Les quadragénaires, nouvelles victimes des troubles du sommeil <!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Santé
Une femme plongée en plein sommeil.
Une femme plongée en plein sommeil.
©JOHN MOORE / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP

Nuits agitées

Les facteurs qui les affectent particulièrement concernent aussi d’autres catégories de population.

Marie-Françoise Vecchierini

Marie-Françoise Vecchierini

Marie-Françoise Vecchierini est neuro-psychiatre et médecin du sommeil. Elle exerce à l'hôpital Hôtel-Dieu à Paris.

Voir la bio »

Atlantico : Une nouvelle étude, publiée par les chercheurs Connor M. Sheehan et Frank Infurna de l'Arizona State University et basée sur les données sur le sommeil d'environ 200.000 Américains, a révélé qu'environ 4 adultes sur 10 ne bénéficient pas du sommeil dont ils ont vraiment besoin au quotidien. Comment est-il possible d'expliquer ce manque chronique de sommeil ?

Marie-Françoise Vecchierini : L'intérêt de cette étude est de montrer que le phénomène de manque de sommeil s'accroît notablement, de génération en génération. Dès l'âge de 40 ans, le sommeil est déjà moins stable et se modifie très progressivement avec cependant une importante variabilité entre les personnes. Les scientifiques insistent sur ce qui est un manque chronique de sommeil qui est essentiellement lié au rythme de vie des personnes. Ce rythme de vie comprend l'activité familiale, l'activité personnelle et professionnelle. On a tendance à avoir de plus en plus d'activités, donc ça prend de plus en plus de temps. Et parmi celles-ci il y a effectivement les écrans qui sont un facteur bien connu, sur lequel il y a des alertes depuis maintenant plusieurs années. Aujourd’hui nous savons que garder son téléphone avec soi dans la même pièce, la nuit, est un facteur d'éveil. Nous attendons une notification ou un éclairage, donc nous sommes constamment en éveil sensoriel. On sait que la lumière du smartphone, si elle donne dans les lumières bleues, va inhiber la sécrétion de la mélatonine et donc va avoir un effet sur un moins bon sommeil. Les facteurs cognitif (être en alerte) et physique (lumière) s’ajoutent pour empêcher la venue et/ou la continuité du sommeil

Cet article met aussi en lumière le rôle de facteurs socio-économiques bien identifiés. Les auteurs de l’article montrent que la prise de conscience a commencé dès la récession et la crise de 2008. Cette situation économique avec les difficultés financières qu’elle a engendrées a augmenté les facteurs de fragilité. Dès que les facteurs de stress deviennent plus importants, avec des préoccupations pour trouver du travail, apporter de l'argent à la famille, vous allez moins bien dormir. Il y a également la responsabilité de la prise en charge des générations entre elles. Les jeunes arrivent de plus en plus tard sur le marché du travail. Ils restent souvent à la charge des générations de leurs parents c’est-à-dire d’adultes de 40 à 50 ans. Ces adultes qui doivent aussi s’occuper parfois de leurs propres parents, qui vivent de plus en plus vieux avec les maladies et parfois la dépendance qui accompagnent le grand âge. 

Qu'est-ce que le manque de sommeil engendre chez les adultes et est-ce que ça peut devenir héréditaire ?

Il y a deux aspects à prendre en compte dans le manque chronique de sommeil : la quantité et la qualité du sommeil. Le long temps à l'endormissement, les réveils nocturnes ou un éveil matinal très précoce, sont les trois grands troubles du sommeil dont se plaignent les sujets. Qu'est-ce que cela a comme conséquences ? Ces difficultés de sommeil peuvent provoquer des privations de sommeil qui vont impacter la vigilance. La restriction du temps de sommeil comportemental ou secondaire à des troubles du sommeil sont bien mis en évidence sur des agendas de sommeil sur deux semaines, pour obtenir le profil de sommeil lors de jours travaillés et lors des jours de week-end. On voit alors très bien le rebond de sommeil lors des jours non travaillés, sorte de compensation alors chez les personnes qui n'ont pas dormi le temps qui correspond à leurs besoins de sommeil au cours de la semaine. Il y a là ce qu'on appelle aussi le jetlag social (décalage de plus de 2h) qui déstabilise l'horloge biologique.

Un temps de sommeil insuffisant et de mauvaise qualité a des répercussions sur la vigilance le lendemain. On sait aussi que lorsque ce phénomène est chronique, il y aura des répercussions sur les émotions par exemple. Les personnes qui sont vraiment en privation de sommeil et de manière répétée sur plusieurs jours vont avoir plus de stress et les adolescents seront beaucoup plus irritables. Cela a aussi des répercussions sur la prise alimentaire. La privation chronique de sommeil, comme l’ont démontré des   travaux menés par les chercheurs américains aboutit à un déséquilibre hormonal favorisant la consommation de substances sucrées et grasses d’où la tendance à la prise de poids. La courbe de l'obésité augmente alors que la courbe de la durée du temps de sommeil diminue.

Comment peut-on retrouver le sommeil si on a déjà été impacté physiquement par le manque de sommeil chronique ?

Il faut d'abord connaître sa propre physiologie du sommeil car nous n’avons pas tous besoin d’un temps de 8 heures de sommeil par nuit, bien que ce soit les recommandations de la durée moyenne du temps de sommeil chez l’adulte. Certaines personnes ont besoin de moins d'heures de sommeil, d’autres doivent dormir plus longtemps. En fonction de cela, il y a dans la vie des impératifs et des donneurs de temps. Par exemple, un des donneurs de temps va être l'heure à laquelle vous devez vous lever pour aller travailler. Vous devez en déduire, pour couvrir vos besoins de sommeil, l'heure à laquelle vous devez vous endormir. Ce qui revient à assurer son besoin personnel de sommeil. Ensuite la qualité du sommeil demande à se préparer à dormir, à se couper de la veille, alors le sommeil viendra doucement, en moins de 20 minutes et ne sera pas impacté par des éveils nocturnes… Dernière chose qui est très importante : la régularité des horaires. Notre horloge biologique en a besoin pour sa bonne régulation. 

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !