Et l’une des statistiques démographiques les plus importantes pour l’avenir de la planète est passée complètement inaperçue <!-- --> | Atlantico.fr
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Une femme passe devant une fresque murale d'une mère berçant son nouveau-né à Bombay, le 8 mai 2022.
Une femme passe devant une fresque murale d'une mère berçant son nouveau-né à Bombay, le 8 mai 2022.
©Indranil MUKHERJEE / AFP

Fertilité

Dans l'Etat rural du Bihar, au Nord-Est de l’Inde, l’indice de fécondité est le plus élevé du pays. Mais c’est aussi dans cette région que la fertilité a le plus fortement baissé ces dernières années.

Atlantico : Selon le National Family Health Survey, le taux de fécondité en Inde est tombé sous 2,1 – le taux de renouvellement des populations – comment peut-on expliquer ce phénomène ?

Laurent Chalard : La baisse de la fécondité en Inde est liée à deux éléments. D’une part une politique malthusienne menée par le gouvernement depuis des décennies ; elle visait à une réduction drastique de la natalité de manière incitative (et non contrainte comme en Chine). De nombreuses campagnes de publicité incitent à faire moins d’enfants, avec l’argument que c’est plus facile de contrôler l’avenir des enfants ; mais aussi des campagnes de contraception et des politiques de stérilisation qui sont, en théorie, non coercitives. On encourage vivement les personnes ayant déjà eu plusieurs enfants à se faire stériliser. La politique a fini par porter ses fruits mais plus lentement qu’en Chine. En Inde, en 2000 c’était encore 3 enfants par femmes, 2,5 en 2010 et donc désormais sous le seuil de remplacement des générations. D’autre part, la baisse est due à une amorce de développement économique depuis quelques décennies, même si elle est moins importante qu’en Chine, elle a un impact sur les classes urbaines aisées. Quand un territoire se développe, les femmes font plus d’études et moins d’enfants. Dans les régions très pauvres de l’Inde, comme le Bihar et Uttar Pradesh, le taux de fécondité est toujours très élevé. Il faut noter que le Bangladesh a suivi exactement la même tendance que l’Inde, avec les mêmes moyens et les mêmes difficultés. De même pour le Pakistan, même s’il est un peu à la traîne. 

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Quelles sont les conséquences de la chute de ceux du taux de fécondité ?

L’Inde est un pays qui compte plus de 1,3 milliards d’habitants et pourrait devenir le pays le plus peuplé du monde d’ici quelques années, devant la Chine. Alors même que la Chine est environ trois fois plus grande. Cela pose des problèmes de surpeuplement important, en particulier en zone rurale, qui se traduisent par une forte malnutrition notamment des enfants. L’Inde a le volume le plus important au monde d’enfants malnutris. L’Inde a besoin d’une production agricole énorme pour nourrir sa population et lui assurer le minimum vital. Elle a réussi à relever ce défi grâce à la révolution verte. Cela a permis à l'Inde de devenir le deuxième producteur mondial de blé et de riz après la Chine. Mais la situation reste très fragile et si la croissance de la population se poursuivait, cela ne serait plus forcément tenable. D’autant que le réchauffement climatique pourrait perturber la production et mettre le pays en danger. De ce point de vue, la baisse de la fécondité est une bonne nouvelle, cela va permettre une stabilisation démographique qui pourrait lui permettre d’éviter un risque de famine. Deuxièmement, la croissance de la population freine la croissance économique. Une croissance démographique de 1% avec une croissance économique à 3%, c’est en réalité une croissance économique de 2%. Par ailleurs, la croissance démographique empêche l’éducation des enfants, or on sait bien que la croissance économique vient de l’élévation du niveau d’éducation et de qualification des enfants. Il faut que l’Etat puisse mettre tout le monde à l’école et que les parents puissent s’occuper de l’éducation de leurs enfants. Troisièmement, cela peut entraîner un dividende démographique pour l’Inde avec l’arrivée de jeunes actifs sur le marché du travail qui vont être une majorité et un nombre relativement faible de personnes âgées, cela va favoriser la croissance. La surpopulation fait aussi peser une tension importante sur l’environnement, avec des problématiques de gestion des déchets, des eaux usées, etc. Pour le maintien de la biodiversité et de la protection de l’environnement, la réduction du taux de fécondité est aussi une bonne nouvelle.

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Dans quelle mesure est-ce aussi un évènement important pour l’avenir de la planète ? 

Comme nous l’avons dit, l’Inde va devenir le pays le plus peuplé du monde et c’est aussi un pays où le niveau de vie reste relativement bas. Cela montre que même des pays relativement pauvres peuvent baisser leur taux de fécondité, s’ils mettent en place les politiques adéquates (ce que ne fait pas l’Afrique subsaharienne). C’est aussi une bonne nouvelle pour la planète car notre principal défi est d’absorber cette croissance démographique considérable du XXe siècle qui se ralentit mais n’est pas encore arrivée au terme de sa transition. Le but est de ne pas épuiser les ressources de la planète alors que nous approchons des limites connues et que le niveau de vie moyen sur terre augmente, ce qui accentue la pression sur l’environnement, et notamment les ressources énergétiques. Si on veut continuer à voir nos niveaux de vie augmenter, il faut que la transition démographique se termine et l’Inde est un des principaux pays qui contribuait à l’augmentation de la fécondité. Que la Chine et l’Inde aient contrôlé leur fécondité est une très bonne nouvelle. Le dernier territoire où cela doit être contrôlé est l’Afrique subsaharienne. La baisse y est pour l’instant insuffisante.

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