Le gel du taux du livret A est une mauvaise nouvelle pour les épargnants mais surtout désolante pour l’image de la politique économique <!-- --> | Atlantico.fr
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Tout le monde est content de la décision de geler le taux du livret A à 3% jusqu’à la fin 2024.
Tout le monde est content de la décision de geler le taux du livret A à 3% jusqu’à la fin 2024.
©DENIS CHARLET / AFP

Atlantico Business

Cette affaire du livret A montre qu’il est beaucoup plus facile pour un gouvernement qui n’a pas de majorité d’utiliser de l’épargne plutôt que de créer des impôts nouveaux ou surtout de réduire ses dépenses publiques et sociales.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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A priori tout le monde est content de la décision de geler le taux du livret A à 3% jusqu’à la fin 2024. Les banques, le logement social et surtout l’État qui a besoin de financer ses déficits au cout le plus faible.

Normalement, le taux de rémunération du livret A aurait dû grimperde 3 à 4% si on avait appliquéla formule de changement automatique qui prend en compte les indicateurs d’inflation.

Il y a quelques années en effet, un gouvernement pris d’un accès de fièvre libérale avait eu l’intelligence de confier à une formule mathématique le soin de déterminer le taux d’intérêt du livret A. Le tauxévoluait donc de façon mécanique selon la conjoncture. Faut dire qu’à l’époque, la tendance était à la baisse généralisée des taux. Pas facile à faire accepter. Du coup, avec la formule, le ministre n’avait pas à justifier cette évolution. Il n’y avait pas débat.

Ce qui est cocasse aujourd’hui, c’est que face à la nécessite économique et monétaire de remonter les taux de rémunération, le pouvoir politique reprend la main et fige les taux parce que les effets lui paraissent préjudiciables.

Les banques ont été très soulagées d’apprendre cette nouvelle. Ça faisait des semaines qu’elles attiraient l’attention des services de Bercy en expliquant que la hausse du taux de l’épargne allait accroitre l’attractivité du livret Aau détriment des autres placements dont l’assurance vieet ce faisant allait augmenter les coûts.

Même réaction du cote de la caisse des dépôts qui centralise et rémunère-les 2/3 des dépôts du livret A et par conséquent souscrit des prêts au titre de l’habitat social. Alors que la situation du logement est compliquée, on voyait mal à la CDC augmenter le coût desprêts au logement pour couvrir la hausse des taux du livret A.

D’une façon générale, les économistes considéraient qu’une augmentation de la rémunération des livrets d’épargne allait accroitre la propension à épargner au détriment de la consommation. Et en fait, on n’a pas besoin de l’épargne liquide et disponible. En revanche, on a besoin que cette épargne soit consommée.

Une grande majorité des agents économiques ne se sont donc pas opposés au gel de cette rémunération. Les seuls perdants dans cette affairesont les épargnants eux-mêmes et en général des petits épargnants. 

Mais ce qu’on ne dit pas dans cette affaireque l’Étaty gagne aussi en stabilité financière. L’état n’a pas forcement intérêt à fidéliser et récompenser les épargnants du livret A. parce que plus les livrets A sont attractifs, plus la consommation se rétracte et l’épargne liquide gonfle. Dans ce cas-là ils délaissent les produits d’épargne à risqueet des obligations d’Etat. Or l’Etat a besoin de financement par l’épargne.

Mais il n’a pas besoin que cette épargne soit stérilisée dans des comptes liquides et disponibles… Il a besoin d’un financement public pour couvrir sesbesoins. Il prend dans l’épargne sous la forme d’obligations ou de bons du trésor.

Donner au livret A un avantage de rémunération net d’impôt, c’est prendre le risque de laisser augmenter les autres formes d’épargne qui sont fléchées sur le budget.

La pression est importante et le meilleur moyen d’éviter cette pression, serait de permettre aux épargnantsles petits comme les gros d’être rémunérés au prix du marché. Mais pour que ce soit possible, faudrait diminuer la demande de financement public et pour diminuer la demande de financement public, il faudraitréduire les dépenses publiques et sociales. On revient à la case départ.

Le financement de l’économie française est fragilisé par l’excès de ses dépenses publiques.

Moralité : il est beaucoup plus facile pour un gouvernement qui n’a pas de majorité, d’utiliser de l’épargne plutôt que de créer des impôts nouveaux ou surtout de se lancer dans une politique de rigueur au niveau des dépenses publiques.

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