Qui sont ces Français qui croient aux théories du complot et pour qui votent-ils ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Plus de la moitié des Français croient que "le gouvernement ne gouverne pas" réellement.
Plus de la moitié des Français croient que "le gouvernement ne gouverne pas" réellement.
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Plus de la moitié des Français croient que "le gouvernement ne gouverne pas" réellement et 27% de nos concitoyens adhèrent à l'idée qu'un groupe comme les Francs-Maçons "tire les ficelles". Ces chiffres prennent d'autant plus d'importance qu'ils font écho à l'orientation politique des différents répondants.

Joël Gombin

Joël Gombin

Joël Gombin est doctorant en science politique au CURAPP (Université de Picardie-Jules Verne – CNRS).

Ses travaux portent  notamment sur le vote en faveur du Front national et sur les comportements politiques des mondes agricoles.

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Atlantico : L’étude que vous avez réalisé pour le Think Tank Counterpoints révèle une adhésion relativement large des Français à ce que l’on pourrait appeler des « théories conspirationnistes » puisque plus de la moitié d’entre eux pense que le « gouvernement ne gouverne pas » réellement le pays. 27% de nos concitoyens pensent également qu’un groupe comme les Francs-maçons « tire les ficelles » dans l’ombre.Diriez-vous que la France, et les Français, sont particulièrement sensibles à ce genre de théorie et pour qu’elles raisons historico-politiques ?

Joël Gombin : C'est très difficile à dire, en l'absence de données comparatives de qualité (et même de données comparatives tout court) sur le sujet. Je n'ai pas de raison de penser que les Français y soient plus sensibles que d'autres populations ; ce qui est certain quand on lit la littérature américaine par exemple, c'est que ces théories du complot sont fortement inscrites dans un espace national, et que les croyances se structurent différemment d'un pays à l'autre. Aux États-Unis, par exemple, l'adhésion à de nombreux énoncés remettant en cause des thèses généralement admises (sur le réchauffement climatique, sur le 11 septembre, sur le passé d'Obama...) répond à une forte polarisation entre les Républicains et les Démocrates. En France, c'est plutôt la question de la confiance, en particulier dans les institutions, qui est déterminante. 

Résultats d'une étude menée par OpinionWay pour Counterpoint et le Cevipof du 10 au 29 mai 2012 auprès d'un échantillon de 2 504 personnes représentatif de la population française (Méthode CATI)

Selon votre étude, les « conspirationnistes » et les « non conspirationnistes » ne s’informent pas de la même façon. Est-ce une cause ou un effet ? Quel impact sur l’adhésion à ces théories les contenus médiatiques ont-ils réellement ?

La différence n'est en réalité pas flagrante, si on contrôle par les variables socio-démographiques, et en particulier le niveau de diplôme. En réalité, pour véritablement évaluer l'impact des contenus médiatiques, il faudrait mener des études portant sur la réception et l'interprétation de ces contenus par différentes personnes, tenant compte notamment des effets de dissonance cognitive (on a tendance à réinterpréter les informations reçues à l'aune de nos croyances antérieures). 

Résultats d'une étude menée par OpinionWay pour Counterpoint et le Cevipof du 10 au 29 mai 2012 auprès d'un échantillon de 2 504 personnes représentatif de la population française (Méthode CATI)

Votre étude révèle que l’adhésion à ce genre de théories est plus forte chez les électeurs de Marine Le Pen et de Jean-Luc Mélenchon que chez les autres interrogés. L’un de ces phénomènes influence-t-il l’autre où sont-ils parallèles ?Pouquoi les Lepenistes y sont-ils plus sensibles que les mélenchonistes ? 

La tendance est surtout claire pour les enquêtés déclarant avoir voté pour Marine Le Pen. Je n'ai pas d'éléments me permettant d'établir le sens de la causalité ; mais il semble que ce soit surtout le rapport à la confiance, plus encore que l'orientation politique, qui soit déterminant. Or on sait que le vote pour l'extrême droite est corrélé à une défiance, envers les autres et envers les institutions.

Résultats d'une étude menée par OpinionWay pour Counterpoint et le Cevipof du 10 au 29 mai 2012 auprès d'un échantillon de 2 504 personnes représentatif de la population française (Méthode CATI)

Les Français qui croient aux théories du complot sont plus prosélytes que les autres interviewés. Comment expliquer ce phénomène ? 

Là encore, le constat n'est pas si clair. Ceux qui ont le plus parlé politique avec leur entourage pendant la campagne présidentielle sont ainsi moins susceptibles d'adhérer à l'énoncé selon lequel "on ne sait pas qui tire les ficelles". En revanche, parmi les enquêtés adhérant à certains énoncés très "marqués", comme celui portant sur l'action de sociétés secrètes comme les Francs-Maçons, le prosélytisme (mesuré par la tentative de convaincre quelqu'un de voter de la même manière qu'eux) est effectivement plus important que dans le reste de la population. Cela tient sans doute au fait que lorsqu'on a le sentiment de connaître une vérité dissimulée à propos d'un complot, on se sent le devoir d'informer les autres victimes potentielles de ce complot.

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