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Pourquoi les Américains et les Chinois sont-ils meilleurs que nous ?
©JASON LEE / POOL / AFP

Les entrepreneurs parlent aux Français

Denis Jacquet évoque les différences fondamentales entre les entrepreneurs français, américains et chinois à l'heure de l'épidémie du coronavirus. L'ambition et les prises de risques seront les clés de la réussite pour la France.

Denis Jacquet

Denis Jacquet

Denis Jacquet est fondateur du Day One Movement. Il a publié Covid: le début de la peur, la fin d'une démocratie aux éditions Eyrolles.  

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Nous, les Français, avons un goût prononcé pour l’auto-flagellation et la critique facile. De nous-mêmes pour commencer. Le French-bashing est de mise, toujours, surtout quand il est décoché depuis un arc étranger. Néanmoins il faut se rendre à l’évidence, nous sommes moins bons que les « méchants » étrangers. Les Américains et désormais, les Chinois, en tous cas ceux qui survivront au virus. 

Mais qui est « moins bon » ? Nos entrepreneurs ? En aucun cas. Le seul responsable c’est leur environnement. Enlevez la gaine de la belle mise en cage pour lui aplatir le ventre et faire d’elle ce qu’elle n’est pas, ou la chaîne du condamné, qui en fait un albatros Baudelairien, et l’entrepreneur français peut voler comme un supersonique. 

Si l’on considère les chaînes culturelles, normatives, l’environnement et la crasse connaissance des politiques de tout ce qui a trait à l’entreprise. 

Si l’on considère cette détestable culture « gaucho » de l’administration française, y compris celle qui entoure le Président Macron (malheureusement) et qui considère que l’entrepreneur est suspect par définition. 

Si l’on considère, l’étouffoir à paiement des grands groupes, le laminage impitoyable de la grande distribution face aux PME, PMI et producteurs français (moins désormais, puisque la grande distribution est désormais elle-même laminée par pire qu’elle, en la personne d’Amazon). 

Si l’on considère la folie normative et le fait que la législation française a été faite pour (et par) les grands groupes (avec l’appui du Medef, pourtant composé principalement de PME).

Si l’on considère tout cela et tout ce que je manque de place et de temps, pour tous les citer, les Français sont les meilleurs entrepreneurs du monde entier. Le jugement est sans appel. 

« Réussir à réussir » des PME, les mains et la tête coupée en permanence du fait de ce cloaque, on frise le génie. Ce n’est pas pour rien qu’on rappelle que le mot entrepreneur, utilisé aussi aux USA, mais prononcé -or à la fin, est d’origine française. Mais l’origine est désormais un souvenir trop insignifiant, pour pallier à ce qui va nous manquer pour résister au cyclone, à 2 têtes, Américaines et Chinoises.

Tout d’abord nous manquons d’ambition. Pas nous. L’environnement. Des investisseurs, qui pourtant reçoivent des légions d’honneur, pour certains, qui investissent en moutons, avec des montants qui font passer nos levées de fonds aux USA et en Chine, pour des blagues potaches.

Ensuite, nous ne prenons plus de risques. Pas nous. Nous en prenons tous les jours. L’environnement. Le principe de précaution a laminé l’envie d’attribuer la moindre valeur au risque, ce qui ajouté à la faiblesse du financement, est l’équivalent d’une ceinture de chasteté pour la veuve ou l’épouse du siècle dernier (et encore aujourd’hui puisque j’ai appris que l’instrument était encore bien vendu dans certaines régions du monde. Non, pas en Suisse). Solvency a rajouté de la terre sur la tombe, dans l’indifférence générale.

Ensuite, nous sommes punis d’être, parfois, aidés. Un cadeau aux « riches » ! Nous avons le programme le plus généreux pour la R&D ? Via le CIE ? Le mot d’ordre de la direction des impôts est clair, si vous aussi vous avez discuté avec eux. Ils sont là pour vous reprendre ce que le politique a osé nous donner. Dans parfois plus de 58% des cas, le CIE est offert en cadeau avec en prime un contrôle fiscal et social, dans les 6 mois. Qui empêche la start-up de bosser pendant des semaines (quand vous êtes moins de 10, avoir 3 contrôleurs chez vous à plein temps est légèrement handicapant).

Ensuite encore, nos entrepreneurs riches, réinvestissent de petites sommes, à petit effet, dans les start-up, et préfèrent comme tout le monde, l’immobilier. Tout le monde y va de son aumône à 50K, et encore, quand vous faites déjà 50K de CA par mois, et que par définition vous n’avez plus ou moins ou différemment besoin d’eux. C’est pour cela que de retrouver les mêmes sur une chaîne TV, singer le Shark Tank Américain pourrait faire vraiment plaisir, mais fait plutôt pitié. Le seul bénéfice sera pour l’ego de ceux qui jugent et avaient, pour certains, surtout besoin de se montrer avant qu’on ne les oublie. La seule exception dans ce pays, est certainement celle de Xavier Niel. Mais pour le reste…on reste au rang de la figuration et de l’apparence.

Ensuite nous sommes peu internationaux. Cela, c’est notre faute. Pourquoi tant de talent, que nous pourrions exercer ailleurs, de meilleure façon, et se l’interdire. Cela reste un mystère pour moi. Mais notre incapacité de faire à plusieurs, une forme d’incapacité d’adaptation, le manque de soutien malgré les 6000 aides recensées, mais tellement décousues, illisibles et ingérables administrativement, qu’elles produisent l’effet inverse de celui espéré.

Enfin, sur le terrain spécifique de la domination Américaine et Chinoise, parceque nous n’avons pas les moyens, le sens du risque, la puissance du financement, et que nous sommes desservis par un consommateur qui n’attribue aucune ou peu de valeur à soutenir les initiatives des entrepreneurs de son pays (voir comment Qwant « rame » pour gagner des points de parts de marché alors que nous devrions tous être derrière). Les Américains ont mis leur pays tout entier au service de la réussite des entrepreneurs et de la domination mondiale. Les Chinois aussi. Pendant ce temps Vestager (Commissaire Européenne) interviewée fin 2019 par un journal bien connu, indiquait sans peur ni honte, que « nous n’avions pas besoin de champions Européens », ni « besoin de les biberonner ». Avec des amis comme elle, nul besoin d’ennemis !

Et je passerais rapidement sur l’incapacité française de pousser une ambition Européenne et le refus de l’État et de ses suppôts inutiles du type Conseil National du Numérique ou autre, de laisser prospérer la moindre expérimentation qui laisserait aux acteurs du secteur le soin, contrôlé pourtant, d’organiser le mieux disant social que nécessite effectivement, le modèle digital et qu’ils sont pourtant prêts à assumer. Non, cela doit passer par les syndicats, tellement progressistes et si férus de digital, et par la Loi, la cristallisation du passé, pour écrire l’avenir ! Hérésie.

Nous sommes bons. Oui. Mais avoir de la voix au milieu du désert, avoir ce talent fantastique, ne conduit qu’à une chose, l’extinction. Alors je me tais, car j’ai certainement un trop mauvais esprit et suis certainement un « French Basheur », mais pas ou rarement, de mes confrères entrepreneurs. Femmes et hommes. Bravo mais lancez-vous ailleurs, et vous reviendrez en France, un jour, en vainqueurs !

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