Loi de finances : les chiffres qui prouvent que les députés de l'extrême gauche n'ont rien compris aux enjeux de ce texte...<!-- --> | Atlantico.fr
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L'Assemblée nationale le 18 juillet 2023.
L'Assemblée nationale le 18 juillet 2023.
©Geoffroy Van der Hasselt / AFP

Atlantico Business

À peine présentée au Parlement, les députés de la Nupes ont démoli la loi de finances 2024 avec des arguments qui prouvent qu'ils ne comprennent rien aux mécanismes économiques, ou alors qu'ils ne l'ont même pas lue et qu'ils s'en moquent.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Pour l'extrême gauche, tout se passe comme si le budget de la France était le moyen de multiplier les attaques politiques, non seulement contre le gouvernement en place, mais contre l'ensemble du système. La loi de finances est évidemment critiquable, mais pour les experts de l'extrême gauche, elle est complètement inutile, puisqu'ils n'ont déposé aucune proposition alternative. Pas même besoin de regarder les détails, sauf pour bloquer la discussion et paralyser la vie parlementaire... 

En gros, pour la nupes, « ce budget traduit les errements du gouvernement, son manque de stratégie globale et son incapacité à dégager des moyens pour venir en aide à la France qui souffre, etc., etc ». Mais parallèlement, les mêmes pourront au cours de la même séance gloser sur l'endettement insupportable de la France et le risque de faillite que nous courons. Bref, tout et son contraire sont possibles pourvu d'affaiblir la légitimité de tous ceux qui sont ou qui pourraient être en responsabilité de gouverner. 

Jean-Luc Mélenchon ne veut pas gouverner, il veut changer de République, comme Robespierre, une de ses idoles qu'il cite en oubliant qu'il a mis en place un régime de terreur et que ce même régime de terreur l’a emporté parce que les idées qu'il avait dans le domaine économique ont provoqué la famine, ruiné la bourgeoisie qui l'avait soutenu à la Révolution et mis à genoux l'économie de la France. Quel bilan ! Quel exemple !  

Le projet de budget 2024 est construit sur des fondations, avec un diagnostic d'évolution et des hypothèses de fonctionnement que les pseudo-experts ne veulent pas comprendre. Le gouvernement a fabriqué un budget non pas pour « embêter les Français ou enrichir ceux qui sont déjà riches... Le gouvernement a fabriqué un budget pour répondre aux objectifs portés par l'opinion sans insulter l'avenir. 

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Le problème, c'est que l'opinion est contradictoire entre ce qu'elle souhaite dans l'immédiat et ce qu'elle veut dans le futur. Le discours le plus partagé par l'extrême gauche est de revendiquer des aides aux plus démunis, ce qui passe par un renforcement des services publics.. D'où un faisceau d'incohérences qui rendrait Aristote fou de colère, lui qui a le premier posé les fondements d’une la science économique.

1er point de contradiction : l'activité de l'économie n'est pas si mauvaise. L'opposition de gauche ne veut pas l'admettre. La situation économique n'est pas si mauvaise, et cela transparaît dans le projet de loi de finances. D'abord, la sortie du Covid ne s'est pas traduite par la faillite générale que la majorité des observateurs nous annonçait. Au contraire, la sortie a débouché sur une euphorie qui s'est tassée une fois l'effet de rattrapage épuisé. Mais depuis 2022, la France n'est pas tombée dans la récession, contrairement à l'Allemagne qui va vivre une année 2024 très difficile. En France, la croissance en 2024 va se tasser aux alentours de 1,4 %, parce que la consommation baisse à cause de l'inflation, que l'investissement ralentit à cause des taux d'intérêt et que l'exportation s'essouffle parce que l'Allemagne s'effondre. Par conséquent, Bercy sauve sa croissance 2024. L'emploi va rester soutenu, mais il y aura moins d'embauches et de créations de postes, et surtout on touche à un marché de l'emploi qui est très pauvre en formation et en expertise. Beaucoup de ceux qui restent au chômage aujourd'hui ne savent pas travailler et n'ont pas appris. Les remettre au travail va demander des années de formation. L'extrême gauche se garde bien de donner ce type d'explication. La seule préconisation qu'elle donne à ses déshérités de la vie est de voter pour la Nupes. La crise et la misère font le lit de l'extrémisme qui dissimule les aspects positifs du pays. Ajoutons qu'à la clef de sa démonstration, avec l'aide de Mr. Piketty, la gauche et surtout l'extrême gauche proclament haut et fort que la France est désormais le champion du monde des inégalités. Pour l'extrême gauche, les inégalités de revenus vont de 1 à 18. Exposés de cette façon, par des universitaires académiques comme Mr. Piketty, les chiffres sont impressionnants. Impressionnants mais faux, l'INSEE l’a démontré. Si on tient compte des mécanismes de redistribution sociale et si on tient compte des services publics utilisés gratuitement (l'école, la santé, la mobilité, le train...), les inégalités du revenu net vont de 1 à 3. 

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La France serait donc le pays développé où la redistribution des plus riches vers les plus pauvres est la plus généreuse. La redistribution aidant, l'INSEE estime que l'écart de revenus entre les plus riches et les plus pauvres va de 1 à 3. Autant dire que le phénomène n'est pas scandaleux.

Deuxième point de contradictions graves : les dépenses publiques. L'extrême gauche développe l'idée que la France manque de services publics, il lui faut donc plus de moyens dans l'éducation nationale ou la santé. Personne n'a prouvé que les services publics manquaient de moyens, en revanche, tout le monde se rend compte que les services publics ne fonctionnent pas comme ils le devraient. Problème de moyens ? Peut-être, mais surtout problème d'organisations et de management. C'est une toute autre histoire. Le comble dans ce débat est que beaucoup de ceux qui réclament des moyens supplémentaires sont les mêmes que ceux qui reprochent au gouvernement de dépenser trop et, par conséquent, de nous faire supporter un risque de surendettement. La classe politique n'est pas cohérente une fois de plus, puisque d'un côté elle demande des rallonges budgétaires et de l'autre une rationalité des dépenses publiques. Du côté du gouvernement, on aurait plutôt tendance à contrôler les dépenses et à chercher une organisation meilleure.

Troisième point de contradiction, la dette d'État. Elle représente 3 000 milliards et tout le monde s'en moque jusqu'au jour où l'État français ne pourra plus financer cette dette, ou alors à un prix exorbitant (en risque et en taux d'intérêt). Les uns à gauche ou à droite se ferment les yeux. Ils admettent que la France joue à un jeu dangereux, mais refusent d'admettre que si la France s'endette, c'est parce qu'elle a trop de dépenses publiques, puisqu'ils réclament des rallonges tous les matins. Faut dire que du côté de la présidence de la République, on ne fait guère d'effort pour réduire les dépenses publiques, puisque on a peur de déclencher la foudre sociale. Des gilets jaunes aux émeutes de banlieue, le gouvernement a peur, donc il paie, mais à crédit.

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Quatrième contradiction... pour la première fois dans l'histoire des lois de finances de la 5e République, le gouvernement se retrouve coincé entre la fameuse fin du mois et la fin du monde. Le gouvernement s'avère incapable de répondre aux revendications conjoncturelles (prix de l'essence par exemple) et en même temps de financer les investissements nécessaires pour protéger l'environnement et lutter contre le réchauffement climatique. Le gouvernement est coincé par la classe politique qui n'a pas de majorité autour d'un choix clair. Mais plus grave, il est aussi coincé par l'opinion publique dans un paradoxe extraordinaire. D'un côté, il doit emprunter de l'argent sur les marchés financiers internationaux à un taux de plus en plus élevé, et de l'autre, il a une population qui dispose d'un magot d'épargne de précaution, c'est-à-dire liquide, qui dépasse le double de l'endettement de l'État. 6 000 milliards contre 3 000 milliards. Personne ne parle de cette épargne abondante qui est le fruit d'une inquiétude froide des Français. Toutes catégories sociales confondues, la France a peur, comme disait jadis un célèbre présentateur de télévision. Beaucoup ont oublié Roger Gicquel, mais beaucoup ont peur. Peur pour leur job, peur pour l'avenir de leurs enfants, peur pour la planète, etc., etc. Ils ont peur, donc ils mettent de l'argent de côté. Le comble, c'est que cette épargne ne sert à rien, ne rapporte rien à personne. Elle n’a qu une seule vertu , elle  rassure."

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