Intégrer l'Union européenne : les Croates sont-ils masos ? <!-- --> | Atlantico.fr
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La Croatie a présenté sa demande d’adhésion à l'Union européenne en 2003.
La Croatie a présenté sa demande d’adhésion à l'Union européenne en 2003.
©Reuters

Noël aux Balkans

Ce vendredi, les 27 pays membres de l'UE signeront le traité d'adhésion de la Croatie. Faut-il élargir encore l'Europe alors que l'UE est embourbée dans la crise de la dette ?

Philippe  Moreau Defarges Bruno Bernard

Philippe Moreau Defarges Bruno Bernard

Philippe Moreau Defarges est chercheur à l'Institut français des relations internationales (IFRI) et professeur à l'Institut d'études politiques de Paris.

Spécialiste des questions internationales et de géopolitique, il est l'auteur de très nombreux livres dont Introduction à la géopolitique (Points, 2009) ou 25 Questions décisives : la guerre et la paix (Armand Colin, 2009).

Bruno Bernard est ancien conseiller politique à l'Ambassade de Grande-Bretagne à Paris, et consultant politique indépendant.

 

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Atlantico : Ce vendredi les ministres vont signer le traité d’adhésion de la Croatie à l’Union européenne. Une fois le traité ratifié, la Croatie deviendrait en juillet 2013 le 28e pays membre de l'UE. Compte tenu de la situation économique actuelle, le contexte est-il favorable à l'élargissement ?

Philipe Moreau Desfarges : Non. Il n’est absolument pas favorable. Cependant c’est un processus de longue date. La Croatie a présenté sa demande d’adhésion à l'Union européenne en 2003. Cette dernière a été officialisée par la Commission européenne début 2004. Le statut de candidat fut accordé à la Croatie par le Conseil européen au cours de l'année 2004.

Après six ans de négociations, la Croatie deviendra en juillet 2013 le deuxième pays de l'ex-Yougoslavie, après la Slovénie, à rejoindre l'UE. La signature du traité, intervient cinq mois après la fin des pourparlers. En effet, en juin 2011, le président de la Commission José Manuel Barroso a demandé au Conseil de l'Union européenne de clôturer les négociations afin que la Croatie puisse entrer dans l'Union européenne et devenir ainsi le 28e État membre.

Un problème se pose : la Croatie va-t-elle rejoindre l’Union européenne ? Il semble acquis que la Croatie va intégrer l’UE, or il est important de souligner qu’une fois le traité signé par les états membres il faut à nouveau le faire approuver selon les procédures nationales. Les 27 états membres de l’UE doivent chacun valider ce traité, selon la procédure constitutionnelle nationale. Ce n’est pas évident, les états vont utiliser la voie parlementaire ce qui rend beaucoup plus prévisible le processus de ratification. Toutefois cela ne garantit absolument pas que ce dernier soit réalisé. Sur les 27 pays il est fort probable que le Parlement de l’un d’entre eux ait un comportement imprévisible et pourrait bloquer éventuellement l’adhésion de la Croatie.


Qu'est-ce que cela change pour la Croatie et l'Europe ? Quels sont leurs intérêts respectifs ?

La Croatie a tout intérêt à rejoindre l’Union européenne. Elle est l’une des entités de l’ex-Yougoslavie et veut sortir de cet isolement et de ce bourbier balkanique. Après la Slovénie, la Croatie est l'un des États ayant le mieux récupéré après la dissolution de l'ex-Yougoslavie et espère ainsi devenir la deuxième ancienne république yougoslave à devenir membre.

Concernant l’UE, l’adhésion de la Croatie est plutôt symbolique. En accueillant ce pays l’UE montre qu’elle reste ouverte à ses élargissements. Un rejet à l’élargissement de l’UE à la Croatie sera perçu comme une fermeture de l’Union à d’éventuels élargissements. Cela signifierait que la Serbie, la Bosnie-Herzégovine et la Macédoine n’ont aucune chance d’intégrer l’UE.

Où en est la politique d'élargissement de l'UE concernant les autres pays candidats ?  

Derrière la Croatie se bousculent d’autres états : La Serbie, la Bosnie-Herzégovine, le Monténégro, la Macédoine.

La politique d’élargissement est un peu bloquée, l’UE a précédemment accueilli beaucoup d’états. Initialement composée de six pays désormais 27 états en font partie. Ce sont des entités très diverses, l’UE manifeste clairement l’envie de freiner son élargissement. Dans les années qui viennent, ses perspectives d’élargissement ne sont pas favorables. La Turquie en est une illustration.

La politique d’élargissement peut-elle reprendre plus tard ? Pour cela deux conditions sont nécessaires :

  • Une situation économique beaucoup plus favorable : l’UE doit vraisemblablement retrouver une croissance économique lui permettant d’accueillir de nouveaux états.
  • Des réformes institutionnelles : les élargissements ont un peu déçus car ils n’ont pas été accompagnés de réformes institutionnelles créant une Europe plus cohérente. Désormais si de nouveaux élargissements doivent avoir lieu, préalablement une réforme substantielle des institutions doit intervenir.

L'élargissement met-il en péril le sauvetage économique européen ? 

Non, nous ne pouvons pas prétendre cela. L’élargissement ne met pas en péril le sauvetage économique européen dans la mesure où il s’applique à des états de taille modeste. Pour les finances du bloc communautaire, la Croatie et ses 4,3 millions d'habitants ne pèseront pas lourdement.

Les élargissements des années 2000 ont permis d’agrandir le marché européen. Plus un marché est vaste, plus il est dynamique. L’élargissement a plutôt été positif. Cependant à l’heure actuelle, compte tenu de la situation économique, les élargissements coûtent cher. L’UE ayant des difficultés financières énormes, elle n’est pas prête à prendre en charge de nouveaux états.   

Propos recueillis par Caroline Long

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