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And now, ladies and gentlemen, le célèbre duo Sarkozy-Hollande : les milieux d’affaires en sont convaincus et s’en inquiètent
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La semaine qui s’ouvre va le confirmer : les milieux d’affaires s’attendent à un duel Hollande-Sarkozy, mais ça ne les rassure absolument pas sur la capacité réformatrice du prochain quinquennat.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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A moins d’un miracle ou d’une crise extérieure extrêmement grave, les milieux d’affaires ne s’attendent pas à une situation politique qui permettrait de mettre en place les réformes nécessaires pour que la maison France puisse tenir le choc concurrentiel mondial dans les dix prochaines années. Comme beaucoup d’observateurs du marché politique, les chefs d’entreprise pensent qu’on se dirige tout droit vers un nouveau duel entre François Hollande et Nicolas Sarkozy. Du moins dans tous les débats et les consultations, qui auront lieu à partir de cette semaine jusqu'à la veille du second tour de la présidentielle. Les candidats qui s’affronteront à la finale ne sont pas évidents à deviner. Tout va dépendre de ce qui ressortira du premier tour. Front national ou pas, les jeux ne sont pas encore faits. Mais FN ou pas FN, on n’échappera pas au duel.

François Hollande, d’abord, sera candidat à la primaire de la gauche. Une décision qu’il annoncera officiellement le plus tard possible, mais qui ne fait plus aucun doute à personne. C’est ce qui ressort du livre qui sort cette semaine et qui rapporte des conversations privées mais enregistrées par deux journalistes, Antonin André et Karim Rissouli. Le président de la République fait un bilan assez complaisant de tout ce qui a marché pendant son quinquennat : la politique étrangère, la lutte contre le terrorisme, le Mariage pour tous et la loi Macron. Il est plus réservé et discret sur ses résultats économiques, mais on sent bien qu’il est à deux doigts d’expliquer aux Français que si la situation économique ne s’est pas aussi bien redressée qu’il eut fallu, c’est peut-être parce que la priorité a été donnée à l’ordre public et à l'équilibre de la société.

En fait, sa vraie chance est d’avoir fracassé le Parti socialiste, qui n’a plus personne de crédible à présenter comme alternative. Il reste bien quelques personnalités fortes, à la gauche de la gauche, comme Jean-Luc Mélenchon, Benoît Hamon, Arnaud Montebourg ou Cécile Duflot, mais toutes ces personnalités font d'abord des campagnes de publicité pour exister sur l’échiquier politique de la gauche et dans les médias plutôt que sur le podium de la primaire.

La meilleure preuve, c’est que beaucoup d’entre elles vont sauter la case primaire pour tenter directement le premier tour de la présidentielle, histoire de s'offrir deux ou trois mois de couverture médiatique supplémentaire. Ce sera sans doute le cas d’Emmanuel Macron qui, faute de militants, a un besoin urgent des journalistes. Macron, à qui les attentats terroristes ont fait beaucoup d’ombre, a réussi à percer le silence du 15 août en allant visiter le Puy-du-Fou et en y étant reçu par Philippe de Villiers. Avec un tel acteur pour lui donner la réplique, il était sûr de passer en boucle à la télévison avant le résultat des Jeux Olympiques. Macron a réussi son coup. Surtout qu'à cette provocation dans la forme, il a ajouté une transgression sur le fond, en disant qu’il n’était pas socialiste, ce qui a mis en joie tous ses amis du gouvernement. Consigne a d’ailleurs été donnée par Matignon aux cadres du PS et aux ministres de ne pas réagir publiquement. Les comptes se règleront plus tard. Et c’est sans doute pour être plus à l'aise avec lui-même que le ministre de l'Economie finira par quitter le gouvernement vers le 20 septembre, après la présentation de la loi de finances.

En bref, François Hollande ne sera pas gêné par la concurrence lors d’une primaire socialiste bien organisée par ses amis. Après la primaire, il sera toujours temps de négocier le soutien des uns et des autres, y compris de Macron, Montebourg ou Duflot. Les jeux sont donc faits.

Du côté de la droite, Nicolas Sarkozy annoncera cette semaine qu’il se présente à la primaire des Républicains en espérant bien être désigné comme le candidat unique de la droite. Personne n’en doute. Beaucoup de ses adversaires auraient déjà dealé une participation au quinquennat. Bruno Le Maire aurait déjà engagé des pourparlers avec Nicolas Sarkozy pour le soutenir en échange d’une promesse d’aller à Matignon. Il a raison, mieux vaut ne pas avoir d’ambitions modestes. Le problème est qu’il y a beaucoup de prétendants de sa génération pour aller à Matignon. François Baroin est de ceux-là, Laurent Wauquiez, Éric Woerth, Nathalie Kosciusko-Morizet... Le seul à ne pas s’agiter dans le bocal, c’est Alain Juppé, qui perd un peu de sa légitimité dans les sondages mais qui conserve un réel crédit pour négocier son soutien le jour venu. D’autant plus cher qu’il n'a rien revendiqué.

François Fillon, lui, continue de faire campagne et de vendre son programme qui est sans doute le plus élaboré, le plus cohérent et le plus responsable. Mais comme dit Nicolas Sarkozy, "on ne gagne pas une présidentielle sur un programme, mais on en a sans doute besoin après". François Fillon et ses amis pourront donc servir après. A l’Assemblée nationale, par exemple !

En bref, l'ancien président de la République part à la pêche pour être candidat à redevenir le président. Le calendrier des Républicains est plus que plein : après la déclaration de candidature de Nicolas Sarkozy, sans doute mercredi, Alain Juppé réunira ses supporters à Chatou, le 27 août, et François Fillon les siens de lendemain 28 à Sablé-sur-Sarthe.

Tout ce beau monde se retrouvera lors du campus des jeunes Républicains qui se tiendra à La Baule les 3 et 4 septembre. Peu probable qu’on les voit ensemble : ils se succèderont à la tribune, histoire de mesurer à l’applaudimètre leur cote d’amour chez les jeunes. Bref, du côté de Nicolas Sarkozy aussi les jeux sont fin prêts et tout le monde se prépare à l'affrontement.

Sur le terrain spécifiquement politique, il reste des inconnues pour mesurer ce que sera le premier tour de la présidentielle. L’inconnue Marine Le Pen, qui dispose d’une réserve de voix importante qui avait permis à Nicolas Sarkozy de l’emporter. L’inconnue François Bayrou, qui a toujours dit que si Alain Juppé ne gagnait pas la primaire, il s’engagerait au premier tour, or Bayrou pèse 13-14% d’un électorat qui peut faire pencher la balance à droite comme à gauche.

Cela dit, ce faisceau de certitudes politiques ne rassure pas les milieux d’affaires, et ce pour trois raisons :

1) Parce que la situation économique reste médiocre, alors qu'elle devrait être florissante. Nos dettes et nos déficits alimentent la consommation qui reste le premier moteur de l'activité, mais cette consommation profite aux pays voisins parce qu’ils sont plus productifs que nous. Donc la dette publique fabrique de la dette extérieure. Tout le monde s’en moque jusqu’au jour où l'on s’apercevra que nos créanciers qui nous ont prêté de l’argent vont se rembourser en prenant le pouvoir. C’est ce que font les pays du Golfe ou les Chinois en multipliant les investissements en Occident, et particulièrement en France. Ce phénomène explique que les actifs de production soient chers alors qu'ils sont peu rentables.

2) Un nouveau duel entre Hollande et Sarkozy annonce peut-être une belle bataille dans les studios de télévision, mais n‘annonce pas de débat sur les programmes. En fait, Hollande et Sarkozy sont - au niveau économique - d’accord sur l’essentiel, à savoir que la France est immergée dans un monde en concurrence mais qu’on n’est pas capable de prendre les mesures qu'il faudrait prendre pour en sortir vainqueur.

Donc on aura peu de choses sur la compétitivité prix et hors prix, sur la fiscalité, sur l’euro et sur l’Europe. Bref, on ne parlera pas des sujets clivants qui fâchent, mais de ceux qui provoquent et rassemblent aux deux extrémités. Qu'on se rassure, les deux candidats vont se livrer à une surenchère concernant la sécurité et le contrôle de l’immigration, mais on aura peu de choses sur la façon de participer à la mondialisation et au progrès technologique.

3) Les milieux d’affaires ont très peur d’avoir une campagne où les deux candidats rivaliseraient d’imagination pour rassembler tous ceux qui dans l'opinion ont peur du progrès. Bref, le risque c’est la course à la démagogie. Ce qui avait permis à Hollande de remporter la victoire, mais ce qui a aussi causé sa perte pendant le quinquennat.

Ils savent trop bien que l'opinion publique ne se partage plus entre la gauche et la droite. Elle se partage entre conservateurs et progressistes. Les conservateurs veulent conserver les acquis, les statuts, les rentes. Les progressistes veulent s’ouvrir sur les marchés mondiaux et les nouvelles technologies.

Le clivage moderne passe au travers des familles politiques traditionnelles. Or, les processus de fonctionnement de la démocratie sont encore fondés sur le clivage droite-gauche. Comment faire œuvre de pédagogie dans ces conditions lors d'une campagne présidentielle où le système condamne les partisans des deux camps à s’opposer ?

Ce qui est vrai en France l’est tout autant dans la plupart des vieilles démocraties. En Grande-Bretagne, le référendum sur le Brexit a coupé en deux les deux grands partis politiques britanniques. Aux Etats-Unis, Donald Trump a coupé le parti républicain en deux, et Hillary Clinton est loin d’avoir fait l’unanimité chez les démocrates.

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