Gibraltar : la guerre, la vraie ?

Rappeler que l’Union européenne est à la base de la première paix durable dans l'histoire du continent déclenche souvent les sarcasmes, l'idée étant qu'à l'heure du McDo, de l’iPhone et d'EasyJet, la guerre, la vraie, est devenue un archaïsme de contrées sauvages tout juste bon à alimenter les JT.

Mais les Britanniques en sont déjà à suggérer qu'ils pourraient attaquer l'Espagne au sujet de Gibraltar, une presqu'île sans intérêt stratégique particulier, quand Mélenchon, notre souverainiste « progressiste » numéro un, indique gentiment aux Russes qu'ils pourraient envahir les pays Baltes sans que nous levions un sourcil parce que ça ne nous regarde pas.

On déniche même, dans la presse de caniveau, des amiraux pour évaluer le rapport de force militaire entre deux États ouest-européens comme s’il s’agissait d’un match de foot et pour envisager l’éventuel soutien qu’apporteraient les États-Unis à l’un des belligérants...

Le retour des nationalismes, le délitement des institutions de coopération, le repli égoïste et court-termiste, ce n'est pas juste un problème de différentiel de TVA ou de normes sur la courbure des bananes. L'arrivée au pouvoir de souverainistes de gauche ou de droite dans trois ou quatre pays clés, en même temps que la réactualisation d’une poignée de litiges frontaliers perçus comme pittoresques, produirait effectivement l'émergence d'une « autre Europe », mais elle ne serait pas belle à voir. Un certain Clausewitz l’avait déjà théorisé.