays et les résultats divergent sensiblement d'une étude à l'autre.

L'évolution de la crise sanitaire inaugurale dans la ville de Wuhan

Il est manifeste aujourd'hui que les données chiffrées communiquées par la Chine et reprises par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) sont complètement fausses. Il est également manifeste que, au moins dans cette affaire, l'OMS est entièrement acquise à la cause de la Chine, ce qui est vraiment préoccupant ; son directeur général ne semble en vérité pas très à la hauteur de la situation et c'est affligeant. Il paraît logique que, plus la pandémie prendra d'ampleur et sera grave, et plus on cherchera à dissimuler la succession d'erreurs commises à son début, dans la ville de Wuhan.

À Wuhan, les Chinois ont certes imposé un confinement de la population du 23 janvier au 7 avril 2020, mais avec un retard important par rapport au début réel de l'épidémie. L'épidémie aurait officiellement commencé à Wuhan en décembre 2019 avec une première notification à l'OMS le 31 décembre et un premier signalement de décès le 11 janvier. Bien qu'il soit ardu de connaître la vérité, tout laisse supposer que l'épidémie aurait en réalité commencé courant décembre et peut-être même avant. Et la date du 11 janvier pour le premier signalement de décès laisse rêveur, sachant ce que l'on observe actuellement dans les pays frappés par la pandémie. Des étudiants français à l'université de Wuhan ont témoigné de ce qu'ils ont vu et vécu sur place : ils parlent de décès en grand nombre.

Parlons vrai : le confinement à lui seul est incapable de mettre fin à une épidémie et encore moins d'éradiquer un virus, a fortiori un virus comme ce SARS-CoV-2. Il ne peut que ralentir la progression d'une épidémie ; en revanche, s'il est associé à d'autres mesures préventives (vaccination, prophylaxie médicamenteuse…), il peut permettre son contrôle efficace.

À Wuhan, on a assisté à une deuxième vague épidémique après le début du déconfinement, mais cette fois encore, il est impossible d'obtenir des données numériques authentiques : les dirigeants chinois mentent à leur peuple, à l'OMS et au reste du monde ; on le sait bien, mais on a toujours du mal à l'admettre.

Toujours est-il qu'un confinement indifférencié ne permet pas à lui seul de venir à bout d'une épidémie, du moins dans la grande majorité des cas. Il faut nécessairement qu'il soit associé à d'autres mesures préventives.

Atlantico : Sur le plan sanitaire, quelle note donneriez-vous au gouvernement face à sa prise en charge de :
la mise en place d'un dispositif de contrôle sanitaire à même de protéger efficacement la population (masques, tests, mesures de quarantaine) ? 
4/10

Stéphane Gayet : Le gouvernement français s'est vu assez rapidement débordé par l'arrivée imprévue de cette épidémie hors du commun. Le changement de ministre chargé de la santé quelque temps avant y a certainement contribué : on est passé d'une interniste hématologue expérimentée et ayant occupé des postes à haute responsabilité, à un neurologue avec moins d'expérience.

Avec ce virus SARS-CoV-2, on n'a pas droit à l'erreur.

Il est permis de penser que les conseillers mis à contribution sur le plan des décisions de santé, n'aient pas été judicieusement choisis ; il est probable que leur expérience et leur expertise en infectiologie ait été insuffisante ; il est aussi possible que leurs avis n'aient pas été tout à fait pris en compte.

La prévention secondaire essentielle, avec la CoVid-19, repose sur la distance physique (1,50 mètre), le port du masque et le contrôle individuel de ses gestes (se laver ou se désinfecter les mains avant de les porter à une muqueuse faciale ou avant de toucher quelque chose qui va entrer en contact avec l'une de ces muqueuses).

La communication a été hésitante, parfois maladroite et inappropriée. Il est évident que l'on a manqué très rapidement et même cruellement de masques, tant et si bien que la communication s'est tournée vers les gels hydroalcooliques, faisant de ce virus respiratoire un virus soi-disant environnemental.

En matière de tests virologiques, ils ont été mis à disposition de façon réglementée et sélective, avec une vraie parcimonie.

Tout ceci s'inscrit dans une politique immature et louvoyante. La note de 4/10 paraît justifiée.

L'assistance aux hôpitaux publics : 6/10

Stéphane Gayet : Alors que les mesures à destination du grand public ont été d'une façon générale assez inadaptées et décevantes, des efforts ont été faits en direction des établissements publics de soins chargés d'accueillir et de soigner les malades atteints de CoVid-19. Les capacités en lits de réanimation ont été fortement accrues, les parcs d'équipements médicaux ont été revus à la hausse et les stocks de dispositifs médicaux consommables considérablement augmentés, nonobstant les retards de livraison conséquents.

Sur le plan des personnels médicaux et paramédicaux, beaucoup a été fait également : recrutements, appels à des bénévoles, redéploiements internes, déplacements de volontaires vers les villes les plus atteintes, soutien et valorisation des soignants exerçant en première ligne et promesse de compensations financières. La note de 6/10 paraît juste.

L'organisation du déconfinement : 5/10

Stéphane Gayet : Le déconfinement est un gros point faible. Annoncé par le chef de l'état, sans réel accord avec le Conseil scientifique de la CoVid-19, il constitue un point critique à haut risque de la gestion de l'épidémie.

Tout permet de penser que la date du 11 mai a été lâchée pour mettre fin à l'impatience et la grogne ambiantes. Mais ce 11 mai approche à grands pas dans l'incertitude et il faut bien le dire le brouillard.

Les cartographies de la France avec une échelle colorée en trois niveaux, récemment publiées, de lecture peu intuitive et qui plus est changeantes d'un jour à l'autre, n'ont pas vraiment contribué au rassurement de la population.

Le confinement a été mis en place avec retard – en grande partie du fait des élections municipales – et insuffisamment de préparation ; le confinement s'est plus ou moins bien déroulé ; le déconfinement s'annonce acrobatique et périlleux.

Tout semble s'accélérer depuis 7 à 10 jours concernant le déconfinement, mais les perspectives restent bien floues en dépit des précisions qui sont apportées chaque jour. Avec les efforts de précision et de clarification qui ont été faits récemment, on peut justifier la note de 5/10.

Atlantico : Sur le plan social, quelle note donneriez-vous au gouvernement dans sa prise en charge de :

L'aide à la population : 
7/10

Stéphane Gayet : L'aide apportée à la population a été beaucoup plus économique et financière que sanitaire. Il faut reconnaître que le gouvernement s'est multiplié en annonces sociales, de manière à aider socialement et financièrement les personnes les plus pénalisées par ce confinement général. On a pris en compte la plupart des situations et beaucoup a été fait, sur le plan statutaire, salarial, fiscal, bancaire, assurantiel… Dans ce domaine, les pouvoirs publics ont été à la hauteur et la note de 7/10 paraît juste.

L'éducation aux gestes barrières : 4/10

Stéphane Gayet : Une majorité de personnes déplore une communication succincte et peu adaptée. Le confinement a été insuffisamment et mal accompagné par les autorités. Un regard sur les messages pédagogiques délivrés par d'autres pays francophones est frappant : une approche plus concrète et plus précise, expliquant en détail le bien fondé de toutes les mesures.

On peut affirmer que la pédagogie est décevante. On a peur d'expliquer les choses en long, en large et en travers, alors que c'est pourtant nécessaire pour beaucoup de personnes. Ce n'est pas prendre les Français pour des demeurés, que de leur préciser ce que sont les virus, les microgouttelettes de mucosités, leur taille, leur densité, leur portée, leur trajectoire et leur évolution dans une pièce, la résistance et la fragilité physiques des coronavirus, la dose minimale infectante (DMI), les portes d'entrée et les modes de contamination, l'incubation, l'invasion, la phase d'état et les complications d'une infection virale, etc. Au début de la campagne d'information du ministère chargé de la santé, les messages comportaient la recommandation suivante « Se laver ou se désinfecter les mains toutes les heures », ce qui est absurde ; ensuite, on est passé à « régulièrement », ce qui n'est pas plus adapté et même infantilisant.

Avec cette communication trop schématique et peu efficace, la note de 4/10 paraît appropriée.

La gestion du confinement : 5/10

Stéphane Gayet : En plus d'une pédagogie inadaptée et insuffisante, l'accompagnement des Français dans cette aventure exceptionnelle qu'ils n'ont pas voulue et qui a commencé assez brusquement, est perfectible. On a pu constater que beaucoup de gens n'avaient, soit pas compris, soit pas admis les mesures préventives demandées, lors de leurs sorties du domicile, d'où une certaine confusion, devant la coexistence de personnes observantes et de personnes non observantes des règles prescrites.

Dans les magasins d'alimentation et les distributeurs de carburants : des employés avec ou sans masque, que ce soit dans les rayons ou aux caisses ; des adolescents et adultes jeunes dans une attitude de provocation, parlant bruyamment et sans masque ; et personne pour les rappeler à l'ordre.

Tout cela laisse une impression de gestion désordonnée, brouillonne et insatisfaisante, en tout cas de gestion mal encadrée. Il n'est pas possible de mettre plus de 5/10 à cette question.

Sur le plan économique, quelle note donneriez vous au gouvernement face à sa prise en charge de  :

La reprise du travail : 3/10

Pierre Bentata : La note peut sembler sévère, mais il faut se mettre à la place d'un entrepreneur. L'activité entrepreneuriale est par risquée par nature. Afin de développer son activité, un chef d'entreprise a besoin de pouvoir prévoir un minimum la situation politique future ainsi que les évolutions réglementaires et législatives. 

Stabilité des règles et de la décisions politiques sont des critères déterminants de la croissance. 

De ce point de vue, le gouvernement a failli. Il  Ses tergiversations et ses revirements rendent la situation illisible pour un entrepreneur. Qui sait avec certitude quand il pourra reprendre son activité? Pratiquement personne. 

Par ailleurs, chaque jour apporte son lot de nouvelles propositions. Dernière en date, la nécessité d'avoir 4 mètres carrés par employé au moment de déconfinement, ce qui contraint des milliers d'entrepreneurs à repenser l'organisation de leurs locaux 6 jours avant une éventuelle reprise. C'est absurde, et impossible pour un grand nombre de petites entreprises dans des secteurs qui nécessitent une proximité entre les employés.

Le même manque de clarté demeure quant aux déplacements en transport en commun de toutes les personnes qui travaillent, notamment en Ile de France. Comment va-t-on gérer les flux? Enfin, la volonté de limiter les déplacements à moins de 100 kilomètres crée une incertitude supplémentaire pour toutes les entreprises ayant des salariés qui effectuent des déplacements professionnels ou vivent et travaillent dans des régions différentes. Bref, du point de vue d'un entrepreneur, la période de confinement n'a pas permis d'y voir plus clair, ce qui augmente le risque de l'activité et réduit les perspectives de croissance. 

L'aide aux entreprises : 5/10

Pierre Bentata : Le bilan est plus mitigé sur ce point. Le gouvernement a bien agi, et rapidement, en ce qui concerne les reports de charges ainsi qu'en assumant financièrement le chômage partiel d'un grand nombre d'entreprises. De plus, il a annoncé dès le départ que tout serait mis en œuvre pour éviter les faillites. De quoi rassurer les entreprises, même si la situation économique rendait une telle promesse totalement fantaisiste.
En revanche, toutes ces mesures s'avèrent déjà inefficaces pour les plus petites entreprises et les indépendants, car ceux-là ne pourront supporter un report de charge. Quitte à vouloir soutenir toutes les entreprises, "coûte que coûte", il aurait mieux valu les exonérer de charges, tout simplement.

Enfin, et c'est le point essentiel, le gouvernement n'a pas pris la mesure de la crise économique qui s'annonce, parce que personne en son sein n'a compris à quelle point notre économie était déjà branlante avant l'épidémie. La situation économique d'avant crise était caractérisée par l'existence d'un grand nombre d'entreprises surendettées, ne générant pas suffisamment de flux de trésorerie. Ayant ignoré ce phénomène, le gouvernement a voulu aider toutes les entreprises sans distinction au lieu de cibler celles dont les fondamentaux étaient sains, créant ainsi un risque de surendettement encore plus grave et à moyen terme de faillite en cascade. Suivant la même logique, le gouvernement a tenté d'agir directement, alors qu'il n'en avait ni les moyens financiers - car lui-même surendetté - ni l'expertise, au lieu de favoriser l'action des banques, bien mieux placées pour identifier les entreprises à accompagner. Autrement dit, pour avoir une bonne note, l'Etat aurait dû redonner plus d'indépendance aux banques, exonérer d'impôts les entreprises et faciliter les procédures de liquidation. La crise aurait alors était plus violente, mais très courte. Faute d'avoir suivi cette stratégie, nous allons subir une crise longue, marquée par une véritable défiance des entreprises les unes envers les autres. 

L'aide aux ménages : 6/10

Pierre Bentata : Très rapidement, le gouvernement a annoncé des mesures exceptionnelles d'aides aux ménages, ce qui est une bonne chose pour rassurer la population et éviter une thésaurisation massive. Voilà pour le bon point.

Néanmoins, on peut relever deux défauts dans ces mesures. Sur le plan purement économique, la volonté de soutenir la consommation dans un contexte de blocage de l'offre - puisque le confinement met l'économie à l'arrêt - n'envoie pas le bon signal aux entrepreneurs et aux consommateurs, créant l'illusion que le problème actuel est la faiblesse de la consommation. Ce qui crée un problème de communication: comment expliquer à présent qu'il va falloir soutenir les entreprises et que c'est à travers la reprise de leur activité qu'on soutiendra l'emploi et donc la consommation? Ce hiatus promet de beaux conflits sociaux à venir. 

La maîtrise de l'inflation : 6/10

Pierre Bentata : Sur ce point, on ne peut que déplorer l'absence de communication du gouvernement et son rôle de leader des pays endettés au niveau européen. Cependant, dans notre contexte européen, il faut bien admettre que le gouvernement n'a aucune marge de manœuvre pour maîtriser l'inflation. Celle-ci ne peut être contrôlée qu'à l'échelle de la zone euro, et dépend fondamentalement de la stratégie de la Banque Centrale Européenne. De plus, on ne peut pas trop en vouloir à notre gouvernement de ne pas s'intéresser à la question de l'inflation car l'expansion monétaire qui a succédé à la crise des subprimes n'a pas eu d'effet inflationniste. Aussi, on peut comprendre que le gouvernement s'en désintéresse, même si sur le fond, il s'agit d'une erreur grave, car l'inflation s'est simplement muée en surendettement et en euphorie sur les marchés financiers. Mais pour le voir, le gouvernement aurait besoin de ministres ayant une formation d'économiste. 

Reprise économique : 3/10

Pierre Bentata : Pour l'ensemble des raisons évoquées précédemment, la reprise sera lente et certainement pas à mettre au crédit du gouvernement. Bien sûr, la reprise ne dépendra pas uniquement, très peu en réalité, des actions du gouvernement. Pour autant, aucune action précise n'a été annoncée qui favoriserait cette reprise. D'abord, Bruno Le Maire avait évoqué une relance qui ressemblait à une stratégie keynesienne; erreur sur laquelle il est heureusement revenu. Mais depuis, la communication du gouvernement a été si mauvaise qu'elle a fait plongé le climat des affaires et le moral des entrepreneurs. Sur ce point, évoquer régulièrement une possible augmentation des impôts relève presque du sadisme à l'endroit des entreprises. A cet égard, le gouvernement n'a jamais soutenu explicitement les actions des grandes entreprises qui ont fourni des masques, produits des gels hydroalcooliques et fabriqué des embouts de respirateurs. Du point de vue économique, on ne peut que déplorer le peu de cas qui a été fait des actions de nos grandes entreprises que sont Pernod-Ricard, LVMH, Décathlon ou encore Chanel.

Autre erreur majeure, le déconfinement qui n'en est pas un. Alors que tous les pays "déconfinent", et que de nombreux pays ont subi un confinement bien moins stricte, le gouvernement ne cesse de tergiverser. Sortant du confinement après leurs homologues de tous les pays, nos entreprises risquent d'accuser un retard irrattrapable. Et cela, d'autant plus que rien ne semble être mis en œuvre pour affronter la crise économique qui arrive. En effet, le gouvernement n'a jamais communiqué sur les risques d'une crise financière majeure dans les mois à venir, ni sur les risques d'inflation résultant de la politique monétaire des grandes banques centrales du monde. En résumé, tout le monde le sent bien, le gouvernement semble à court d'idée pour accompagner une reprise qu'il ne cesse d'invoquer comme un mantra. "

Les injonctions contradictoires des autorités ( travaillez / ne travaillez pas ) ne risquent-elles pas de provoquer un appauvrissement massif similaire à celui de la révocation de l'Édit de Nantes ?

Pierre Bentata : Je ne sais pas si le parallèle est le bon. Dans notre situation, le gouvernement n'a forcé personne à quitter le pays et n'a encore spolié personne en particulier. Pour autant, il est évident que les volte-face permanentes du gouvernement sur la reprise de l'activité auront un effet délétère sur l'économie. On ne peut demander aux Français de retourner au travail tout en voulant régir la moindre parcelle de leur activité professionnelle. A cet égard, l'absence de soutien à Amazon est éloquent. Alors que les employés demandent à poursuivre leur activité, on laisse une poignée d'individus provoquer la fermeture des sites avant d'annoncer la création d'une plateforme gérée par la Poste. Et cela, en dépit de la plus grande efficacité d'Amazon. C'est vraiment l'esprit Minitel!

Plus généralement, il faut se mettre à la place des entreprises étrangères. Dans un contexte de grands bouleversements stratégiques qui va nécessiter de trouver de nouveaux partenaires et de choisir de nouveaux lieux de production, quelle entreprise préférera la France à l'Allemagne, à la Suisse ou aux Pays-Bas pour ne citer qu'eux? Un pays dans lequel les règles sont devenues si instables ne peut sortir gagnant des évolutions à venir. 

Pierre Bentata vient de publier "Libérez-vous !" aux éditions de L'Observatoire

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