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Mesures en faveur de l'investissement : les erreurs économiques de François Hollande, épisode 432
©Reuters

SOS croissance disparue

Après 3 années passées à la tête de l’Etat, et malgré son absence flagrante de résultats, François Hollande reste persuadé de la validité de son approche. Une nouvelle fois, en pointant le déficit d’investissements, le Président trahit son erreur d’analyse.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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Le quinquennat de François Hollande entre dans une nouvelle ère économique. Après la hausse des impôts de 2012, 2013, et de 2014, après le virage de l’offre de janvier 2014 dont les branches sont le pacte de responsabilité et la loi Macron, voici venu le temps de l’investissement. Ainsi, après 3 années de présence à la tête de l’Etat, François Hollande continue de tâtonner dans sa politique économique.

Un bien sombre bilan

Il est déjà possible de mesurer les premiers résultats : une croissance de 0.3% en 2012. Une croissance de 0.3% en 2013. Une croissance de 0.3% en 2014 (avec de la chance et en attendant la publication officielle de l’INSEE). 570 000 chômeurs de plus en catégorie A depuis mai 2012. 987 000 chômeurs de plus toutes catégories confondues sur la même période. (La barre du million devrait être franchie rapidement). Une symphonie.

Pour agrémenter l’ensemble, le 28 novembre 2013, un communiqué officiel de l’Elysée, qui mérite d’être cité, indiquait alors:

"L'inversion de la courbe du chômage est désormais amorcée. Avec la diminution en octobre de 20.500 du nombre des chômeurs, un premier résultat est acquis. Il est conforme à l'engagement que j'avais pris pour la fin de cette année."

Depuis que cette "inversion de la courbe du chômage est désormais amorcée", le nombre de chômeurs a progressé de plus de 200 000 personnes. Bref, le constat global est sans appel et l’échec est cuisant.

Une erreur de diagnostic qui perdure :

Confronté à ce manque de résultats en ce début 2015, le Président continue ses annonces et passe une nouvelle à "l’offensive". C’est ainsi que le 3 avril 2015 ; François Hollande déclare :

"L’investissement est la clé pour créer des emplois". "Parce que c’est l’investissement qui va permettre à la croissance d’être plus forte et à l’emploi d’être plus important qu’il n’est prévu aujourd’hui".

Le diagnostic opéré par le Président est identique à celui qui était mis en place dès le début du quinquennat. Le raz de marée des résultats n’aura rien changé aux certitudes présidentielles.

En dévoilant les nouvelles mesures destinées à l’investissement, c’est-à-dire : un soutien supplémentaire de 8 milliards d’euros aux prêts de développement des entreprises de la Banque publique d’investissement  (BPI) et la création d’un fonds de 500 millions d’euros pour investir dans le capital des entreprises par les assureurs, le Président continue dans cette même logique. Encore une fois, le Président pointe le symptôme, et non la cause.

Car le raisonnement économique est inversé. Il ne suffit pas de forcer l’investissement pour faire repartir la croissance. Car l’investissement dépend de la croissance future. Comme la consommation dépend des revenus futurs. Ce qui signifie qu’au contraire de ce que semble croire François Hollande, la hausse de la croissance ne se produira pas grâce à la stimulation de l’investissement, mais au contraire, que la hausse de l’investissement se produira lorsque la croissance sera stimulée. Parce que les entreprises ont besoin de perspectives de croissance pour pouvoir investir. Pour que le désir d’investir voit le jour, il est nécessaire de permettre un relèvement des perspectives de croissance, et ce, de façon durable et crédible. Le chat se mord la queue.

Une tribune d’un chef d’entreprise parue le 3 avril dans le figaro en témoigne :

"Ce n'est évidemment pas comme cela que ça marche. Plusieurs facteurs doivent être réunis pour réaliser un investissement ou une embauche: un cadre favorable et des perspectives."

Toutes les politiques menées depuis le début du quinquennat produisent les mêmes effets parce qu’elles omettent l’essentiel. En s’acharnant sur les différentes symptômes de la crise ; l’investissement, la compétitivité, l’exécutif ne comprend toujours pas la cause du mal qui frappe le pays.

La crise que la France connaît depuis 2008, que l’Europe connaît depuis 2008 est une crise de la demande. Et non une crise de l’offre. Ce qui signifie que le niveau de dépenses est trop faible en France; trop faible notamment pour pouvoir susciter l’investissement. Et le point essentiel est que la demande dépend de l’action de la politique monétaire, c’est-à-dire de Mario Draghi et de la Banque centrale européenne.

Et cette incompréhension est récurrente depuis le début du mandat de François Hollande. Notamment lorsqu’il indiquait en janvier 2014 "c’est l’offre qui crée la demande". L’aveu était foudroyant tant il révélait l’incompréhension du phénomène. Le Président reste engoncé dans des certitudes éculées, totalement déconnectées de la réalité économique actuelle. Les Etats-Unis ont diagnostiqué une crise de la demande, le Royaume Uni, la Chine, le Japon…mais pas l’Europe. Et pas la France. Car François Hollande persiste dans cette logique de l’offre, ce qui se comprend une nouvelle fois par ces mesures concernant l’investissement.

Pourtant, certaines récentes publications laissent entrevoir une amélioration économique.

Une hirondelle pointée du doigt par l’INSEE :

Dans une note de conjoncture publiée le 2 avril 2015, l’INSEE fait cependant part d’une amélioration de la situation pour l’année 2015 :

 "Au total, le PIB accélérerait à +0,4 % au premier trimestre 2015, du fait d’un rebond ponctuel de la production d’énergie après un automne doux, puis progresserait au deuxième trimestre de 0,3 %. Sur un an, la hausse de l’activité atteindrait +1,1 % mi-2015, le rythme le plus haut depuis fin 2011."

Une amélioration qui devrait malheureusement rester sans effet sur l’emploi, pour le moment :

"Le regain d’activité et les politiques d’enrichissement de la croissance en emplois ne suffiraient pas à enrayer la baisse de l’emploi marchand, qui serait toutefois moins accentuée début 2015 qu’en 2014. (…) Comme la population active croît encore nettement, le chômage continuerait d’augmenter, son taux passant de 10,4 % fin 2014 à 10,6 % mi-2015."

Puisque la structure économique française nécessite une croissance de 1.6% pour pouvoir créer de l’emploi privé, il faudra encore attendre un peu pour la baisse du chômage. La fin d’année 2015 au mieux. L’année 2016 plutôt.

Cette amélioration de la conjoncture est principalement le fruit des dernières actions de la BCE. Dont l’objet était précisément de permettre une révision à la hausse des perspectives de croissance de la part des agents économiques. Des mesures louables mais encore trop timorées pour renouer avec une forte croissance. Car le cadre monétaire européen reste trop strict.

La politique économique de François Hollande ne produit pas d’effets parce qu’elle ne peut pas en produire. Parce que son approche est erronée depuis le début du quinquennat. Si le Président veut obtenir de réels résultats, il n’aura d’autre choix que de passer par la voie européenne et de tenter de réformer la BCE. Pour que celle-ci puisse enfin avoir les moyens de contrer le choc qui frappe l’Europe depuis 7  années. Entretemps, le continent se contentera de survivre dans cette mollesse décennale.

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