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Albert Einstein : "Dieu ne joue pas aux dés avec la vie. La science sans religion est boiteuse, mais la religion sans la science est aveugle"
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Atlantico Business

Aude Kersulec

Aude Kersulec

Aude Kersulec est diplômée de l' ESSEC, spécialiste de la banque et des questions monétaires. Elle est chroniqueuse économique sur BFMTV Business.

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Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Dans cette série de l’été consacrée à l’histoire des plus grandes personnalités scientifiques, nous avons choisi de vous les présenter sous la forme d’interview. Interviews imaginaires évidemment mais pour le moins plausibles. Le plaisir du journaliste qui se fait plaisir en écrivant lui même les réponses ont consisté aussi à ne pas trahir l’historien qui lui, fait parler les écrits, les témoignages et les documents. Donc que l’historien nous pardonne de quelques imprécisions. Notre intention est aussi noble que la sienne, faire connaître ceux qui ont changé le monde en profondeur par leur réflexion, leurs découvertes ou leur imagination. Après avoir rencontré Christophe Colomb, Alexander Fleming, le père de la médecine moderne, après une visite chez le baron Haussmann et chez Marie Curie, voilà aujourd’hui les confidences de Albert Einstein.

Albert Einstein est considéré aujourd’hui comme l’homme le plus intelligent du monde et de l’histoire de l’humanité. A tel point qu’à sa mort, son cerveau fut conservé et récupéré par des médecins pour être autopsié et analysé afin de déterminer en quoi il pouvait être différent du cerveau d’un être humain ordinaire. Einstein est mort en 1955 à l’âge de 76 ans et depuis cette date, les médecins qui se sont penchés sur ce cerveau exceptionnel ont bien découvert qu’il avait un nombre élevé d’«astrocytes ». Les astrocytes sont des cellules gliales du système nerveux central. Elles ont une forme étoilée, d'où leur nom. Leur fonction est de protéger les neurones et de les alimenter. On a découvert récemment qu’elles avaient un rôle important dans la régulation du rythme biologique. Mais les scientifiques n’ont toujours pas réussi à déterminer ce qui dans le cerveau d’Einstein conditionnait son extraordinaire puissance d’analyse et de réflexion, à moins que le résultat de leur recherche soit considéré par les autorités américaines comme un secret d’Etat.

Il est considéré comme le plus grand scientifique de tous les temps, mais sa renommée dépasse le monde des scientifiques parce que sa réflexion a surtout porté sur la vie, son évolution et le sens de la vie.

Comme disait Jean D’Ormesson, pour savoir « d’où viens-je, où vais-je et dans quel état j’erre, il faudrait demander à Albert Einstein ». Sa culture, son parcours, ses recherches et ses prises de position politique, sociale et morale renvoient toujours à l'intelligence et au savoir. D’où cette réputation de savant aussi solide qu‘un roc.

Atlantico : Difficile de s’interroger (ou d’interroger Albert Einstein), l’œuvre est tellement vaste, prégnante. Si on résume et simplifie le travail d’Albert Einstein, on dit quoi ?

Albert Einstein : On ne dit rien, et on tire la langue comme je l’ai fait une fois dans ma vie à un photographe qui me demandait avec insistance de sourire. Mais pourquoi sourire ? Cette photographie a fait le tour du monde. J’ai travaillé sur le sens de la vie et la science m’a donné des pistes que j’ai essayées de partager. Notre problème est de découvrir les lois de la nature. Si Dieu existe, il n’a rien fait par hasard. Voilà à quoi j’ai consacré ma vie.

Si je résume, vous avez travaillez d’un côté sur l'infiniment grand, l'espace et le temps, et de l’autre, l’infiniment petit.

Albert Einstein : Moi si je résume, je vous dirai qu’il n'existe que deux choses infinies : l'Univers et la bêtise humaine... mais pour l'Univers, je n'ai pas de certitude absolue.

Plus concrètement, Albert Einstein, vous allez travailler sur les dimensions moléculaires, la structure de la matière, sur la composition de la lumière, et notamment les photons et enfin théorie qui vous rendra célèbre dans le monde entier, "la relativité”. A savoir que la matière et le temps qui passent ne sont pas des valeurs absolues, mais relatives. Donc elle évolue. La matière peut produire de l'énergie et on peut sous certaines conditions voyager dans le temps.

Pour l’ensemble de ces travaux, vous avez reçu le prix Nobel en 1921, discerné officiellement pour vos découvertes sur la lumière, mais en fait l’était aussi pour la théorie générale de la relativité. Sauf qu‘à l’époque, les Nobel n’en comprenait pas très bien la signification. E = mc², vous avez tenté de leur expliquer ?

Albert Einstein : J’ai écrit des articles expliquant l’équation, et des articles expliquant mes articles. E = mc², ça veut dire que l’énergie dégagée par une matière est incroyablement plus élevée que sa masse. C’est à dire qu’une petite quantité de matière, quand elle est détruite, peut déployer une énergie décuplée, car sa masse est multipliée par la vitesse de la lumière, l'une des grandeurs les plus impressionnantes de la nature, élevée au carré. Lors d’une fission, qu’un noyau se transforme en deux noyaux, comme c’est le cas pour l’atome d’uranium, la masse des deux nouveaux noyaux est légèrement inférieure à l’ancien noyau. Il y a donc une perte de masse qui se transforme en énergie, dans des quantités bien plus importante, c’est à dire multipliée par la vitesse au carré.

Voilà, ils ont fait à peu près la même tête que vous quand je leur ai expliqué, au comité. Ce n’est, bien sûr, qu’une partie de ma théorie de la relativité.

La réalité est que la théorie de la relativité va bouleverser notre conception humaine du temps, de l’espace et de l’univers. Et dans les années 1920, bouleverser aussi complètement la pensée scientifique dominée par Newton et la pensée philosophique qui était jusqu'alors imprégnées de concepts religieux. Vous, Albert, vous n‘aviez de place, ni pour les prières, ni pour les adorations. La seule foi qui vous animait est qu’il restait des lois de la nature à découvrir. L’opinion ne le sait pas parce que c’est très abstrait pour elle, mais vos travaux, si théoriques soient-ils, ont débouché sur des applications très concrètes : la géolocalisation, par exemple le GPS, n‘aurait pas été possible sans la connaissance de la relativité du temps. Le temps ne coule pas à la même vitesse dans l'espace que sur terre...

Albert Einstein : Je n’ai pas connu ce fameux GPS.... Mais la relativité du temps est facile à comprendre : placez votre main sur une poêle brulante pendant une minute, ça va vous paraître une heure. Asseyez-vous auprès d’une jolie fille une heure et ça vous semblera une minute.

Une façon de voir les choses... La géolocalisation précise, c’est à dire qui compte la différence entre le temps mesuré sur la planète et celui mesuré par les satellites de l’espace va rendre possible les objets connectés. Pareillement, tous ces travaux serviront à la mise au point de la télévision, des DVD, des communications laser et qui sait, demain de la téléportation ou des voyages dans le temps ?

Albert Einstein : Quelle imagination ! Mais vous n‘avez pas tort. Ça n’est pas la connaissance qui est le plus l’important, c’est l’imagination. Vous savez, j’aurai aimé faire des films de science-fiction ou même écrire le film de Poiré, Les Visiteurs…

Sérieusement, quand est-ce que vous avez contracté cette passion pour les maths et pour la science ?

Albert Einstein : Je suis né en Allemagne en 1879 à Ulm, vous connaissez, Ulm, la dépêche qui a provoqué la guerre de 1870. Enfin bref, je suis né dans un petit appartement, d’une petite famille de juifs non pratiquants, sauf que j’ai un oncle qui m'a appris le judaïsme. La religion me plaisait, à tel point que je ne mangeais pas de porc et je connaissais tous les chants juifs.

Jusqu’au jour, je devais avoir dans les onze ans, où on m’a donné une boussole, et cette boussole m’a fasciné. Cette force qui agissait sur l’aiguille à distance m’avait paru miraculeuse. Et puis, j’ai découvert des livres sur la géométrie qui, elle me paraissait tellement rationnelle, claire. Et puis, il y avait pas mal d’ingénieurs qui travaillaient avec mon père et ce dont ils parlaient m’intéressait plus que les textes d’Abraham, donc je n’ai pas fait ma bat-mitzvah et je me suis plongé dans le calcul intégral.

Donc Albert Eistein a été un bon élève ?

Albert Eistein : Non, on ne peut pas dire cela. Je m’insurgeais contre l’autorité des enseignants. Je préférais les livres. Je me souviens d‘avoir été renvoyé du lycée de Munich pour indiscipline au cours de grec. J’ai été admis à l’école polytechnique et fédérale de Zurich, puis à l’école cantonale d’Aarau en Suisse. Mais ça ne marchait pas très bien. Je me souviens qu’en 1900, on avait écrit sur le bulletin scolaire que j’étais incapable de suivre des cours, de prendre des notes et de travailler dans le respect de la discipline scolaire. Je me suis rattrapé sur les livres. Je dévorais tous les écrits de mathématiciens ou de physiciens, c’est d’ailleurs à ce moment-là, avec mes parents, qu’on a opté pour la nationalité suisse.

Le problème qui est apparu assez vite est que je n‘avais pas d’argent. Alors, il a fallu que je trouve un travail assez vite dans l’administration. En 1902, j’ai été embauché à l’Office des Brevets de Berne, ce qui m’a permis de vivre correctement tout en poursuivant mes travaux de recherche et de fréquenter des scientifiques comme Conrad Habit, à qui j’ai envoyé mon travail concernant les fondements de la théorie de la relativité et aussi ce que je pensais sur la lumière, avec l’hypothèse que la lumière soit autre chose que des ondes, mais des quanta.

Dix ans plus tard, j‘ai commencé à être reconnu par mes pairs, qui souhaitent m’inviter à l’université de Berlin. En 1909, je me venge sur l’école puisque je deviens professeur associé à l'université de Zurich, puis en 1911, à l'université allemande de Prague. En Belgique, j’ai rencontré Marie Curie, Max Planck et le français Paul Langevin.

En 1914, je me suis décidé à revenir en Allemagne, j’ai déménagé à Berlin où je suis devenu membre de l’Académie royale des sciences et des lettres. Berlin va me permettre de me consacrer tout entier à mes travaux de recherche.

A partir des années 1920, on imagine que la situation en Allemagne est devenue compliquée.

Albert Einstein : Compliquée, pas facile, en effet, d’autant que je militais depuis la première guerre dans les mouvements pacifistes. A ce moment-là, il y a beaucoup d’allemands à l’université qui se sont souvenus que j’étais juif. La sécurité pour moi n’était plus assurée, ma maison a été pillée par les nazis au début de 1933. J’ai tout quitté et je suis parti aux Etats-Unis, invité par Abraham Flexner, le fondateur et directeur de l’Institut de Princeton où j’ai commencé à travailler sur la gravité et l’interaction électromagnétique.

Vous étiez très célèbre aux USA, vous aviez déjà eu le prix Nobel ?

Albert Einstein : Oui, j’ai obtenu le prix en 1921. Ma vie était donc plutôt facile, sauf qu‘en1939, avec des collègues physiciens, on a écrit au président Roosevelt pour l’informer des travaux que nous avions menés sur la structure moléculaire de la matière et la possibilité de produire des masse d’énergie en scindant des atomes, cette fameuse E = mc². Vous avez compris qu‘on craignait que cette découverte soit exploitée pour fabriquer des bombes. On aurait du ne rien dire parce que Roosevelt a lancé le projet Manhattan avec Robert Oppenheimer, qui est le vrai "père" de la bombe atomique américaine.

Après la guerre, vous êtes resté aux Etats-Unis, mais vous vous êtes engagé dans la lutte contre la guerre froide et les discriminations raciales ?

Albert Einstein : En fait, je ne supportais pas cet équilibre de la terreur qu’il y avait entre le monde libre et l’empire soviétique. Je me suis donc battu contre la prolifération des armes nucléaires, parce que nous allions à la catastrophe. Je me suis aussi battu contre les problèmes raciaux aux Etats-Unis et tout cela m’a valu d’être attaqué par Joseph McCarthy. Mais en réalité, on m’empêchait de travailler.

Mais la communauté juive devait vous protéger, non ?

Albert Einstein : Mon engagement auprès des communautés juives et Israël est nuancé par mes opinions pacifistes. J’ai bien préfacé le recueil de témoignages sur l’extermination des Juifs en Russie par les nazis pendant la guerre. Mais en décembre 1948, j’ai contribué à l’écriture d’une lettre condamnant les massacres de Deir Yassin, commis par des combattants israéliens pendant la guerre de Palestine de 1948. Donc, je n‘étais pas dans une situation très facile. Disons que je n’étais pas attaqué des Juifs, mais pas protégé non plus.

Qu’est ce qui vous a servi de moteur en dehors de cette passion d’expliquer le monde tel qu’il est ?

Albert Einstein : Les idéaux qui ont guidé ma route et m‘ont donné le courage d’affronter la vie de tous les jours ont été la bienveillance, la gentillesse, la beauté et la vérité.

Je crois que le monde est dangereux à vivre ! Non pas tant à cause de ceux qui font le mal, mais à cause de ceux qui regardent et laissent faire. La vie, c’est comme une bicyclette, il faut avancer pour ne pas perdre l’équilibre.

Albert Einstein est mort d’une rupture d’anévrisme à l’âge de 76 ans. Bien qu’il eut énormément de succès, qu’il a rencontré un grand nombre de personnalités dans tous les domaines scientifique, politique et artistique, on lui connaît peu d’amis.

Il a été marié deux fois. Sa seconde épouse était aussi sa cousine. Il a eu deux fils mais les a très peu vu et s’en est assez peu occupé. Son fil, né en 1904, a vécu et travaillé en Californie. Le second est tombé malade à l’âge de 20 ans. Il souffrait d’une schizophrénie et a été interné dans un hôpital de Zurich. Albert Einstein a toujours refusé d’essayer de le faire soigner par la psychanalyse en dépit d’une relation assez forte qu’il avait avec Sigmund Freud. Les échanges de lettres avec le célèbre psychanalyste sont d’ailleurs très nombreux. Einstein aurait dit une fois à Freud, qu’il ne comprenait pas pourquoi fouiller ainsi dans l’inconscient des humains et d’ajouter : « croyez-vous que connaître le mouvement de tous les muscles qui composent nos jambes nous aiderait à mieux marcher ? ».

En fait d’après beaucoup de ses biographes, Einstein était très seul. On lui connaissait une amitié sincère avec la reine Elizabeth de Belgique avec qui il jouait du violon ou une relation orageuse avec George Bernard Shaw avec qui il rivalisait de bons mots.

Albert Einstein aimait les femmes jolies mais ne se liait pas très longtemps avec. Un jour de cocktail mondain où il rencontra Miss Monde à New-York, celle ci lui dit, aguicheuse :

- « Maitre, nous devrions faire un enfant. Je suis sur qu‘il serait génial. Il aurait ma beauté et votre intelligence, ça ferait une être exceptionnel.

- Sans doute, sans doute, lui dit Einstein, mais si c’était l’inverse ? »

Personne ne sait si la formule est véritablement de lui ou si elle a été inventée par Bernard Shaw qui l’a beaucoup racontée…

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