Situation incroyable : un nombre d’offres d’emplois record, mais ces offres ne trouvent pas preneurs, même en CDI<!-- --> | Atlantico.fr
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Une personne visite le stand de Pôle Emploi, l'agence nationale pour l'emploi, lors d'un salon de l'emploi à Arras, dans le nord de la France, le 18 octobre 2012.
Une personne visite le stand de Pôle Emploi, l'agence nationale pour l'emploi, lors d'un salon de l'emploi à Arras, dans le nord de la France, le 18 octobre 2012.
©PHILIPPE HUGUEN / AFP

Atlantico Business

Incompréhensible et très inquiétant : plus d’un million d’offres d’emplois en France aujourd’hui, mais la moitié ne trouve pas preneur, d’où un chômage et un taux de non-emploi qui reste très élevé. Cherchez l’erreur. 

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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La situation de lemploi en France na jamais été aussi paradoxale et insoluble à court terme. Dun côté, la violence de la reprise économique, depuis quelques mois, a boosté le nombre doffres demplois qui na jamais été aussi élevé, mais les entreprises ne trouvent pas de candidats, doù le réveil des syndicats qui ont commencé à monter au créneau avec des revendications de salaires. Les responsables politiques y voient-là un argument de campagne présidentielle.

Sauf que les spécialistes de lemploi disent aussi quil y a un déficit structurel de formation, quil y a même un socle de « Need », cest à dire de jeunes de moins de 30 ans qui sont complètement incasables, parce quils nont jamais travaillé, jamais été à l’école ou en formation.

Enfin, certains estiment que la générosité du système social (ou son laxisme) nencourage pas ceux qui pourraient travailler à le faire. La période de confinement et le télétravail ont multiplié le nombre de ceux qui voudraient une forme de vie différente de celle quils avaient avant. Doù la proportion de ceux qui ont purement et simplement abandonné leur travail et qui ont disparu, sauf des listes des bénéficiaires dallocations sociales.

La situation française va donc devenir très compliquée. Le redémarrage de l’économie risque de buter sur cette difficulté de trouver des personnels (dans le bâtiment, la restauration, lhôtellerie et tous les services), mais quen sera-t-il quand on aura lancé tous les investissements liés à la mutations digitale et énergétique ? On a tout ce quil faut en France pour aborder cette mutation mondiale : on a les chefs dorchestre, les compositeurs et les instruments de musique, on a largent et les clients, mais on na pas les musiciens pour jouer.  La fosse dorchestre est à moitié vide.

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Le site de pole-emploi.fr, qui regroupe maintenant toutes les propositions de recrutement récentes, enregistre, certains jours, plus dun million doffres demplois disponibles alors quhabituellement, les offres demplois avoisinaient plutôt les 700 000.

Sauf que plus de la moitié de ces offres ne trouve absolument pas de candidat. Cest le socle doffres quon retrouve tous les jours depuis trois mois, mais ce qui est surréaliste, cest que parallèlement, on a encore plus de 3 millions de chômeurs, soit 10% de la population en âge de travailler.

Tous ces chiffres montrent bien que le marché du travail na pas été sinistré par la crise du Covid et les aides de lEtat ont permis d’éviter une catastrophe économique et une vague de faillites et de licenciements.

Mais tous ces chiffres démontrent, avec la crise, que le pays est en proie à un déficit de compétence et (peut-être) de motivation au travail. Les offres demplois sont sans réponse, parce que les candidats nont pas la formation adéquate ou alors nont simplement plus envie de travailler.

Le déficit de compétence est évident. On le sait, depuis des années mais le sujet a été tabou très longtemps. Il existe près de 2,5 millions de Français de moins de 30 ans en général, la plupart ne sont même plus inscrits au chômage mais touchent quand même le RSA. Ces gens-là sont sans doute perdus pour le travail. Ils nont aucune formation, ni éducation, beaucoup même ne savent ni lire, ni écrire, ni compter (mais cest plus rare). Doù la campagne contre lillettrisme que le gouvernement projette de lancer très vite.

Le déficit de formation et de compétence est tout aussi flagrant mais il va demander un nouvel effort conjoint de l'éducation nationale, des organismes de formation et surtout des entreprises elles-mêmes. Le digital et la lutte pour le climat ont ouvert des milliers demplois nouveaux qui nexistaient pas il y a dix ans et pour lesquels on na pas ouvert les filières en temps utile et en quantités.

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Enfin, la crise du Covid a révélé un déficit de motivation au travail dont le système politico-social na pas évalué correctement les causes et lampleur.

Ce déficit de motivation au travail entraine un découragement à mobiliser beaucoup de grandes entreprises, dont les services de DRH sont parfaitement conscients et font ce quils peuvent pour ramener au travail, leur effectif et pour fidéliser leurs salariés.

Au niveau des syndicats et des responsables politiques, on a très vite conclu à la nécessité de revendiquer des hausses de salaires. Pour beaucoup de dirigeants, le diagnostic est simple : « si les entreprises ne trouvent pas à embaucher, cest parce que les salaires ne sont pas assez élevés ».  Doù les propositions de la CGT et de FO de manifester pour une amélioration du pouvoir dachat.

Sur le terrain politique, Arnaud Montebourg rejoint Marine Le Pen pour réclamer des hausses de salaires et débloquer ainsi le système dembauches.

Sur le plan économique, il existe des métiers en tension qui peuvent supporter des hausses de salaires, notamment dans le digital. Lenjeu est tellement important que les entreprises paient. La productivité et la croissance du marché digital permettent de digérer ces hausses.

Mais dans beaucoup de secteurs, leshausses de salaires ne passent pas et mettent en risque l’équilibre de lentreprise parce que leur marché nacceptera pas les hausses de prix. Par conséquent, ce type de hausses de salaires se répercute sur la demande, ce qui provoque une hausse de prix ou un appel dair du côté des importations des pays à bas cout. Ajoutons à cela que si on cherche à réinstaller une industrie en France, la meilleure solution pour inciter les investisseurs nest pas de promettre une augmentation de salaires de 10 % ou alors pour être cohérent, il faudrait parallèlement organiser une baisse égale des charges sociales. Compte tenu de lendettement des budgets sociaux, ça paraît difficilement possible.

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