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Les 4 grandes incertitudes politiques mondiales qui traumatisent les investisseurs
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Atlantico Business

Les marchés financiers sont plus tributaires des évolutions politiques que des perspectives économiques.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

Il est aussi l'auteur du blog http://www.jeanmarc-sylvestre.com/.

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Pour les spécialistes de l’investissement et des placements financiers, les politologues sont désormais beaucoup plus recherchés que les économistes experts en conjoncture.

Alors qu’ils préparent leurs arbitrages pour l’année 2017, ils considèrent que les incertitudes politiques mondiales sont beaucoup plus risquées que les perspectives économiques.

Sur le front de la conjoncture, on considère que la croissance économique va continuer de se fabriquer du côté des émergents et notamment de la Chine et de l'Afrique, qu’une grande partie de cette croissance sera tirée par les investissements liés aux contraintes environnementales et climatiques et qu'enfin la révolution digitale va continuer d’impacter l’ensemble des activités économiques, jusqu’à toucher des secteurs fondamentaux comme la santé et l’éducation. Il n’y a donc pas de grandes surprises à attendre sur les évolutions technologiques à venir dans les dix prochaines années. La plupart des grandes innovations sont en cours de développement. La seule incertitude qui demeure se situe dans la capacité des peuples à accepter et à assumer les mutations.

On tombe alors dans les incertitudes politiques qui n’ont jamais été aussi systémiques.

Pour les six mois qui viennent, les investisseurs ont listés quatre grandes séries de risques politiques.

1er niveau de risque : les élections américaines. Jusqu’alors, le peuple américain a habitué la planète toute entière à offrir une situation politique relativement claire et simple. Le président américain était soit républicain, soit démocrate. Avec beaucoup de contre-pouvoirs au Congrès, dans la presse, avec aussi des associations de consommateurs, d’épargnants et de salariés très puissantes. L’ensemble du système américain offrait des politiques alternatives qui n’étaient jamais idéologiquement très clivantes. L’offre politique qui se présente pour la prochaine présidentielle est totalement nouvelle et différente. Donald Trump n'est pas un candidat républicain classique. Il a d’ailleurs fissuré le parti qui n'est donc pas totalement derrière lui. Hillary Clinton de son côté, ne fait pas l’unanimité chez les démocrates.

Ce qui est d’ailleurs étonnant, c’est que le monde des affaires américain (disons Wall Street pour simplifier) qui est d’ordinaire plutôt républicain serait désormais plus favorable à Hillary Clinton. Alors que le peuple américain de la classe moyenne se retrouve plus dans l’attitude de Donald Trump que dans celle d’Hillary Clinton.

En bref, selon que le prochain président des États Unis, sera ou l'un ou l’autre, les politiques économiques, budgétaires, fiscales et les politiques étrangères seront assez différentes. L’image projetée de l’Amérique sera également très différente, ce qui n’est pas neutre pour l’investisseur. Les financiers américains ont des choix à faire, mais sont dans l'incertitude la plus totale. 

2e niveau d’incertitude, le Brexit. Les Britanniques ayant voté la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, les responsables politiques semblent désormais assez peu pressés de mettre en route les procédures de sortie et toutes les échéances de négociation ont été retardées à tel point que les scénarios de retour en arrière commencent à faire partie des hypothèses plausibles. Pour l’heure c’est donc le brouillard le plus total, ce qui est la pire des situations pour les investisseurs. Du coup, les marchés immobiliers sont figés, le marché des investissements dans l'industrie britannique est sclérosé et l‘Union européenne de son côté commence à s’interroger.

Dans les opinions publiques européennes, un tel cafouillage fait le jeu des populistes, nationalistes, anti-européens.

Ce qui est étonnant, c’est que les pro-européens sont paralysés, ils ne proposent pas des réformes capables d’enrayer ces tendances souverainistes.

Pour les investisseurs professionnels, comme pour les épargnants ce manque de visibilité est la pire des situations ;

3incertitude politique, les élections en Italie et en France. Ces deux pays sont majeurs dans la construction européenne. Or les forces de rappel anti-européennes sont très fortes en France comme en Italie. Sans la France, pays fondateur, il n’y aurait évidemment plus d’Europe. Sans l’Italie, plus d’Europe du sud et surtout plus de zone tampon avec la Méditerranée. Le débat politique en Italie va être clair et violent.

Le président du conseil, Matteo Renzi a ouvert des chantiers de réformes très important pour hisser l’Italie dans la compétition mondiale, mais il n'est pas assuré de conserver sa majorité. Il recherche aujourd’hui, des garanties sérieuses du côté de François Hollande qui a peu de moyens pour les lui donner et Angela Merkel qui persiste à demander des politiques d’ajustement que le peuple italien repousse en permanence.

Les pressions régionalistes sont moins fortes qu'en Espagne, mais elles s’expriment par des poussées de populisme qui rappellent les plus mauvais jours de Berlusconi. En France, tout se passe comme si les enjeux européens étaient absents des programmes politiques, que ce soit au parti socialiste ou chez les républicains. L’Europe n’est un sujet que chez les extrémistes qui veulent en sortir.

4e risque politique enfin, la réaction des banques centrales. Depuis le début de la crise de 2008, ce sont les banques centrales mondiales qui ont empêché les systèmes économiques occidentaux de s’effondrer. Qu’on le veuille ou non, la Reserve fédérale américaine, la Banque centrale d’Angleterre et la Banque centrale européenne ont arrosé la planète toute entière de liquidités en rachetant les dettes qui avaient été contractées partout dans le monde soit dans la sphère privée comme aux Etats-Unis ou en Grande-Bretagne soit dans la sphère publique comme en Europe.

Aujourd’hui, les banques centrales sont arrivées au bout du bout de toutes ces politiques d’accommodement monétaires. Les taux d’intérêt sont désormais à zéro. Il faut donc partout dans le monde, soit entamer des politiques de redressement, soit commencer à ruiner les épargnants.

Les politiques de redressement sont rejetées par les opinions publiques. Quant à engager un processus de ruine des épargnants, la BCE risque de provoquer des réactions électorales très conservatrices.

Les systèmes ne sont sans doute pas usés, mais ils sont dans l'impasse, complètement bloqués. Or les investisseurs professionnels n’ont que pour seules boussoles, les gestes des banquiers centraux. Ces gestes sont complètement déconnectés des équations économiques. Ils dépendent avant tout des circonstances politiques.

Pour l’instant c’est eux qui gouvernent le monde. Pour combien de temps encore ? Personne ne le sait.

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