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Les pharmaciens partent dans une guerre (quasi) perdue d’avance contre Amazon et le e-commerce
©PHILIPPE HUGUEN / AFP

Arrière-garde

La ministre de la Santé a été obligée de les rassurer. Le e-commerce ne leur fera pas concurrence. Mais le combat est perdu d’avance, les pharmaciens feraient mieux de se battre pour se renouveler. Les besoins sont énormes.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Les pharmaciens ont obtenu quelques garanties de la ministre de la Santé pour que le e-commerce ne vienne pas leur mordre les chevilles en se mettant à vendre des médicaments.  Les pharmaciens redoutent que les grands du E-commerce et la grande distribution s’engouffrent dans un secteur lucratif dont ils ont le monopole.

Et pourtant, c’est un combat d’arrière-garde que les pharmaciens mènent aujourd’hui. Comme dans beaucoup de pays étrangers, les Leclerc, les Carrefour et les Auchan sont fin prêts à ouvrir des rayons de pharmacie, tout comme Amazon.

Pour l’heure, ils n’ont le droit que de vendre de la parapharmacie mais quand les pharmaciens prétendent qu‘ils défendent et protègent le consommateur, quand ils expliquent que le médicament n’est pas un produit comme les autres. Qu’il est fragile et sensible et même dangereux, qu‘il doit être prescrit sur ordonnance par un médecin et distribué par un professionnel de la pharmacie qui va apporter un service. Les pharmaciens ont mille fois raison mais la réalité, c’est qu’ils demandent surtout que l’Etat protège leur business de cette concurrence qu’ils trouvent déloyale.

Donc le combat est perdu d’avance. Rien n’empêchera dans l’avenir les grandes chaines de distribution d’installer des pharmaciens dans les hypers pour garantir la vente des médicaments prescrits. Rien ne les empêche d’installer des pharmacies dans les galeries marchandes en voisin du magasin d’épicerie.

Quant à la concurrence du e-commerce, elle est inéluctable. On peut déjà avoir aujourd’hui une téléconsultation, c’est-à-dire avoir un rendez-vous avec un médecin et un entretien avec au bout de la consultation via internet, une ordonnance et même un arrêt de travail « de 3 jours en 3 minutes ».  

Techniquement, l’ordonnance de prescription pourrait très bien aller dans un e-commerce qui livrerait les produits nécessaires.

Les pharmaciens vont perdre ce combat et ils demandent à la ministre de la Santé de les aider à s‘opposer à un mouvement qui paraît inéluctable.

Le pharmacien peut encore faire de la résistance, mais mieux vaudrait l’aider à prendre des initiatives pour développer son activité. A libérer le champ d’exercice. Le potentiel est énorme.

Le pharmacien fait partie de la chaine de production de santé. Il est formé pour cela et il est équipé. Cette chaine de production est menacée de faillite par excès de conservatisme. Les médecins qui sont producteurs des valeurs de santé ont tellement protégé leur position de monopole, ils ont tellement élevé des barrières techniques à l’entrée que le secteur de la santé est menacé. Les médecins sont débordés, les infirmières sont asphyxiées et une majorité des personnels refusent de faire de la médecine de ville. Du coup, les hôpitaux sont sursaturés dans une France qui laisse se créer des déserts médicaux.

Dans cette situation là, les seuls acteurs qui restent debout, disponibles et compétents sont les pharmaciens. Les pharmaciens, après 7 ou 8 années de formation très spécialisée, sont parfaitement capables d’élargir leur champ de compétence.

Le pharmacien délivre des médicaments sur ordonnance, mais l’essentiel de son espace commercial est occupé par de la parapharmacie. Son vrai métier est aussi d’apporter un service, un conseil et peut être une consultation. Il a l'expertise pour être un des auxiliaires de santé les plus utiles et cela partout en France, en ville comme en campagne. Il est parfaitement capable de consulter, de faire les premiers soins, de faire des prélèvements de sang et même de soigner les pathologies très simples. Exemple, pourquoi faut-il après avoir acheté le vaccin contre la grippe, aller chez le médecin ou appeler une infirmière pour que la piqure soit faite ? D’une façon générale, le pharmacien est parfaitement compétent et crédible pour assurer des soins de première urgence. Resterait à régler la question du financement, mais ça ne doit pas être insoluble. Et ça sera forcément moins cher que tous les systèmes qui existent et qui sont embouteillés.

Il faut être en France pour accoucher de systèmes aussi bloqués. Il faut être en France pour penser que le conseil de l’Ordre travaille pour le progrès de la santé publique. Parce que quand des professions aussi importantes que celles qui concourent à la santé se referment sur leur pré carré, au nom de la nécessité de protéger le patient, personne n’est dupe. Ces professions-là protègent leur zone de confort avec un numerus clausus qui protège leur rente de situation.

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