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L'expérience française de la mondialisation dans l’autre sens
©Reuters

Barrières protectionnistes

La récente loi adoptée par la France sur la pénalisation des clients du marché de la prostitution s'inscrit dans un mouvement plus général d'amplification des contraintes légales, taxes et autres entraves poussant tous ceux qui créent de la richesse, attirent des clients ou des consommateurs à quitter l'Hexagone.

Hash H16

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H16 tient le blog Hashtable.

Il tient à son anonymat. Tout juste sait-on, qu'à 37 ans, cet informaticien à l'humour acerbe habite en Belgique et travaille pour "une grosse boutique qui produit, gère et manipule beaucoup, beaucoup de documents".

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À force d’efforts particulièrement subtils et très finement calibrés, notre gouvernement a mis en place de courageuses politiques qui permettent enfin de tester certaines hypothèses. Grâce à ces efforts, on mène actuellement en France une expérience très intéressante sur la mondialisation. Celle-ci, commencée il y a déjà plusieurs décennies, a gagné en importance ces dernières années.

Et alors même que le président avait pourtant fait preuve d’un progressisme que d’aucuns pourraient qualifier de débridé en proposant puis en imposant le mariage homosexuel, voilà que sa majorité est parvenue à faire preuve d’un conservatisme quasi-puritain concernant la prostitution, montrant par là que la cohérence d’ensemble n’est absolument pas nécessaire pour gouverner un pays.

En d’autres termes, les députés sont enfin parvenus à pénaliser les clients du marché de la prostitution. L’expérience française, tournant déjà à plein régime, vient de passer une étape supplémentaire : petit à petit, le pays se vide de la prostitution officielle et la fait durablement passer dans le marché noir, augmentant tragiquement les risques et dangers de celles et ceux qui pratiquent ces professions. Plus à propos, cela entraîne aussi un exil massif des prostituées frontalières hors du pays.

Avouons que la manœuvre est particulièrement bien trouvée puisque, ce faisant, le fisc français – premier proxénète du pays – devra faire une croix sur toutes les transactions correspondantes. Il devra aussi abandonner tout espoir de se récupérer au travers de la TVA récoltée auparavant lorsque ces mêmes prostituées dépensaient leurs revenus sur le territoire. Cela en fera d’autant plus pour les Belges, les Espagnols et les Suisses qui se frottent les mains des idioties législatives françaises.

L’expérience française ne s’arrête pas là. Quand je vous disais qu’elle a récemment pris de la vitesse, c’est bel et bien le cas puisqu’on apprend que, pour l’année écoulée, le pays a vu partir pour d’autres cieux un nombre record de millionnaires : c’est ainsi qu’apparemment, et selon l’enquête de New World Wealth, 10.000 millionnaires ont quitté la France. Voilà qui, tout comme pour les prostituées, constitue un intéressant développement dans un pays qui fait, manifestement, absolument tout pour se séparer de celles et ceux qui créent de la richesse, font tourner des commerces, attirent des clients ou des consommateurs.

Au passage, l’expérience française ne se contente pas de bombarder méticuleusement les uns et les autres de contraintes légales, d’interdictions ou de taxes. En plus de cogner sur les riches, les aptes et les travailleurs, l’expérience consiste aussi à rogner sur les services qui peuvent leur être rendus, notamment les régaliens comme la justice, la police et la sécurité. Il n’est pas étonnant d’apprendre dans ce contexte que si les millionnaires sont partis, c’est essentiellement pour échapper à la montée des tensions religieuses dans le pays. Étonnante marque de réussite d’un état pourtant laïc, vous ne trouvez pas ?

Mais l’expérience française va encore plus loin. C’est le petit côté "toujours plus" de ce peuple qui ne recule devant aucun dépassement, aucune exagération, aucune révolution surtout si elle est sanglante.

Pendant que les riches, les aptes et les travailleurs s’en vont, le pays est lentement vendu, par petits bouts, aux étrangers. Et là, on touche même au sublime lorsqu’on regarde ce qui se passe actuellement dans le domaine agricole puisque des Chinois ont récemment racheté pour 1700 hectares de terres agricoles : un fonds d’investissement, ciblant des exploitants très endettés, récupère ainsi 98% (et non 100%) de la société agricole créée ad hoc pour l’opération. Ce faisant, le rachat échappe à l’organisme d’État chargé de préempter à tout va pour éviter que ces terres ne tombent dans des mains sans l’imprimatur de l’intelligentsia officielle.

Les autorités sont, bien évidemment, plus qu’irritées mais, même en serrant les mâchoires, en fermant leurs petits poings et en se roulant par terre, elles ne peuvent rien y changer. Quant au côté positif du rachat, il est bien évidemment totalement occulté par les larmes amères qu’elles déversent dans l’article à grands barils humides : horreur, les terres rachetées ne créeront pas de nouvelles installations ! Abomination, "aucune implication sur les territoires n’est possible à cette échelle", quoi que cela puisse signifier en vrai français ! Désespoir, la production est destinée à l’exportation et ne sera donc pas utilisée localement, ce qui est übermal, pas du tout écolo et forcément une honte.

Pas question d’évoquer le fait que cela sauve un agriculteur de la faillite. La création d’emplois induits ? Rien à foutre puisque notre patrimoine est racheté par ces méchants étrangers ! Évoquer le rôle de la Politique Agricole Commune dans cet échec ? Vous n’y pensez pas ! Quant au rôle (très douteux) des SAFER dans l’engrenage triste qui aboutit à cette situation, il serait bien sûr contre-productif – pour les SAFER – de les évoquer.

Bref.

L’expérience française continue donc, sans frein, cette expérience si particulière qui consiste à contre-carrer partout, tout le temps et pour tous la création de richesse, d’emplois et d’opportunités, cette expérience qui revient à sur-protéger ceux qui sont déjà installés et acoquinés avec le pouvoir, ceux qui ont déjà un job, ceux qui ont déjà des privilèges et des passe-droits, des avantages ou des facilités, et qui, par conséquence, fait fuir ceux qui n’en sont pas, cette expérience si terriblement française continue donc.

Seulement voilà : de tout temps, la meilleure protection d’un pays n’a jamais été dans ses frontières, pas plus qu’elle n’a été dans le pouvoir coercitif de quelques douaniers ni dans quelques taxes idiotes qui appauvrissent le consommateur (Bastiat l’a démontré, maintes et maintes fois : le protectionnisme et la taxation des produits à l’importation revient à appauvrir le pays qui instaure la taxe). Non.

La meilleure protection d’un pays réside bel et bien dans la capacité de sa population à produire directement de la richesse, avec le moins d’entraves possibles. Un peuple riche n’a pas besoin de ces protections de pauvres et de faibles, qui appauvrissent et affaiblissent.

Les gouvernements et politiciens qui se succèdent au pouvoir en France ont choisi, encore et encore, d’accumuler des boulets, des entraves et des contraintes sur les Français pour s’assurer qu’ils soient bien tous égaux avant de s’assurer qu’ils soient surtout suffisamment libres pour produire des richesses.

Au final, s’ils sont de moins en moins inégaux, ils sont aussi de plus en plus pauvres. Et dans ce cadre, sauf à tourner le pays en goulag à ciel ouvert, toutes les barrières protectionnistes du monde ne suffiront pas à arrêter la fuite des riches hors de nos frontières, ni à stopper l’arrivée des investisseurs étrangers qui pourront racheter à bas prix les ressources, produits et richesses du pays que plus personne ne sera à même d’exploiter ou suffisamment riche pour le faire.

Quant aux Français, ils se plaignent du rachat par ces Chinois de terres agricoles françaises ; ils se plaignent du rachat par certains Qataris de monuments, hôtels, magasins ou clubs de foot ; bref, ils se plaignent d’une mondialisation qui ne leur rapporte pas ce qu’ils souhaitent. Eh bien plutôt que s’en prendre à ceux qui, finalement, sont encore prêts à donner de l’argent pour nos richesses, ils devraient se demander où sont passés ces Français qui auraient pu en faire autant et ont laissé tombé l’affaire. Ils pourraient chercher à savoir pourquoi ils ont abandonné, ils ont laissé tomber.

Décidément, on mène en France une expérience très intéressante, même si, déjà tentée dans d’autres pays, son résultat est globalement assez connu.

Cet article a initialement été publié sur le blog d'H16 et est consultable ici

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