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Solidaires ou morts ! Les États de l’Union européenne au pied du mur
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Où va l'Europe ?

Il devait être question du Mécanisme européen de stabilité ce vendredi lors d'un sommet de la zone euro. Mais celui-ci a été annulé. La preuve que l'Europe peine à avancer de façon unie. Comment faire ?

Vivien  Pertusot

Vivien Pertusot

Vivien Pertusot est chercheur associé. Il a été responsable d'Ifri Bruxelles entre 2011 et janvier 2017. Il a coordonné le programme de recherche de l'Ifri "REcentrer la Sécurité Européenne et Transatlantique" (RESET) consacré aux politiques et coopérations de défense en Europe. Il a également été coordinateur du projet "Building Bridges between National Perspectives on the European Union".

Ses recherches portent principalement sur les questions de l'avenir de l'Union européenne, de politiques de sécurité et de défense en Europe et des relations entre le Royaume-Uni et l'Union européenne.

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Un nouveau sommet européen… et pourtant les dirigeants européens éviteront le sujet qui fâche : le Mécanisme Européen de Stabilité (MES). Etrange revirement ? Finalement, pas tant que cela. Tout ceci illustre l’avancée par l’absurde des décisions européennes, mais surtout la difficulté d’avancer ensemble.

Pourquoi un report de discussion sur le MES ?

En décembre dernier, les dirigeants européens avaient annoncé qu’ils réévalueraient en mars les conditions de financement du MES. Ce MES, c’est l’outil souvent étiqueté « pare-feu » de l’Union européenne pour venir en aide aux pays au bord du précipice. Son existence est en soi une avancée remarquable vers davantage d’intégration dans l’Union Européenne. Le traité de Maastricht avait gravé dans le marbre un rejet des sauvetages d’Etats en difficulté.

Pourtant, la crise grecque a précipité un changement avec la création d’abord du Fonds Européen de Stabilité Financière (FESF). Temporaire dans un premier temps, les Etats membres décident de le rendre permanent. La crise n’étant pas avortée, les Etats-membres accélèrent sa mise en place à 2012. Le problème des modalités de financement demeure. Les sommes évoquées sont énormes : 500, 750, 1000, voire 1200 milliards d’euro, mais pour être une bonne digue face à des torrents déchainés, c’est le minimum. La mise en défaut de la Grèce et l’éventuelle prolifération à d’autres pays seraient catastrophiques.

Cette pratique du sauvetage, l’Allemagne, notamment, l’a adopté à reculons : il fallait choisir entre la peste et le choléra. Aujourd’hui, l’Allemagne freine encore. Oui au MES, non à son renforcement – Berlin s’oppose à dépasser les 500 milliards.Cette opposition est vive pour deux raisons : l’Allemagne y est économiquement réticente et la situation politique interne pose un dilemme cornélien pour la chancelière Angela Merkel. Elle peut être consciente de la nécessité d’engager l’Allemagne davantage, mais elle doit pondérer une coalition fragile. Lundi, le Parlement allemand a approuvé le deuxième plan d’aide à la Grèce de 130 milliards d’euro, mais a accusé des défections dans sa majorité. Ainsi le gouvernement allemand a-t-il préféré reporter le sommet de l’eurozone qui devait avoir lieu vendredi afin de discuter du MES. Et aucun Etat membre ne viendra s’en plaindre : les marchés ne vont pas apprécier, mais il est préférable de calmer les braises en Allemagne plutôt que de mettre la chancelière en porte-à-faux !

Ce report ne peut cacher les obstacles auxquels l’UE doit faire face. Sans dramatiser à outrance, c’est bien le manque de solidarité entre Etats-membres qui refait surface. La question est simple, notamment pour des pays européens qui ont déjà fait les réformes difficiles afin d’enrayer des problèmes systémiques : pourquoi continuer à payer pour les erreurs des autres ?

A chaque pays membre de prendre ses responsabilités

Ce manque de solidarité est néanmoins à nuancer. En effet, la solidarité entre Etats requiert d’adhérer aux mêmes règles… et surtout de les appliquer. C’est loin d’être le cas. Aujourd’hui, pour sortir de cette crise, il faut prendre ses responsabilités : mettre en place des mesures d’austérité difficiles, davantage coopérer, engager des réformes de fond pour faciliter un retour de la croissance et améliorer la compétitivité des entreprises.

Les mesures d’austérité sont inévitables. Elles sont politiquement et socialement pénibles, mais il faut inverser la tendance. C’est dans cette logique que s’inscrit la signature du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance dans l’Union économique et monétaire (TSCG). Son angle d’attaque est de renforcer la gouvernance économique au niveau européen : mesures pour assurer une meilleure discipline budgétaire – face aux nombreuses entorses par le passé – et meilleure coordination des politiques économiques. Sa ratification est aujourd’hui un symbole de la volonté des Etats signataires d’aller de l’avant ensemble. Mieux se coordonner permet de mieux prévenir les risques, mais l’implication est ici financière : en cas de non-respect, les sanctions tomberont. Au niveau national, les Etats membres vont poursuivre les mesures difficiles de politique d’austérité dans un contexte social de plus en plus houleux. Malheureusement, il n’y a guère d’alternative viable.

Il ne faut pas oublier l’autre facette de cette pièce : la croissance. L’austérité ne fera pas rebondir les économies européennes. C’est tout l’objet de l’année 2012. Si 2011 a consacré l’austérité, 2012 doit rééquilibrer la balance. Etrangler les économies n’aura que des effets contre-productifs. Au niveau européen, les leviers d’action sont limités. La seule option est de discuter des solutions et d’inciter leur mise en place au niveau national : réforme des marchés du travail ; meilleure offre de formation pour les jeunes ; effort renouvelé en faveur des budgets de recherche et développement. Bref, aucune solution miracle, toujours davantage d’efforts sur le moyen terme, d’où l’urgence de s’attaquer à ces dossiers maintenant. Le souci de l’Europe est qu’elle stagne, que sa compétitivité est en berne et que l’innovation semble devenir un mirage. Une fois ces politiques complexes mises en place pourra-t-on vraiment envisager une solidarité entre les Etats-membres.

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