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Les coupables ne sont pas ceux que l'on croit
Les coupables ne sont pas ceux que l'on croit
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A qui la faute

En période de crise, il faut mettre la main sur les coupables. Beaucoup s'acharnent, à tort ou à raison, sur les marchés financiers et leur lot de spéculateurs imprudents mais ils sont peu à oser pointer du doigt le rôle des Etats dans la chute des marchés financiers.

Erwan Le Noan

Erwan Le Noan

Erwan Le Noan est consultant en stratégie et président d’une association qui prépare les lycéens de ZEP aux concours des grandes écoles et à l’entrée dans l’enseignement supérieur.

Avocat de formation, spécialisé en droit de la concurrence, il a été rapporteur de groupes de travail économiques et collabore à plusieurs think tanks. Il enseigne le droit et la macro-économie à Sciences Po (IEP Paris).

Il écrit sur www.toujourspluslibre.com

Twitter : @erwanlenoan

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A en croire une partie des réactions, la crise actuelle aurait un coupable : la spéculation. Acquis à la cause du grand capital sauvage et dévastateur, bête immonde qui se nourrit de la souffrance sociale des déshérités, ce phénomène néfaste serait à l’origine du (quasi) défaut de la Grèce et des difficultés de l’Italie et de l’Espagne et devrait donc être contrôlé – voire interdit – au plus vite. C’est oublier un peu vite les vraies responsabilités de la crise.

Les vrais responsables de la crise, ce sont les Etats. Si les marchés peuvent s’en prendre aux dettes de certains Etats, c’est bien parce qu’elles existent et que leur soutenabilité est mise en cause depuis longtemps.

La gestion des finances publiques est loin d’avoir été rigoureuse et ce depuis des années.  En 2009, la Commission européenne avait lancé une procédure pour déficit excessif contre 18 Etats-Membres (la Grèce et l’Italie n’en étaient d’ailleurs pas à leur première infraction). Dans le cas de la France, le Rapport Pébereau le disait dès 2005 : « l’augmentation de la dette ne résulte pas d’un effort spécifique pour la croissance mais, pour l’essentielle, d’une gestion peu rigoureuse ».

Les impératifs de bonne gestion étaient dénoncés comme l’obsession de rigoristes intransigeants au mieux rabat-joie, au pire extrémistes de l’austérité. Le Pacte de stabilité et de croissance avait d’ailleurs été jugé trop rigide par de nombreux hommes politiques et quelques économistes (qu’on se rappelle que le Président Chirac en avaient demandé l’assouplissement, ou qu’on revoit les interventions si prisées de Jean-Paul Fitoussi, cinglant contre la dictature du Pacte). On voit bien aujourd’hui que cette prétendue excessive rigidité n’a pas été un grand obstacle à une gestion dispendieuse des finances publiques.

Les marchés, pas si illogiques que ça...

Aujourd’hui, les marchés apparaissent comme des révélateurs de ces fragilités. Leur fonctionnement comporte certainement des surprises, mais leur (sur) réaction est aujourd’hui guidée par la conviction – pas complètement irrationnelle - que des Etats, qui avaient des dettes importantes (rarement maitrisées et presque jamais réduites), des déficits persistants et des économies aux dysfonctionnements structurels, se sont en conséquence engagés dans la résolution d’une crise économique grave avec de lourds handicaps, accumulés par défaut de réformes et de courage politique. Aujourd’hui, ils doutent de leur capacité et de leur volonté à résorber ces faiblesses. Leur réaction est brutale, un peu paniquée aussi, mais est-elle réellement infondée ?

Des solutions à court terme et inefficaces

Dans ce contexte, les solutions qui consistent à pallier les erreurs de gestion publique par plus d’Etat sont surprenantes. Certains proposent d’entraver les flux financiers par diverses taxes, d’autres de créer une agence de contrôle publique qui serait (on ne sait pourquoi) plus objective que plusieurs privées… Ces solutions manquent toutes le fait que pour rassurer les marchés, il faut revenir à une saine gestion des finances publiques et renforcer la croissance par des réformes structurelles !

L’Etat-Providence a vécu. Généreux autrefois, il meurt étouffé par ses dettes. Son agonie est marquée par l’injustice : les générations nouvelles vont payer, dans la crise, l’incapacité à réformer de leurs parents. Il est temps d’en inventer un nouveau.

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