États zombies : ouvrons les yeux, ni la Grèce, ni le Portugal ne rembourseront jamais leurs dettes<!-- --> | Atlantico.fr
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Les situations du Portugal et de la Grèce ne sont pas très différentes.
Les situations du Portugal et de la Grèce ne sont pas très différentes.
©Reuters

Maillons faibles

Pire, ce ne sont pas les seuls pays de la zone euro assis sur un véritable baril de poudre. Et les banques pourraient bien faire sauter avec eux toute la zone euro.

Simone Wapler

Simone Wapler

Simone Wapler est rédactrice en Chef des Publications Agora (analyses et conseils financiers).

Elle est l'auteur de "Comment l'Etat va faire main basse sur votre argent: ... et ce que vous devez faire pour vous en sortir !", paru chez Ixelles Editions en mars 2013.

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Nous sommes assis sur un baril de poudre qui peut exploser à tout moment. Les medias ont les yeux rivés sur la mèche Grèce. Les créanciers privés – banques, fonds et assureurs – avaleront-ils sans broncher la couleuvre de 70 % de pertes sur leurs créances, ou bien, au contraire, y aura-t-il défaut ? Car un État ne fait jamais faillite, il fait défaut.

Mais une deuxième mèche se consume également du côté du Portugal. Au fond, les situations du Portugal et de la Grèce ne sont pas très différentes. Voici les chiffres et ratios couramment auscultés par les medias.

Le Portugal un petit détonateur comparé à la Grèce

Grèce

Portugal

Dette 2011 en Mds€

365,64

181,55

Dette en % du PIB en 2011

165,6

106,0

Progression de la dette sur 10 ans en %

130,1

140,6

Déficit 2010 en % du PIB

10,6

9,8

Source Les Echos spécial bilan 2011 -2012

Ces deux pays sont des zombies financiers, des morts-vivants. Un zombie financier est un emprunteur qui ne remboursera jamais son passif. Il emprunte pour payer ses intérêts. Ceux qui lui prêtent pensent que le zombie est toujours vivant puisque les intérêts tombent. Mais en réalité le zombie est financièrement déjà mort.

Comment reconnaître un zombie ? C’est très simple : sa dette grossit toujours car il n’y a pas suffisamment de croissance économique pour la rembourser. C’est le cas actuellement. L’arithmétique est implacable, il faut que la croissance dépasse le déficit pour que la dette ne grossisse pas.

Comble de malheur, le retour à une croissance robuste est exclu pour cause de vieillissement de la population et de renchérissement de l’énergie. Ces deux facteurs ne sont pas facilement maîtrisables, même avec la meilleure volonté politique du monde.

Comment en est-on arrivé là ? Le monde s’est persuadé qu’un État pouvait emprunter sans limite puisqu’il ne meurt jamais, contrairement à un emprunteur particulier.

Les États zombies prêteurs se différencient des États zombies emprunteurs par la taille de leur passif. Plus le passif est gros, plus ils ont droit d’emprunter pour prêter aux petits zombies. On leur prête car un gros État avec une grosse économie est considéré comme plus fiable qu’un petit.

Tour d’Europe de la zombification financière

Si vous examinez la carte de l’Europe à la lumière des critères de zombification financière, vous constatez que trois pays seulement appartiennent encore au monde des vivants.

Suède

Finlande

Estonie

Dette 2011 en Mds€

141,15

96,17

0,95

Dette en % du PIB en 2011

36,0

50,2

6,0

Progression de la dette sur 10 ans en %

0

61,5

113,2

Déficit 2010 en % du PIB

0,2

2,5

-0,2*

Source Les Echos spécial bilan 2011 -2012

*pays en excédent budgétaire

Le déficit de ces trois pays est ténu, un petit effort leur permet de ne pas voir grossir leurs dettes, même s’ils sont confrontés à une croissance faible, voire nulle. Ils ont cependant un grave inconvénient : ils sont trop petits pour pouvoir sauver les énormes zombies.

En fait, les mèches sont allumées partout : en Espagne, en Italie, en France, en Belgique et même en Allemagne. Les barils de poudre derrière les mèches ce sont évidemment les banques européennes avec leur monstrueux effet de levier.


Où les États zombies sauvent les banques zombies, à moins que ce ne soit l’inverse

Une banque ne peut aujourd’hui se permettre de perdre plus de 2 à 3 % des créances (ou engagements) qu’elle détient. Au-delà, elle a carbonisé ses fonds propres, c’est à dire l’argent qu’elle possède réellement et qui n’est pas celui de ses déposants. Elle devient alors réglementairement en faillite. Il faudrait ensuite que les États (zombies) sauvent les banques zombies.

Les banques savent tellement bien qu’elles sont en crise de solvabilité qu’elles ne se prêtent même plus entre elles. Chaque soir, elles stockent leurs dépôts à la BCE. En période de fonctionnement normal du marché monétaire (avant la crise des subprime), les montants moyens déposés par l’ensemble des banques européennes se situaient entre 100 M€ et 200 M€ seulement (ce sont bien des millions). En janvier 2012, nous en sommes à 474Mds€ en moyenne (ce sont bien des milliards).

La Banque centrale européenne arrose les barils de poudre de ses liquidités avec déjà 489 Mds€ de prêts d’urgence. Ce montant sera probablement porté à plus de 1 000 Mds€ en février selon le Financial Times du 31 janvier.

L’impression monétaire comme solution à une crise dans laquelle des États insolvables essaient de sauver des banques insolvables créera évidemment d’autres problèmes. L’Histoire nous montre qu’aucune création monétaire n’est restée impunie.

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