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Sommet sur le pacte budgétaire : l’Europe, cette malheureuse Pénélope qui ne cesse de se renier
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Autorisations de découvert

Alors que les 27 chefs d'État et de gouvernement européens se réunissent ce lundi à Bruxelles pour finaliser le traité censé renforcer la surveillance budgétaire et la discipline au sein des membres de la zone euro. En discussion notamment, la possibilité de déroger à la rigueur budgétaire déjà prévue dans le traité de Maastricht.

Jean-Luc  Sauron

Jean-Luc Sauron

Jean-Luc Sauron est professeur associé à l'Université Paris-Dauphine.

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Les négociations entre les Etats membres sur le "traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance dans l'union économique et monétaire" donnent une image assez habituelle des négociations intergouvernementales. Elles sont confuses quant à leurs résultats devant tenir compte d'intérêts fort contradictoires.

 Le 9 décembre dernier, le "Conseil européen de la dernière chance" avait abouti à l'annonce d'un traité devant donner à la zone euro une gouvernance à la hauteur des enjeux. Mais les intentions de départ se délitent au fur et à mesure des réunions de formalisation du futur traité. Sa "dernière" mouture est révélatrice d'un système politique qui "tourne en rond".

A quoi rime cette conventionnalité revendiquée ? En effet, ce traité devant être conforme aux traités de l'Union, pourquoi ne pas prendre la voie communautaire traditionnelle sous la voie d'un règlement consolidant l'ensemble des textes déjà adoptés ou déjà sur la table ? Beaucoup évoquent l'impossibilité d'imposer l'intégration de la règle d'or dans les constitutions nationales par le vecteur d'une règle de droit dérivé (un règlement ou une directive). Ce motif disparaît compte tenu de la formulation retenue dans la dernière version discutée prévoyant une règle d'or intégré au "travers des dispositions de force contraignante et de caractère permanent, préférablement constitutionnel, ou sinon garanties d’être respectées lors des processus budgétaires nationaux." Reste une sorte de révision des traités de l'Union "en douce": ce traité prépare le transfert au bénéfice des compétences de l'Union de la politique budgétaire relevant aujourd'hui de la compétence des Etats membres. En effet, après l'instauration par ce traité d'une surveillance intergouvernementale des budgets de chacun des Etats membres, comment refuser sa communautarisation dans une deuxième étape ?

Mais cette Europe intergouvernementale n'atteint pas mieux ses objectifs que l'Europe communautaire. La dernière mouture de l'article 3, paragraphe 1, c) du projet de traité précise que "les parties contractantes sont temporairement autorisées à dévier de leur objectif de moyen terme [la règle d'or] ou de leur trajectoire de rétablissement vers celui-ci uniquement en cas de circonstances exceptionnelles" définies comme "un événement inhabituel hors du contrôle de la partie contractante et ayant un impact majeur sur la position financière du gouvernement général ou en période de ralentissement économique important comme défini dans le Pacte de Croissance et de Stabilité rénové, dès lors que cette déviation par la Partie Contractante concernée ne met pas en danger la soutenabilité budgétaire à moyen terme"(paragraphe 3 de l'article 3).

Avec cette "sortie de secours", la possibilité  prévue à l'article 8 du projet de traité de poursuivre un Etat ne respectant pas ses engagements devient très incertaine. Dès lors qu'un Etat se prétendra dans une telle situation, il échappera à la poursuite devant la Cour de justice pour se retrouver dans un cadre de discussion politique habituel et jusqu'ici fort accommodant ! Ces dispositions portent atteinte à l'ensemble du travail commencé avec le "Six Pack" : que devient la possibilité de sanction automatique à la majorité inversée si l'Etat sur la sellette peut arguer d'une " période de ralentissement économique important" pour se soustraire à la possibilité même d'une sanction ?

Les gouvernements de la zone euro hésitent, du moins publiquement, à définir plus avant les perspectives d'avenir pour le continent européen. Il convient de remettre sur la table la question du pourquoi nous sommes ensemble et de ce que nous sommes prêts à consentir comme efforts pour demeurer unis, non pas dans la diversité, mais malgré notre diversité.

La récente disparition de Vaclav Havel marque sans doute la fin des héros européens. Il nous laisse cependant une leçon à opposer au temps des marchés et des spéculateurs: "n'importe qui peut ébranler le monde" ! A nous d'entendre son message et de nous mettre à l'ouvrage ! Le temps est peut-être venu de refonder une Union composée au départ des seuls Etats membres capables d'accepter l'intégration renforcée (et fédérale) nécessaire au partage d' une même monnaie.

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