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Conforama va mal, Casino va mal... Mais Carrefour, Auchan, Leclerc, Système U ne vont pas beaucoup mieux. Que faire pour sauver la grande distribution ?
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Atlantico Business

La grande distribution française va être le plus gros dossier industriel et social dans les deux années qui viennent. L’annonce de la suppression de 1800 emplois chez Conforama n’est que le début d’une longue descente aux enfers... La montée en puissance d’Amazon ne fait que commencer.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Amazon crée 1500 emplois nouveaux mais Conforama a annoncé près de 2000 suppressions d’emplois.

Le distributeur de meubles prépare une restructuration massive qui se traduira surtout par la fermeture de nombreux magasins, dont deux à Paris. Ce groupe a été mis en vente, il y a plus de six mois par son propriétaire Steinhoff, mais les banques chargées de l’opération ont beaucoup de mal parce que l’entreprise n’est pas en bon état. Les tentatives de rapprochement avec le groupe Casino, et notamment la création d’une centrale d’achat, n’ont pas produit de résultats probants.

Mais du côté Casino, les dirigeants s’interrogent aussi beaucoup sur l’avenir, la maison mère, la holding de tête a accumulé beaucoup de dettes, la dette financière nette France atteint encore 2,7 Milliards d’euros. Pour éviter d’étouffer Charles Naouri le président fondateur cherche des financements aux quatre coins du monde. Il lui faut trouver des alliés, ou mieux vendre des emplacements, fermer des points de vente et céder des filiales. Il y a de très belles pépites dans ce groupe, Monoprix, Franprix, C-discount, mais les céder reviendrait à affaiblir le navire . C’est un peu la quadrature du cercle.

Parce que dans cette situation-là, on sait très bien ce qui se passe. Les fonds spéculatifs et les fonds vautours débarquent et dépècent le groupe en le vendant à la découpe pour récupérer le maximum d’actifs vendables.

Cela dit, la situation du groupe Carrefour et celle du groupe Mulliez ne sont pas aussi florissantes qu’elles l’ont été dans le passé.  

Les seules enseignes qui pourraient donner l’impression de mieux se porter sont les groupes associatifs, les centres Leclerc, Intermarché ou Système U, qui sont d’origine coopérative ou associative. En bref, ces groupes sont constitués d’unités indépendantes ou de franchises. Ils ont en commun la marque, l’enseigne, la centrale d’achat mais le point de vente et le terrain appartiennent à une personne ou une famille.

Le pouvoir est donc très décentralisé et chaque directeur de magasin se comporte comme un chef d’entreprise qui peut gérer à son niveau très individuel, les aléas de la conjoncture. Disons qu’ils sont plus flexibles.

N’empêche que c’est le concept même de grande distribution qui a du plomb dans l’aile.

D‘abord, parce que les prix bas qui ont été les principaux moteurs du développement ne correspondent plus à la demande du consommateur qui recherche de la qualité. Ajoutons à cela que des prix bas en période de basse conjoncture absorbent l’essentiel des marges. Le consommateur veut autre chose. Il vaut du bio, il veut de l’originalité, il veut du service.

Ensuite, ces hypermarchés qui sont installés à la périphérie des villes sont tributaires des moyens de mobilité. Or, 90% des consommateurs se déplacent en automobile. Ils sont tributaires des prix du pétrole et des courants écologiques qui commandent de vivre autrement.

Enfin, il n’est pas sûr que le concept de l’hypermarché généraliste soit toujours d’actualité chez le consommateur qui préfère les marques indépendantes de l’hyper.

Mais la vraie raison du déclin, c’est évidemment la montée en puissance du e-commerce et notamment des formes les plus abouties comme Amazon. Amazon est devenu en moins de dix ans, la société commerciale la plus puissante du monde. Son équation est très simple :

1) Amazon vend au meilleur prix le plus de produits et de services possibles

2) Amazon livre en un temps record (souvent le lendemain) 90% de ses références

3) Amazon a des plateformes logistiques sur lesquelles il stocke de quoi répondre à la demande très vite.

4) Amazon est aussi une plateforme accessible dans le monde entier y compris en Chine, sur laquelle sont présents des produits et des services offerts par des entreprises qui utilisent Amazon comme vitrine commerciale.

En fait, Amazon a deux type de clients, les clients finaux, consommateurs et les clients fournisseurs qui paient pour être référencés et qui versent une commission à Amazon sur le commerce réalisé via la plateforme.

Avec une telle organisation, Amazon est en mesure de prendre le pouvoir sur l’ensemble de l’appareil commercial de la planète.

Alors, beaucoup de distributeurs à forte enseigne ont tiré quelques leçons du succès d’Amazon, la Fnac par exemple a beaucoup évolué, Ikea le spécialiste du meuble consent actuellement un énorme effort d’investissement pour fidéliser ses clients convertis au e-commerce.

Les constructeurs automobile préparent eux-aussi une offensive sur internet mais d’autres comme Conforama sont restés à la traine.

La vraie question est de savoir pourquoi les grands de la grande distribution sont aussi en retard. Casino, Carrefour, Leclerc, Système U, Auchan ont tous installé des drive-in, c’est à dire des lieux où on peut venir retirer les marchandises commandées et achetées sur le net. Ces lieux fonctionnent assez bien, mais ils cannibalisent l’hyper qui est installé à côté. Plus, grâce encore, la formule des Drive-in  ne va pas jusqu’au bout de la logique. Ce n’est que le prolongement du magasin.

Le groupe Casino a beaucoup investi dans le digital et le e-commerce avec notamment Cdiscount. Le groupe Mulliez a dû développé des filiales spécialisées sur des créneaux particuliers avec Decathlon ou Boulanger, Carrefour aussi a investi dans la digitalisation... mais tous ces groupes restent plombés par le poids de la grande distribution traditionnelle.

D’où les risques de casse sociale qui ne manqueront pas de se multiplier dans les deux ans.

Le seul moyen de sortir la tête de l’eau serait d’investir beaucoup plus massivement dans le digital en modifiant la chaine de valeur. C’est d’ailleurs ce qu’a fait Walmart aux Etats-Unis. Le plus grand distributeur du monde était il y a dix ans menacé par le déclin. Depuis 5 ans, il a investi massivement, changé son organisation, sa structure et son référencement. Aujourd’hui, Walmart est sorti de la zone de risque et de danger. C’est le seul à pouvoir challenger avec Amazon.

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