Migrants : à quand la voie de la raison ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Tribunes
75% des demandes d’asile sont rejetées en France.
75% des demandes d’asile sont rejetées en France.
©Reuters

Tribune

Une tribune de Charles Beigbeder, conseiller municipal du 8ème arrondissement de Paris et président de sa holding industrielle et financière, Gravitation SAS.

Charles Beigbeder

Charles Beigbeder

Charles Beigbeder est président de la Fondation du Pont-Neuf. Président de sa holding industrielle et financière, Gravitation SAS, Charles Beigbeder est engagé dans plusieurs mouvements liés à l'entreprise et à la vie de la cité.
Voir la bio »

L’émotion collective ne peut tenir lieu de ligne politique. Il est certes sain qu’un peuple sache s’émouvoir du sort tragique des migrants qui fuient massivement l’Erythrée,la Syrie ou l’Irak au péril de leur vie, et l’on ne peut que saluer les actes de générosité personnelle ou associative entrepris par la population française.

Mais, en politique, l’émotion doit laisser place à la raison : non la froide raison d’un État impersonnel qui ignorerait toute considération humaine, maiscelle qui recherche le bien commun et sait se projeter à long terme, à mille lieues de l’actuelle dictature compassionnelle qui empêche toute décision courageuse et responsable.

D’abord, comment peut-on prétendre accueillir dignement 24 000 réfugiés supplémentaires (en plus des 10 000 acceptés en juillet dernier) lorsqu’on sait qu’il manque déjà plus de 20 000 places d’hébergement pour les 65 000 demandeurs d’asile que la France enregistre annuellement, hors flux exceptionnel, et que, par ailleurs, notre pays compte 140 000 SDF ? La Cour des Comptes pointe, à juste titre, le coût exorbitant de l’asile qui s’élève à 2 Mds€ par an pour le contribuable français (hors financement des collectivités locales), en raison notamment du coût des 30 000 nuits d’hôtel payés par l’État pour faire face au manque de places d’hébergement.

Ensuite, il faut savoir qu’en moyenne, 75% des demandes d’asile sont rejetées mais que les déboutés ne sont effectivement reconduits à la frontière que dans 5% des cas, parfois vers leur pays d’origine, parfois vers le pays d’entrée dans l’espace Schengen, ce qui, en vertu du principe de libre circulation, leur permet de revenir en France, sitôt partis. Aussi, il est illusoire de croire que les "migrants économiques" déboutées de leur demande d’asile, repartiront dans leur pays d’origine, d’autant qu’en cas de scolarisation des enfants, l’expulsion effective s’avère très délicate (cf. affaire Léonarda). À ce coût politique, s’ajoute le coût économique d’une reconduite à la frontière, estimé selon Le Figaro (8/9/15) entre 10 000 et 20 000€.

Enfin, le principal défi est d’ordre culturel. Notre pays est en effet fragilisé par des tensions communautaires et son intégration est en panne, le Français devenant une langue minoritaire dans des pans entiers de notre territoire. La France dispose-t-elle vraiment de toutes les ressources intérieures pour assumer une immigration toujours plus grande ? Certes, elle doit être fidèle à sa tradition du droit d’asile, qu’elle hérite de la Chrétienté, mais elle doit le faire en tenant compte de tous ces paramètres.

Aufond, les vrais humanistes ne sont pas les professionnels de l’indignation compassionnelle qui organisent, sans se projeter sur le long terme, une situation potentiellement explosive, mais ce sont ceux qui prennent le problème à sa source et recherchent des solutions pérennes tant pour les pays d’accueil que pour ceux d’origine.

Tout d’abord, il faut adresser un signal très clair aux passeurs afin d’assécher les filières et l’économie parallèle qu’elles génèrent. Pour cela, il conviendrait d’installer des centres de rétention à l’extérieur de l’Europe, au plus proches des pays d’origine, en Afrique ou au Moyen-Orient, afin de pouvoir y effectuer sur place une première instruction des dossiers et refuser les demandes fondées sur d’autres critères que l’asile. Une fois foulé le sol de l’espace Schengen, c’est trop tard.

De même, il faudrait établir une concertation générale avec les riches États de la péninsule arabique, pour l’instant peu disposés à prendre part au fardeau commun, alors qu’ils sont géographiquement et culturellement beaucoup plus concernés que l’Europe par les migrations du Moyen-Orient.  

Ensuite, il est indispensable de rétablir un contrôle aux frontières sans lequel aucune politique migratoire ne peut réellement exister. En effet, l’espace Schengen permet de circuler librement à l’intérieur de chacun des États.Fixer des quotas d’accueil de réfugiés par pays ne présente donc aucun sens si l’on ne donne pas à chaque État les moyens de se prémunir contre un dépassement des quotas. Or, en l’état actuel du droit, rien n’empêchera les réfugiés admis en Allemagne d’aller vivre ensuite en France, où le régime des aides sociales leur est bien plus favorable. De plus, chaque pays de l’espace Schengen réagit différemment aux phénomènes migratoires en raison de son Histoire, de son économie et de l’état général de son opinion publique. C’est pourquoi, il est indispensable de retrouver la maîtrise de nos frontières comme le permet l’article 2.2 de la Convention de Schengen complété par l’article 26 du règlement communautaire du 22 octobre 2013, qui se réfère à des "circonstances exceptionnelles mettant en péril le fonctionnement global de l'espace", du fait de l’impossibilité de contrôler les frontières extérieures de l’Union, qui constitueraient "une menace grave pour l'ordre public ou la sécurité intérieure" des pays membres. Ceux qui prétendent vouloir expulser les clandestins mais rejettent tout rétablissement de nos frontières sont au mieux des utopistes ignares déconnectés du réel, au pire de cyniques pharisiens qui manipulent éhontément une opinion publique toujours plus crédule.

Enfin, il est nécessaire de prendre le problème à sa source et de combattre Daesch au sol, en mettant en place une coalition internationales’appuyant sur l’Iran et la Russie et regroupant tous les États décidés à en finir avec ce totalitarisme vert qui surpasse en horreur tout ce qu’il est possible d’imaginer. Il en va de la survie de l’Europe qui n’a pas vocation à devenir une passoire multiculturelle et a le droit (et le devoir de protéger son identité), ainsi que de l’équilibre des populations du Moyen-Orient qui ne doit pas être vidé de ses élites, et plus particulièrement de sa population masculine, puisque selon le HCR, 72% des migrants parvenant en Europe sont des hommes.

Au lieu de créer un appel d’air énorme en annonçant des quotas de réfugiés accueillis dont les images ne peuvent qu’inciter au départ ceux qui sont restés dans leur pays d’origine, l’Europe se grandirait si elle bâtissait une véritable stratégie d’ensemble cumulant coalition militaire, négociation diplomatique et politique migratoire, en laissant aux associations caritatives et aux Églises le soin de conduire une action humanitaire qu’elle encadrerait et financerait. C’est cela, faire de la politique !

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !